L'Ingénu, Voltaire

         Commentaire composé : l'Ingénu, Voltaire

Voltaire, de son vrai nom François-Marie Arouet, est un philosophe, écrivain, auteur dramatique et intellectuel français du XVIIIe siècle, appartenant au siècle des Lumières, il naît le 21 novembre 1694 à Paris et meurt le 30 mai 1778. Fils de notaire qui deviendra par la suite conseiller du Roi, issu de la haute bourgeoisie parisienne, il est instruit par des jésuites qui lui donnent un enseignement classique et solide. Sa jeunesse est libertine, il prend goût à la littérature et à la poésie. Ses débuts littéraires correspondent au commencement de ses démêlés avec le pouvoir, des écrits satiriques contre Philippe, duc d'Orléans aussi appelé le Régent, lui valent un an d'emprisonnement à la Bastille en 1717. À sa sortie de prison, il prend le pseudonyme de Voltaire pour publier sa première tragédie, Œdipe (1718). En 1723, il est sur le point d'être à nouveau emprisonné après une altercation avec un noble, le chevalier de Rohan. Il s'exile donc trois ans en Angleterre, dont il vante l'esprit de liberté dans les Lettres philosophiques (1734). De retour en France, cet ouvrage est condamné par le Parlement qui y voit une critique contre le gouvernement français, et Voltaire doit encore une fois s'éloigner de Paris pour échapper à la prison. L’ouvrage L'Ingénu écrit en 1767, connaîtra un succès retentissant et marquera l’apothéose du génie littéraire de Voltaire. On peut ainsi s'interroger sur la volonté de Voltaire de choisir comme titre L'Ingénu, pour son conte philosophique.

La problématique précédemment énoncée soulève également une interrogation plus implicite : qu’elle est donc la définition et la fonction d’un conte philosophique. En effet, Voltaire diffuse ses idées philosophiques à travers ses multiples poèmes, essais historiques, pièces de théâtre, son Dictionnaire philosophique ainsi que ses contes philosophiques. Voltaire utilise ces derniers, pour raconter des histoires utilisant les ressorts du conte pour ainsi faire réfléchir sur des concepts philosophiques, tout cela de manière plaisante. Néanmoins ces contes sont des œuvres de la maturité, fruits d’une réflexion déjà longue. Ils ne relèvent donc pas du simple divertissement, et encore moins de la littérature enfantine. L’utilisation du registre satirique comme outil de critique de la société ainsi que son ironie à la fois acerbe, réjouissante et décapante lui permettent de dénoncer l’injustice, la peine de mort, l’obscurantisme ainsi que l’engagement et les malheurs de la guerre. En effet l’intrigue est et s’ouvre sur le merveilleux, par définition, un conte ne se soucie guère de la logique et de la rationalité. Il s’agit d’abord de divertir le lecteur pour mieux capter son attention.

Après avoir défini le conte philosophique, nous pouvons ainsi poursuivre avec la signification du terme “Ingénu”. D'après le dictionnaire Larousse, l’ingénu serait à la fois une personne qui laisse voir librement et naïvement ses sentiments et qui manifeste une grande naïveté. L’ingénu retrace un voyage à la fois géographique et sociologique, l'Ingénu est un étranger sans vraiment en être un. Effectivement, l'état civil de l'Ingénu est complexe, lui se dit Huron : élevé chez les Hurons, il en pratique certes les coutumes et la langue. Mais ce n’est pas pour autant un vrai Huron, il est français, fils d’un capitaine envoyé au Canada pour combattre les Amérindiens. Même si ses mœurs sont rustiques, l’homme qui débarque le 15 juillet 1689 au soir dans la baie de la Rance, n’est pas un ”sauvage” et pour cause, il parle trois langues dont le huron, l’anglais et le français. Mais son surnom, en fait, ne fait de lui ni un benêt ni même un naïf, un ingénu est quelqu’un qui s’exprime avec franchise et sincérité. Aussi ne peut-il que s'étonner des usages galants dont il ignore tout (chapitre VI : L'ingénu court chez sa maîtresse, et devient furieux) ou encore des mœurs de la Cour (chapitres IX : Arrivée de l'Ingénu à Versailles. Sa réception à la cour et X : L'Ingénu enfermé à la Bastille avec un janséniste). La lecture des fables de La Fontaine et des œuvres de Racine et de Corneilles dans le chapitre XII lui permet de se cultiver. Cette initiation a la vie de l’esprit l'épanouit sans qu’il soit obligé pour autant de renier sa nature. Il devient donc un être humain autonome et conscient, ce qui est paradoxal, étant donné que l'Ingénu opère cette métamorphose en prison, lieu d'incarcération du corps et de l’esprit par excellence.

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