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Dossier Sur L'exode 1954-1962: témoignages d’enfants de pieds-noirs

Dissertation : Dossier Sur L'exode 1954-1962: témoignages d’enfants de pieds-noirs. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  2 Juin 2013  •  3 091 Mots (13 Pages)  •  975 Vues

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Exode, 1962 : témoignages d’enfants de pieds-noirs

Entre déplacements, exodes, voire, les exils du XX ème siècle, on trouve ceux de la guerre d’Algérie où les pieds-noires en témoignaient leurs imprégnations, leurs nostalgies et leur paradis perdu, ainsi les violences qui tracassent les fins fonds de leurs mémoires dans une terre d’Algérie dans laquelle s’est déroulée leur enfance. Toutefois, nous situons l’expérience vécu de cette enfance dans l’histoire, comme le souligne le président Charles De Gaulle: « Les français d’Algérie ne sont pas des français. Ils ne raisonnent pas comme nous. Ils ne vivent pas avec nous. », « JOUHAUD, ce n’est pas un français… je veux dire ce n’est pas un français comme vous et moi. C’est un pied-noir. » De même « Qu’est-ce que c’est que ces Fernandez, ces Lopez et autres Segura qui se voudraient français ? » Alors, on vise à dégager les questions suivantes : qui étaient les français d’Algérie ? De quoi était constituée cette population coloniale qu’on appellera bientôt les « pieds noirs» ? Le bien-fondé de cette communauté, manifestement, se trouvant dans les témoignages des enfants de pieds-noirs, leurs outils de manœuvre c’est la littérature et l’histoire. De même, le rôle de la mémoire collective qui, se définit par le refus de se taire qui entraîne la volonté de reconstruire les faits et constitue une prise de conscience de l’auteur(e). Encore nous faut-il noter que le témoignage en littérature, sa contribution au rétablissement de la mémoire collective marque le début d'une lutte, car elle permet "au peuple de s'attribuer un instrument puissant de combat". Cette tension déclenche "l'affirmation de soi". De plus, décrire le lieu de la mémoire entre pieds-noirs, indigents et indigènes spoliés dans les temps de l’Algérie-française, puisqu’ils ont été refoulés de l’histoire de l’humanité, qu’ils soient non considérés comme des « événements ». Signalons d'ailleurs notre corpus qui s’intéresse aux générations de pieds noirs dont la première concerne les familles fondées en Algérie, ainsi la deuxième qui concerne les jeunes adultes avant l’exode de 1962, en rattachant ces témoignages aux« rapatriements » des familles de pieds-noirs.

Anne Lanta Algérie, ma mémoire

Ça y est, le quai recul, et c’est comme si tout à coup le sol se dérobait et comme si un léger vertige se creusait dans l’estomac, les terriens tout à l’heure si proches qu’on leur parlait encore, qu’on les embrassait presque, rapetissent à vue d’œil, on devine maintenant plus qu’on ne les voit leurs gesticulation ultimes, le grand navire prend du souffle, de l’élan, et ses trépidations nous confirment qu’il vogue, happé vers le large, et qu’il a bel et bien largué ses amarres. 5 Accoudés au bastingage, ils sont pleins de sanglots : « Adieu, mon pays, je ne te reverrai plus ! » et de se raconter en pleurant leurs souvenir, la maison de leur enfance et celle de leurs morts qu’ils abandonnent, et si les tombes étaient profanées ? C’est une somptueuse journée de juillet, et la mer est si lisse et la lumière d’une telle beauté que je crois y voir mon rêve : un vrai rêve, pas celui qu’on vit éveillé mais qui illumine une nuit de sa splendeur inattendue, celle d’une 10 grande mer blanche de soleil et qu’enjambent de grands ponts irisés. Mais les ponts se sont évanouis et plus rien ne nous relie au port maintenant disparu. Je les entends pleurer avec une indifférence cruelle : trop tard, vains sont les regrets qui vous tiennent lieu de remords, et nul ne vous rendra ce pays que aviez fait impunément le vôtre ! Je me ressens dénaturée, car après tout, c’est, c’était aussi, le mien. Je quitte sans une larme la terre où je suis née, elle est maintenant 15 fleuri de vert, de blanc et de rouge et c’est bien, les grands ponts de mon rêve enjambent à nouveau la mer entre deux terres de liberté. Celle dont on ne distingue plus qu’une dernière trace bleutée est celle des hommes qui l’on fait surgir de cent trente ans de déni, et l’autre encore lointaine, celle dont on m’a dit à l’école qu’elle avait fait la révolution. Le bateau glisse sur une soie éblouissante, il fait beau comme on n’y croyait plus. C’est ce jour-là que j’ai quitté mon 20 pays d’Algérie.

La guerre était finie et la vie était belle. Une jeunesse bronzée, oisive et nonchalante, animait nos boulevards. Les filles avaient le piquant des espagnols et des robes hardies que la moiteur des soirs collait à leurs seins. On dansa beaucoup cet été-là, sur toutes les places, dans tous les quartiers dont les fêtes se succédaient, et sur les routes de la corniche s’égrenaient de joyeux chapelets de vélos. Les plages étaient à nous, avec leur volupté dorée et leur incomparable 25 lumière. Les pins de la colline étaient à nous, crissant de cigales, fleurant une haleine fauve et terre roussie. Les routes étaient à nous, entre les immenses champs de ceps et leur vigueur rectiligne à perte de vue. C’était notre pays. Nous y vivons dans l’insouciance et la facilité, ce qui, dans toutes les langues du monde, s’appelle le bonheur. Ma première maison se trouvait au bout du village, une des dernières avant les vergers d’orangers. 30

Anne Lanta Éd. BOUCHENE, 2005. (p.13-17)

Dans Algérie, ma mémoire, le pays est souvent le lieu de mémoire d’une enfance enfouie dans un paradis perdu avec autant de douceur et d’insouciance. Aussi présentée comme lieu de coïncidences avec le sentiment de « Melting pot » : rencontres de personnages appartenant à des intrigues différentes, êtres entrevus qu’on aurait pu aimer, comme pour indiquer que la vie dans ce pays est fine. Ainsi, dans ce passage, situé au début du chapitre I. On assiste à une scène d’exil de façon métonymique, l’exil d’une famille qui considérait « l’Algérie leur pays et la France leur patrie » avec autant d’humanisme, recourant toujours à la justice. De ce fait, l’auteur par sa lucidité voit les droits de l’homme bafoués dans le monde. L’hétérogénéité apparente du texte cache donc une pluralité de lectures et de significations possibles. Or cette pluralité de lecture possible renvoie à l’ambiguïté de la notion de destin : en effet, c’est à la fois le destin

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