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JEAN CLAUDE

Mémoire : JEAN CLAUDE. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  18 Décembre 2014  •  3 768 Mots (16 Pages)  •  754 Vues

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de devoir envisager, sans hypocrisie, la réalité des camps d’extermination avec leurs horreurs non plus enfermées dans la tête d’un homme, mais pratiquées par des milliers de fanatiques. Les charniers complètent les philosophies, si désagréable que cela puisse être » ; écrit Raymond Queneau dans Bâtons, chiffres et lettres (1965), tandis que Simone de Beauvoir se demande : « Faut-il brûler Sade ? ».

Une première définition, parmi d'autres, dans le Premier manifeste du Surréalisme (1924) :

Sade dans Les Mains Libres

Le livre se termine sur une esquisse pour « un portrait imaginaire de D.A.F. de Sade » par Man Ray.

Cette partie sans poèmes comprend deux dessins et deux textes qui servent de "légende". Le premier dessin date de 1936 et montre un portrait imaginaire du marquis de Sade. Son visage est sculpté dans la pierre. En arrière-plan, quelques personnages, et une forteresse, la Bastille, où il fut emprisonné.

Le second dessin, lui aussi de 1936, est similaire, mais le buste est modifié, Sade semblant sourire, alors que la forteresse est en flammes et que les quelques personnages présents dans le dessin précédent sont maintenant très agités.

Les deux courts textes soulignent l'absence totale de portraits de l'auteur, le fait que son œuvre ait été non seulement majoritairement écrite en prison, mais aussi controversée, condamnée, interdite, mais aussi le fait que sa redécouverte a un prix : "la disparition d'un monde où la bêtise et la lâcheté entraînent toutes les misères".

Fasciné par Donatien Alphonse François, marquis de Sade (1740-1814), Man Ray l'était bien avant son arrivée à Paris. Adon Lacroix, déjà, avait initié son mari aux écrits d'Apollinaire sur le divin marquis. Du reste, Man Ray n'avait pas plus tôt emménagé rue Campagne-Première qu'il découvrit que Maurice Heine, son voisin, écrivain et éditeur érudit, venait de publier un article sur Sade dans Der Sturm.

Heine, considéré comme « l'inventeur de Sade », était convenu avec Apollinaire de rechercher et d'éditer les textes inédits de Sade. La mort prématurée du poète mit fin à ce projet commun. En dépit d'une santé défaillante, Heine se consacrera à cette tâche durant les vingt années qui vont suivre. La légende veut que, lorsque Heine eut fait remarquer à Man Ray qu'il n'existait aucun tableau représentant l'infortuné marquis à sa maturité, l'artiste se soit mis en devoir de découvrir tout ce qu'il pouvait sur l'écrivain, allant jusqu'à visiter le château du Vaucluse où celui-ci avait passé son enfance.

Paul Eluard, qui avait longuement parlé de Sade lors de sa conférence de juin 1936 à la Burlington Gallery, n'avait pas manqué de remarquer qu'il n'existait aucun portrait de lui. Sade, ajoutait-il, avait été enfermé presque toute sa vie « pour avoir voulu redonner à l'homme civilisé la force de ses instincts primitifs ».

Les esquisses de Sade dans Les Mains libres suivent de peu la conférence de Paul Eluard. Datant de 1936, elles préfigurent les deux portraits à l'huile que Man Ray exécutera en 1938 et 1940. Sur le premier, au fond, la Bastille est en flammes, des silhouettes se tordent de douleur au premier plan. L'ensemble est dominé par un profil massif édifié avec des blocs de pierre, celui du marquis, l'air impassible. Sur l'autre tableau, l'arrière-plan est plus paisible. La crise est passée.

Sur le Portrait imaginaire de D.A.F. de Sade, un portrait vibrant, terrifiant, le personnage principal donne l'impression de forcer les murs de pierre de la prison que représente son corps. En outre, on peut y lire une inscription extraite de ses écrits par laquelle Sade exprime sa volonté claire et nette de reposer dans une tombe anonyme. L'épigraphe du divin marquis résume en finesse le dilemme auquel Man Ray est confronté dans son art. Sa personnalité lui a servi à attirer l'attention sur son oeuvre, dans l'espoir que finalement celle-ci lui survivrait.

Après avoir proclamé pour l'homme une liberté sexuelle qui scandalisa son époque, Sade connaîtra enfin une grande passion dans sa vie en la personne de sa belle-soeur. Comme Sade, Man Ray caressait plus que tout l'espoir de trouver enfin un dernier amour, paisible, réconfortant. Sade le trouvera auprès de Marie-Constant Quesnet. En 1938, Man Ray n'allait pas tarder à nouer à son tour des liens heureux et durables.

Parce que cet écrivain avait passé « vingt-sept ans de sa vie en prison pour ses idées », Man Ray admirait Sade. D'autant qu'il profita de ce qu'il était derrière les barreaux pour composer l'essentiel de son oeuvre. Man Ray évoquait souvent la passion du marquis pour la « liberté absolue ». « C'était cela... la religion de Man Ray, remarquera plus tard son ami Henry Miller. Un croyant sans église. »

Promu héros du surréalisme, Sade était le rebelle et le révolutionnaire, l'athée, l'apôtre de l'amour. Il était le symbole d'un individualisme forcené, le paria qui disait et faisait ce qu'il pensait, sans s'embarrasser de l'opinion d'autrui. Il pouvait se montrer cruel ou bon dans l'assouvissement de ses désirs, mais ceux-ci venaient infailliblement en premier. Il croyait en la souveraineté du plaisir et se montrait omnivore dans la satisfaction de ses besoins : vous ne saurez rien si vous ne savez pas tout, écrit-il dans Les 120 journées de Sodome, un des ouvrages préférés de Man Ray. Si vous êtes assez timoré pour ne pas forcer la nature, la nature vous fuira à jamais. En fait, l'œuvre de Man Ray à la fin des années trente porte la trace de ses efforts pour apaiser l'angoisse née de cette vérité. Tout en menant une vie agréable avec Ady, une jeune femme effacée aux besoins modestes, Man Ray continue d'exprimer un autre aspect de son tempérament.

Conclusion sur les deux parties :

Nous avons pu voir que le recueil Les Mains Libres était composé de deux parties

de devoir envisager, sans hypocrisie, la réalité des camps d’extermination avec leurs horreurs non

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