Eugénie Grandet, Honoré de Balzac, 1833

Eugénie Grandet, Honoré de Balzac, 1833

J’ai tendance à me concentrer sur des romans contemporains. Pourtant,  je planifiais, depuis quelques semaines déjà,  de lire une œuvre classique afin d’étendre ma culture et de m’ouvrir à de nouveaux horizons.  Il m’a paru donc normal de choisir, pour ce devoir,  un livre de cette catégorie. Je voulais un roman qui respecte les règles.  Ma mère m’a proposé une pléiade de livres qui correspondait à mes critères. Je parcourais des yeux les grands noms d’auteurs, quand je me suis arrêtée sur un titre : Eugénie Grandet. Ce simple patronyme m’a immédiatement attiré, j’avais déjà eu vent de cet ouvrage mais je n’en connaissais pas l’histoire. Je n’avais d’ailleurs jamais lu de Balzac, mais j’avais toujours apprécié les romans dont le protagoniste est une femme. La version familiale du livre n’avait pas de quatrième de couverture. En feuilletant quelques pages du roman, je pris tout de suite conscience de la vie de misère d’Eugénie. Je n’aperçue pas, au premier coup d’œil la romance et les histoires de faillite, mais j’étais persuadée, dans mon for intérieur, qu’il allait s’agir d’une histoire d’émancipation féminine.

Sens du Livre

Balzac a voulu décrire les conditions sociales de son temps, les passions et les ambitions de province.  Il a choisi l’exemple d’une riche famille pour parler de commerce et  de  rivalité.  Il semble qu’il ait  accentué le caractère de quelques personnages, dont surtout celui du père Grandet, afin de peindre les vices et travers de l’humanité. Eugénie en tant que héroïne  joue un rôle très important dans cette représentation historique et sociologique. En effet, elle incarne la femme du dix-neuvième siècle. Elle, certes dans l’excès et la démesure d’un père étouffant,  est toute ses filles qui ne peuvent pas s’émanciper. C’est une fille soumise,  emprisonnée dans son siècle et ses habitudes de vie. Elle passe toute sa vie assujettie à un homme.  Elle est continuellement au service de son père puis elle cherche à satisfaire son cousin, ensuite elle est totalement dépendante du souvenir de Charles. Eugénie est également soumise à la société puisqu’elle doit se marier. Ce roman présente la vie dans cette région et cette époque, les habitations, le commerce et les habitudes alimentaires. « Matinale comme toutes les filles de province, elle se leva de bonne heure, fit sa prière. »

 Ce sont d’ailleurs ces  manies drastiques qui mettent en valeur la vie Parisienne de Charles. Charles est libre, cultivé et raffiné : « un jeune homme habitué aux cajoleries de la plus délicieuse des femmes de Paris, bercé dans les joies de la famille, à qui tout souriait au logis. » Ce parisien apparait donc comme un être supérieur, gentil et humble (il est reconnaissant et ne se moque pas de sa famille) pour Eugénie. Il incarne au début, une sorte de prince charmant gentil et attentionné, il n’est pas comme les autres personnes que connaît Eugénie. Dès le début, leur amour est voué à l’échec puisqu’il doit partir aux Indes, cependant une part de naïveté nous pousse à croire, qu’il reviendra la chercher. Mais Balzac met sa plume au service de  la vérité, il représente réellement la société et les hommes. La vie n’est pas un conte de fée, le parisien n’est pas digne du mari de Cendrillon. En effet Charles ne revient pas pour sa cousine, il se fiche de redorer l’image de son père puisqu’il va égoïstement épouser une noble. Cette conclusion nous montre bien que le mariage, à cette époque, n’a rien à voir avec l’amour,  qu’il est un arrangement voir un devoir. Ce livre nous apprend également qu’à n’importe quelle époque, l’homme est corrompu par ses vices et pulsions. Un gentleman naïf devient un homme intéressé  et un homme peut malheureusement préférer l’argent au bonheur de sa famille.  

Balzac semble avoir écrit son livre en pensant à la postérité. Même si les paysages de Saumur ont énormément changé aujourd’hui, nous pouvons nous imaginer les quartiers du dix-neuvième grâce à une description précise. De plus, Balzac définit des termes spécifiques qui sont inconnus au XXIème  siècle. (Même si il  reste possible de se demander si les objets utilisés au XIXème  par les Grandet n’étaient  pas déjà démodés à leur époque.)

La Comédie Humaine

Nous avons vu que Balzac a donné un but sociologique à Eugénie Grandet.  Ce roman s’inscrit dans un projet appelé la Comédie Humaine et plus particulièrement dans la série « scène de la vie de Province ». Son but était d’écrire « l’histoire naturelle de la société », il voulait explorer les groupes sociaux et les rouages de la société.  Il désirait décrire de façon quasi-scientifique son temps afin d’éclairer les générations futurs sur son époque. Il utilise une méthode expérimentale : il établit les conditions d’action de ses personnages, et avec le lecteur, découvre le comportement de ces personnages en fonction des situations données. Ce cycle littéraire contient 135 œuvres dont  des romans, des essais, des nouvelles, mais aussi de contes philosophiques et fantastiques. Balzac propose une typisation des personnages, il s’approche de la caricature en décrivant l'essentiel des traits de caractère propres à un personnage souvent soumis aux effets d'une passion.  Les personnages de Balzac sont donc des "types" que nous pouvons retrouver dans la société réelle. Sa flopée de personnage  donne une image globale de l'ensemble de la société.    Eugénie Grandet est le premier grand succès public de Balzac, il est applaudi par la foule. Zulma Carraud, auteure et amie de Balzac a écrit : «Eugénie G. m'a beaucoup plu, Si ce n'est pas la femme séduisante, c'est la femme vraie, dévouée comme beaucoup le sont, sans éclat. » Balzac a donc réussi son projet.

Le Rapport au temps et l’espace dans ce roman.

Bien que le récit ne commence pas à la naissance et ne s’arrête pas à la mort du personnage, il relate de l’histoire d’une vie : celle d’Eugénie Grandet. On peut diviser ce roman en trois étapes, la vie d’Eugénie avant Charles, sa vie après Charles, et sa vie avec celui-ci.

Dans la première période, Balzac décrit la vie de la famille, nous la présente. Il mentionne l’anniversaire d’Eugénie mais nous n’avons pas vraiment d’idée de temporalité. Au contraire, lorsque Charles est à Saumur, l’auteur nous donne énormément de données chronologiques. En effet, Eugénie profite de chaque instant  passé avec son cousin, compte les heures où ils sont séparés. Ce choix d’écriture donne l’impression que cette période est la seule où elle vit réellement.

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