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Rhinocéros Acte Iii Scène Finale

Mémoire : Rhinocéros Acte Iii Scène Finale. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  20 Janvier 2013  •  1 673 Mots (7 Pages)  •  1 291 Vues

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Ionesco : Rhinocéros

BERENGER

C’est moi, c’est moi. ( Lorsqu’il accroche les tableaux, on s’aperçoit que ceux-ci représentent un vieillard, une grosse femme, un autre homme. La laideur de ces portraits contraste avec les têtes des rhinocéros qui sont devenues très belles. Bérenger s’écarte pour contempler les tableaux. ) Je ne suis pas beau, je ne suis pas beau. ( Il décroche les tableaux, les jette par terre avec fureur, il va vers la glace. ) Ce sont eux qui sont beaux. J’ai eu tort ! Oh ! comme je voudrais être comme eux. Je n’ai pas de corne, hélas ! Que c’est laid, un front plat. Il m’en faudrait une ou deux, pour rehausser mes traits tombants. Ça viendra peut-être, et je n’aurai plus honte, je pourrai aller tous les retrouver. Mais ça ne pousse pas ! ( Il regarde les paumes de ses mains. ) Mes mains sont moites. Deviendront-elles rugueuses ? ( Il enlève son veston, défait sa chemise, contemple sa poitrine dans la glace. ) J’ai la peau flasque. Ah, ce corps trop blanc, et poilu ! Comme je voudrais avoir une peau dure et cette magnifique couleur d’un vert sombre, d’une nudité décente , sans poils, comme la leur ! ( Il écoute les barrissements .) Leurs chants ont du charme, un peu âpre, mais un charme certain ! Si je pouvais faire comme eux. ( Il essaye de les imiter. ) Ahh, ahh, brr ! Non, ça n’est pas ça ! Essayons encore, plus fort ! Ahh, ahh, brr ! Non, non, ce n’est pas ça, que c’est faible, comme cela manque de vigueur ! Je n’arrive pas à barrir. Je hurle seulement. Ahh, ahh, brr ! Les hurlements ne sont pas des barrissements ! Comme j’ai mauvaise conscience, j’aurais dû les suivre à temps. Trop tard maintenant ! Hélas, je suis un monstre, je suis un monstre. Hélas, jamais je ne deviendrai un rhinocéros, jamais, jamais ! Je ne peux plus changer, je voudrais bien, je voudrais tellement, mais je ne peux pas. Je ne peux plus me voir. J’ai trop honte ! ( Il tourne le dos à la glace. ) Comme je suis laid ! Malheur à celui qui veut conserver son originalité !

( Il a un brusque sursaut. ) Eh bien, tant pis ! Je me défendrai contre tout le monde ! Ma carabine, ma carabine ! ( Il se retourne face au mur du fond où sont fixées les têtes des rhinocéros, tout en criant : ) Contre tout le monde, je me défendrai ! Je suis le dernier homme, je le resterai jusqu’au bout ! Je ne capitule pas !

RIDEAU.

Lecture méthodique de ce dénouement

RHINOCÉROS. Pièce en trois actes créée dans sa version française à Paris à l’Odéon-Théâtre de France le 22 janvier 1960. Elle s’appuie sur une expérience personnelle traumatisante (le jeune Roumain avait fui la «nazification» de son pays en 1938), partagée par de nombreux contemporains. Ce sérieux tragique a pour contrepartie le comique grotesque qui repose sur la métamorphose, laquelle, comme toute action chez Ionesco, passe par le dérèglement du langage, symbolisé par le discours d’un «Logicien professionnel». Au premier acte, celui-ci emporte l’adhésion d’un «Vieux Monsieur» à l’aide de sophismes: «Tous les chats sont mortels. Socrate est mortel. Donc Socrate est un chat», usant de prémisses fallacieuses au moment même où il prétend expliquer le principe des syllogismes. La naïveté et l’égocentrisme de son interlocuteur, facteurs de comique («C’est vrai, j’ai un chat qui s’appelle Socrate»), dénoncent la séduction des «intellectuels, idéologues et demi-intellectuels à la page» à qui Ionesco attribuera, dans Notes et Contre-notes, une grande responsabilité dans la montée du nazisme: «Ils étaient des rhinocéros. Ils ont, plus que la foule, une mentalité de foule. Ils ne pensent pas, ils récitent des slogans “intellectuels”.»

La pièce met en scène une petite ville tranquille soudain bouleversée par la métamorphose de ses habitants en rhinocéros. Seul Bérenger, un marginal qui refuse toutes les formes de conformisme, n’est pas atteint. Au dénouement, il s’interroge sur sa situation : ne serait-il pas plus simple de faire comme tout le monde ? Mais il garde ses certitudes : « Un homme qui devient rhinocéros, c’est indiscutablement anormal », et son langage, initialement fantaisiste, s’ancre peu à peu dans un fonctionnement cartésien qui annonce la « résistance » finale à la folie générale. Ainsi accède-t-il au statut de «héros», si peu prévisible dans l’œuvre de l’inventeur des Bobby Watson (voir La Cantatrice chauve).

RESUME. La soudaine apparition d’un rhinocéros provoque la stupeur et occupe quelque temps la conversation des passants : Bérenger, plumitif timide et velléitaire, son ami Jean, avec lequel il se dispute, et un chœur de personnages falots que domine un «logicien»; puis, malgré le passage d’un second animal, tout semble rentrer dans l’ordre (Acte I). Le lendemain, au bureau où travaillent Bérenger et Daisy, une jolie dactylo qui a également assisté à l’incident, employés (Dudard et Botard) et chef de service (M. Papillon) se montrent incrédules. Mais, bientôt, apparaît un nouveau pachyderme que Mme Bœuf reconnaît pour son époux, dont elle était venue excuser l’absence (Acte II, premier tableau). Dans sa chambre, Jean se métamorphose lui-même en rhinocéros sous les yeux de Bérenger (Acte II, deuxième tableau). Traumatisé par ce bouleversement, Bérenger, reclus dans sa propre chambre, découvre l’ampleur de l’épidémie de «rhinocérite»

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