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L'histoire de la tristesse de Flaubert

Fiche de lecture : L'histoire de la tristesse de Flaubert. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Mars 2015  •  Fiche de lecture  •  437 Mots (2 Pages)  •  556 Vues

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Alors commencèrent trois mois d’ennui. Comme il n’avait aucun travail, son désoeuvrement renforçait sa

tristesse.

Il passait des heures à regarder, du haut de son balcon, la rivière qui coulait entre les quais grisâtres,

noircis, de place en place, par la bavure des égouts, avec un ponton de blanchisseuses amarré contre le

bord, où des gamins quelquefois s’amusaient, dans la vase, à faire baigner un caniche. Ses yeux délaissant

à gauche le pont de pierre de Notre-Dame et trois ponts suspendus, se dirigeaient toujours vers

le quai aux Ormes, sur un massif de vieux arbres, pareils aux tilleuls du port de Montereau. La tour

Saint-Jacques, l’hôtel de ville, Saint-Gervais, Saint-Louis, Saint-Paul se levaient en face, parmi les toits

confondus, — et le génie de la colonne de Juillet resplendissait à l’orient comme une large étoile d’or,

tandis qu’à l’autre extrémité le dôme des Tuileries arrondissait, sur le ciel, sa lourde masse bleue. C’était

par-derrière, de ce côté-là, que devait être la maison de Mme Arnoux.

Il rentrait dans sa chambre ; puis, couché sur son divan, s’abandonnait à une méditation désordonnée : plans

d’ouvrage, projets de conduite, élancements vers l’avenir. Enfin, pour se débarrasser de lui-même, il sortait.

Il remontait, au hasard, le quartier latin, si tumultueux d’habitude, mais désert à cette époque, car les étudiants

étaient partis dans leurs familles. Les grands murs des collèges, comme allongés par le silence,

avaient un aspect plus morne encore ; on entendait toutes sortes de bruits paisibles, des battements

d’ailes dans des cages, le ronflement d’un tour, le marteau d’un savetier ; et les marchands d’habits,

au milieu des rues, interrogeaient de l’oeil chaque fenêtre, inutilement. Au fond des cafés solitaires, la

dame du comptoir bâillait entre ses carafons remplis ; les journaux demeuraient en ordre sur la table des

cabinets de lecture ; dans l’atelier des repasseuses, des linges frissonnaient sous les bouffées du vent

tiède. De temps à autre, il s’arrêtait à l’étalage d’un bouquiniste ; un omnibus, qui descendait en frôlant le

trottoir, le faisait se retourner ; et, parvenu devant le Luxembourg, il n’allait pas plus loin.

Quelquefois, l’espoir d’une distraction l’attirait vers les boulevards. Après de sombres ruelles exhalant

des fraîcheurs humides, il arrivait sur de grandes places désertes, éblouissantes de lumière, et où les

monuments dessinaient au bord du pavé des dentelures d’ombre noire. Mais

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