La Tragédie Des Absences

ll est difficile de résumer cette pièce parce qu'il ne s'y passe rien : Louis vient annoncer sa mort prochaine à ses proches et il n'y arrive pas. La pièce est l'histoire d'un non-événement. La beauté de cette pièce ne réside donc pas dans l'action mais plutôt dans les relations, les dits et les non-dits, les sous- entendus ainsi les émotions que dégage la pièce. Après avoir lu la pièce on comprend le terme tragédie des absences. Ce terme nous met sur la voie de la crise familiale et personnelle que traverse Louis.

Nous allons démarrer le sujet en cherchant à comprendre les deux thèmes principaux.

Le premier thème, la crise en elle-même. Le terme a de très nombreuses acceptions, mais tous les sens ont un point commun : la manifestation brusque, intense mais brève, de troubles. La crise peut aussi désigner le nœud d'une intrigue, qui conduit au dénouement. Une crise personnelle désigne une situation de trouble pour un individu, un personnage ou même parfois l'auteur. Ici, le terme semble renvoyer à la situation de Louis, qui va mourir un an environ après s'être rendu dans sa famille La crise familiale suggère l'existence d'une seconde crise, dans les relations entre les membres de la famille.

Le deuxième thème est le premier thème mais plus précis, cʼest-à-dire, la crise personnelle et la crise familiale. La conjonction de coordination « et » peut avoir simplement pour rôle d'associer les deux crises : Louis vit une crise personnelle et sa famille est en crise.

Elle peut aussi avoir un sens plus fort et l'on peut se demander si la crise de Louis n'est pas la cause de la crise familiale. S'il n'était pas près de mourir, sans doute ne retournerait-il pas chez sa mère. De plus, s'il n'avait pas une annonce à faire, peut-être les retrouvailles ne se passeraient-elles pas aussi mal.

Puis nous continuerons notre sujet en plongeant plus profondément dans les crises que traverse Louis et sa famille.

Nous étudierons tout dʼabord la crise chez la famille. Depuis longtemps, au moins depuis l'adolescence des garçons, la famille est en crise. Au temps où Louis appartenait encore à la famille. - Le souvenir de disputes : les disputes entre les membres de la famille ne sont pas nouvelles. Lorsque la mère évoque les dimanches à la campagne elle

raconte qu'ils ont pris fin à cause des disputes des garçons. - La culpabilité d'Antoine : s'ils se disputaient, ils ne s'ignoraient pourtant pas. Antoine, dans la deuxième partie de la pièce, lève le voile sur ses sentiments. Cet homme bourru, volontiers agressif, explique en réalité qu'il s'est toujours beaucoup inquiété pour son frère et vit dans la culpabilité de ne pas avoir su aimer son frère. - Le sentiment de Louis d'être mal aimé : « Que tout le monde après s'être fait une certaine idée de moi, un jour ou l'autre ne m'aime plus, ne m'aima plus / et qu'on ne m'aime plus » (I, 5). Depuis le départ de Louis. La situation s'est aggravée avec le départ de Louis, dont on ne connait la raison. - L'absence entraîne la méconnaissance : Louis ne connaît plus les siens et réciproquement. Ainsi, il rencontre pour la première fois Catherine, la femme d'Antoine, et ne fait pas la connaissance de ses neveux. Il ignore ce qu'Antoine fait comme métier. Suzanne et Antoine ont une certaine vision de Louis, l'intellectuel qui lit forcément le journal le matin à la gare (I, 11). mais en réalité ils ne savent pas quel homme il est devenu. La mère seule semble en avoir conscience (I, 8). - La méconnaissance flirte avec le mépris : les uns et les autres estiment que Louis n'a pas fait l'effort de les connaître parce qu'il ne s'intéresse pas à eux. C'est Catherine qui ose le formuler le plus explicitement (« Il croit, je crois cela, il croit que vous ne voulez rien savoir de lui » (I, 6)).

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