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Selimen, ou la désintégration triste d'un menteur

Lettre type : Selimen, ou la désintégration triste d'un menteur. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  12 Février 2014  •  Lettre type  •  576 Mots (3 Pages)  •  723 Vues

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A. Célimène, ou la triste déchéance d’une menteuse :

Célimène est belle, Célimène joue avec les sentiments des hommes ; cette jeune veuve à la langue bien pendue (Molière ne s’avance pas davantage) n’est pourtant pas antipathique : lorsqu’Alceste lui propose une traversée du désert, pour marcher, sous un soleil de plomb, des jours entiers, l’on s’écrirait bien avec elle : « Moi, renoncer au monde avant que de vieillir, / Et dans votre désert aller m’ensevelir ! » (V,4, v.1769-1770). Comment donc rire de sa déchéance finale, lorsque les petits marquis et la prude Arisoné (cette hypocrite jalouse, cette fausse dévote) se promettent de la perdre de réputation (V,4), exactement comme la marquise de Merteuil le sera, elle aussi, par la publication de ses lettres à la fin des Liaisons dangereuses ? Impossible. On a tous quelque chose en nous de Célimène, et la fin de la pièce, qui voit la fin de sa réputation, quand elle sort comme une étoile qui s’éteint dans la nuit, cette fin-là n’est pas comique, mais alors pas du tout.

B. Alceste, ou la tentation racinienne :

Alceste est jeune, Alceste est beau, Alceste est aimé de trois femmes à la fois (Arsinoé, Eliante, Célimène), mais Alceste souffre du complexe de Sarah Bernhardt, la grande tragédienne, qui n’aimait pas les femmes : il clame sur le registre tragique, tout à sa fureur, comme la grande Phèdre, persuadé de l’infidélité de sa maîtresse : « Ah ! tout est ruiné : / Je suis, je suis trahi, je suis assassiné » (IV,2, v.1227-1228). La difficulté de son élocution dit bien sa fureur, et cette hybris, cette démesure, est caractéristique du héros tragique. Nouveau Christophe Colomb, Alceste se présente à chaque instant comme celui qui découvre le continent de l’amour, comme si les autres n’y avaient jamais mis le pied ou même la main (et en cela il se trompe, comme Christophe Colomb) : « Ah ! rien n’est comparable à mon amour extrême » (IV, v.1422). Comment faire du Misanthrope une comédie quand son héros s’exprime de façon tragique ?

C. Célimène et Alceste, ou la rupture de la fin :

D’ordinaire, les comédies finissent bien : seule La Comédie humaine échappe à la règle, parce que Balzac n’a pas pu la mener à terme, trop occupé par un amour épistolaire. Malgré la promesse de Célimène de l’épouser, Alceste refuse l’amour d’une femme qui n’est pas prête à délaisser son confort pour un trekking dans le Sahara : « De vos indignes fers pour jamais me dégage » (V,4, v.1784), lui annonce-t-il sans ménagement. Il est pourtant d’usage de finir une comédie par un mariage : c’est ce qui se passe dans L’Avare ou dans Mariage à la grecque, où, malgré leurs différences culturelles, les héros s’aiment parce que de n’importe quel pays de n’importe quelle couleur, l’amour est un cri qui vient de l’intérieur –et n’appréciant pas ce que Célimène est à l’intérieur d’elle-même (parce que, on l’a dit, sinon elle est belle), au contraire de Jack hurlant Baby one more time dans Freaky Friday, Alceste préfère rompre, partir au désert et y hurler à son aise (vox clamat etc.). Quel chameau. Une pièce qui ne finit pas bien ne saurait donc être une comédie.

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