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Contre La bêtise, Les Dieux même Luttent En Vain

Commentaire d'oeuvre : Contre La bêtise, Les Dieux même Luttent En Vain. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  9 Novembre 2014  •  Commentaire d'oeuvre  •  2 637 Mots (11 Pages)  •  587 Vues

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Dans sa correspondance, Flaubert évoquait son désir de rédiger une « encyclopédie de la bêtise humaine ». Vaste entreprise, que l’on retrouve dans Bouvard et Pécuchet . Si démesurée que le pauvre Bouvard n’y résista pas : il mourut en 1880, laissant l’ouvrage inachevé.

Qu’entend-on par « bêtise » ? Les multiples acceptions du mot nous amènent aujourd’hui à nous interroger sur ses origines, son existence, épisodique ou permanente, et ses manifestations. Or quiconque prétendrait s’intéresser à al bêtise, sous peine d’être taxé de prétention, ne peut prétendre s’en abstraire. !

« Contre la bêtise, les Dieux même luttent en vain ». Cette formule, émanant des tréfonds de l’antiquité grecque, mérite d’être éclairée ? Ce sera l’objet d’une première partie. Puis nous tenterons de préciser les différentes significations du terme et les domaines auxquels il se rapporte. Enfin, nous verrons si l’esprit est réellement impuissant face à la bêtise.

Le paradoxe de l’expression est remarquable : il y aurait impuissance des Dieux face à la bêtise. Quel est le propre de la bêtise, et à quelle catégorie terrestre cette caractéristique s’applique-t-elle ? Elle ne concerne pas les êtres inanimés. Sauf métaphore,, il est rare que l’on soit vraiment « bête comme ses pieds » . Pour être taxé de bêtise, il faut forcément être homme, donc intelligent. Or l’animal n’est ni intelligent ni bête, même si l’on parle de celui qui est « bête comme un âne ». Ce serait prêter aux animaux une conscience qu’ils n’ont pas. La bêtise est donc un trait proprement humain ou concernant les expressions abstraites de l’humain, telles que les idées ou les sentiments. Donnons, avant de poursuivre, quelques définitions : l’intelligence ou l’entendement est la faculté de comprendre et d’innover. La raison, modalité de la pensée intelligente, est la faculté de combiner des jugements.

On considère habituellement la bêtise comme une défaillance, un défaut de l’intelligence. Or « bêtise » n’est pas l’antonyme exact d’intelligence : nous ne sommes pas l’un ou l’autre, les deux peuvent coexister. Ainsi bêtise ne signifie pas forcément absence d’intelligence. L’être taxé de bêtise n’est pas totalement hermétique à la raison. Il s’agit d’un individu qui dispose d’une intelligence mais qui manifeste son incapacité à en faire usage.

Pourquoi les « Dieux mêmes » ? En quoi sont-ils différents de nous ? Pour nous, humains, il n’est pas évident que la bêtise est un obstacle à notre élévation. Nous considérons notre différence par rapport à la divinité comme un manque de perfection (en creux) plus que comme un véritable défaut ( un trait négatif). Pourtant on se rend compte qu’il s’agit véritablement d’un obstacle auquel notre être se heurte : nous ne sommes pas simplement incomplets. La bêtise se poserait entre nous et les Dieux comme une barrière infranchissable, une véritable nuisance ou une infirmité.

Il faut également distinguer LA bêtise et LES bêtises. Celles-ci concernent des faits précis. L’exemple le plus évident est l’enfantillage, le propre de l’enfant. Mais nous nous intéresserons ici à LA bêtise.

Quel est donc ce phénomène ? On a vu qu’il existe un rapport entre la bêtise et la raison. Est rationnel ce qui est compris et se comprend. La manifestation de la bêtise n’est pas une incapacité au sens strict, son déclenchement est imprévisible, puisqu’il y a tout de même intelligence. Seul l’animal est prévisible. Tandis qu’on ne sait pas exactement ce que la « bête » va faire, ni à quel point telle personne est « bête ».. les conséquences de la bêtise sont également imprévisibles. Il y aurait donc contingence de la bêtise (c’est-à-dire qui peut être ou ne pas être). Nous sommes tous des bêtes en puissance. La bêtise peut frapper n’importe qui, en n’importe quelle circonstances. Impossible de prévoir ce phénomène à l’avance. Et cette contingence empêche les Dieux d’agir. Ils ne peuvent rien, car il y a , dans la situation de « bêtise », imperméabilité à la raison. On ne peut pas guérir le sujet atteint par la bêtise, caril faudrait pour cela qu’il raisonnât. Or on ne peut raisonner à la place de quelqu’un ni agir pour lui. On peut essayer de le convaincre, c’est tout.

Cette formule (« Les Dieux luttent en vain ») est à considérer au premier degré comme en un sens métaphorique. En effet : les Dieux peuvent-ils quoique ce soit ? Peuvent-ils interférer dans les affaires humaines ? Mais là n’est pas la question. En revanche, il y a bien l’idée d’une fatalité (fatum) et d’un état qui nous dépasse et contre lequel on ne peut –semble-t-il –rien faire. Le terme « vain » souligne cette impression d’impuissance devant une machine infernale.

Pour les Grecs, les Dieux incarnaient l’intelligence, la perfection. Or ces êtres supérieurement intelligents se heurtent à la bêtise, qui résiste à leur pouvoir. Pour Platon ou Aristote, l’être divin incarne l’accomplissement philosophique. La bêtise s’oppose donc au pouvoir de la réflexion. Que faire, puisqu’il y a contingence ? Prenons un exmple. On essaye d’expliquer à quelqu’un par des moyens rationnels pourquoi il s’apprête à faire une « bêtise ». Ainsi X parle à Y qui acquiesce (il y a lutte verbale). Pourtant Y fait le contraire de ce à quoi il acquiescait. Il n’agit donc pas rationnellement. On voit bien que le sujet est bête, mais il y a impuissance de la raison (X) à saisir pourquoi il (Y) ne comprend pas. La raison peut croire être efficiente sur quelque chose qui lui résiste, finalement. Que fait la raison dans ce cas ? Elle constate son échec. Il en va de même quand les Dieux luttent, il y a combat de la raison contre la bêtise, combat absurde puisque vain, mais néanmoins réel et nécessaire, ce qui est paradoxal.

Alors que nous croyons élucider la question de la bêtise à travers l’étude de cette citation, de nouveaux problèmes se présentent. On a vu dans une première partie que la bêtise na signifiait pas la perte d’intelligence : le vieillard, dans le cas du gâtisme et de la sénilité, même infantilisé, n’est pas « bête » à proprement parler. La bêtise n’est pas une moindre intelligence. Serait-elle plutôt un dysfonctionnement de la raison, laquelle est présupposée en tout homme.

(seconde partie)

La bêtise est-elle une tare ? Ou bien un ennemi invisible ? Puisque la philosophie tient en éveil, la bêtise est-elle une forme de jachère intellectuelle ? L’homme bête a-t-il la cervelle « qui grince » à chaque effort selon l’expression de Nietzsche ? La

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