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Les techniques du bonheur

Dissertation : Les techniques du bonheur. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  11 Mai 2021  •  Dissertation  •  2 928 Mots (12 Pages)  •  237 Vues

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→ Y-a-t-il des techniques du bonheur?

Intro : Il existe des conditions objectives et matérielles (santé, confort) qui semblent permettre de penser qu’il existe des solutions techniques, technologiques ou méthodologiques (comportements vertueux) pour s’approcher d’une vie heureuse. Mais l’idée de techniques du bonheur semble également s’opposer à l’idée d’un bonheur entendu comme fin suprême, but ultime de l’existence, fin en soi, qui paraît pourtant définir ce concept pour de nombreux philosophes. En effet, l’idée qu’il puisse exister des techniques du bonheur remet en cause la notion d’une supériorité du bonheur comme tel face aux réalités du monde social et matériel qu’il prétend surplomber et magnifier. Ainsi, si le bonheur correspond bien à un état de la vie qui dépasse ses insatisfactions naturelles, biologiques et sociologiques, comment envisager que des moyens issus de notre condition actuelle, précisément incomplète, puissent nous permettre d’atteindre un quelconque perfection ?

D’autre part, l’idée qu’un moyen technique, technologique ou méthodologique puisse permettre de parvenir au bonheur semble s’opposer tout autant à l’idée que c’est bien du bonheur que nous parlons et pas du confort ou du plaisir, car un bonheur qu’on atteindrait par un moyen certain voir automatisé, semblerait perdre la dimension singulière de cet état d’accomplissement existentiel que nous visons à travers ce mot. Que nous considérions le bonheur comme susceptible d’une définition universelle ou au contraire comme sujet à une détermination exclusivement subjective, dans les deux cas le concept semble entrer ici en conflit avec la notion d’un mode technique d’accès puisque ce dernier désigne d’emblée la certitude voire la possibilité de répéter ad libitum cet état de plénitude. L’accoutumance qui résulterait d’une telle répétition technique préserverait-elle l’intégrité de ce que nous désignons comme l’horizon le plus désirable de l’existence individuelle et collective ?

Quoi qu’il en soit, la relation entre technique et bonheur interroge nous le voyons notre rapport à la certitude de l’accès à ce dernier, et nous ouvre la voie d’une enquête sur ce que le bonheur nous permet de lire de notre rapport à la technique comme mode d’amélioration de la vie.

Nous analyserons dans un premier temps la pertinence de l’idée d’un accès technique au bonheur, à travers les méthodes morales d’accès au bonheur par la vertu, ainsi que par le progrès technologique et scientifique. Puis nous porterons notre enquête sur le caractère essentiellement matériel ou contextuel des solutions techniques au problème de l’accès au bonheur et nous tenterons de cerner les enjeux posés à l’existence humaine quant au caractère apparemment illimité de son désir. Enfin, nous tenterons de saisir en quoi il est possible d’envisager la technique essentiellement comme un produit de notre insatisfaction fondamentale, et comme un frein supplémentaire à une plénitude existentielle que nous sommes constamment en train de repousser et de redéfinir du fait de notre nature biologique et sociale.

I. Il existe des raisons légitimes de penser qu’il existe des techniques permettant de rendre tangible l’idée du bonheur comme accessible à la vie ici bas.

A) Platon, Philèbe : en choisissant ses plaisirs selon le respect de notre intellect, et de notre faculté rationnelle, il est possible de faire l’expérience d’une vie heureuse à condition d’accorder notre corps à notre esprit par une hiérarchisation des activités et des moyens d’accès au plaisir. Les arts, la musique et les sciences nous permettent de nous rapprocher du Souverain Bien, la fin en soi qui désigne le stade le plus élevé de l’existence pour Platon. En effet, les arts comme la musique d’une part permettent de saisir à même les effets sensibles agréables que nous communique notre oüie, l’organisation mathématique harmonieuse du cosmos, et la force des nombres et réalités mathématiques éternelles qui sont à la racine de la beauté de la nature. Le corps et l’intellect ici ne s’opposent pas, et la technique musicale (instrument et jeu) sont même un moyen efficace d’accès à une image du souverain bien à même les sens par le plaisir éprouvé dans l’écoute musicale qui manifeste la perfection des rapports rationnels qui régissent les corps et les objets de l’univers. Les sciences quant à elles, offrent la perception contemplative, intellectuelle de ces rapports et nous offrent une notion spirituelle de la beauté des formes rationnelles (géométrie, logique, nombres) qui définissent les structures cachées de la réalité. Sous la figure des accès techniques et scientifiques à la beauté mathématique de la nature, qui doivent servir de modèle à la régulation du comportement social, Platon semble ne pas opposer technique et bonheur mais au contraire les associer et faire de la première un mode d’accès privilégié à celui-ci. Le savoir et la technique permettent ici de réguler le plaisir et l’orienter vers l’intellect, seul capable de percevoir les formes éternelles des corps à travers le mouvement cyclique de l’apparition et la disparition des phénomènes.

B/ Aristote, dans L’Ethique à Nicomaque, présente quant à lui le bonheur comme ce qui guide secrètement ou consciemment l’ensemble de nos actions. Le bonheur est selon lui ce en vue de quoi toute action, la plus insignifiante soit-elle est réalisée. Ainsi, l’idée qu’une technique spécifique permettrait un accès au bonheur semble ici contredite par cette supériorité radicale du bonheur sur toute action possible. La vie contemplative prescrite par Platon apparaît ici comme réservée aux dieux seuls connaisseurs des vérités certaines qui régissent le monde, et assigne au savoir humain la tâche essentielle d’organiser l’harmonie politique et sociale. Si bien qu’Aristote semble nous indiquer l’idée que le bonheur n’est pas susceptible d’une définition univoque, et que l’horizon fixé par cette idée en nous dépasse nos capacités individuelles et nous invite à tourner nos efforts en direction de la communauté pour y trouver la place qui nous convient le mieux, conformément à notre nature d’animal politique. Ainsi, c’est dans les situations concrètes de justice et d’injustice, de détermination réflexive de ce qui est bon pour soi et pour le plus grand nombre en pareil cas, que des méthodes et des techniques peuvent faire intervenir le savoir humain comme guide d’une vie meilleure en tant qu’une vie humaine accomplie est pour Aristote une vie selon les vertus qui permettent la satisfaction régulée et harmonisée des désirs des membres de la

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