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Commentaire Littéraire sur l'acte I, scène 2 de la pièce de théâtre Dom Juan De Molière

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Par   •  4 Décembre 2013  •  2 455 Mots (10 Pages)  •  1 413 Vues

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commentaire littéraire

Dom Juan de Molière Acte I, scène 2

A la fin de l’année 1664, Molière dont le Tartuffe vient d’être censuré décide d’écrire Dom Juan. Il reprend un mythe qui parcourt toute l’Europe, un mythe bien connu du public du XVIIème siècle. En cette période classique, règne de « l’honnête homme », le personnage espagnol excessif intéresse le moraliste qu’est Molière mais, non sans ambiguïté, le dramaturge en fait également un porte-parole des esprits forts de son temps, du libertinage d’esprit, de bien des critiques qu’il dirige contre l’Eglise et contre la toute puissante Compagnie du Saint Sacrement.

La tirade qui est portée à notre attention, extraite de l’Acte I, scène 2, révèle pour la première fois au spectateur le héros éponyme préalablement évoqué en termes peu élogieux par Sganarelle. Dans cette scène d’exposition, le « grand seigneur méchant homme » répond par un éloge de l’inconstance aux remontrances de son valet qui lui reproche sa conduite dissolue. On assiste dans cette scène à une démonstration de la puissance verbale de Don Juan ce qui nous amène à nous demander comment Don Juan essaye de convaincre Sganarelle et ce que cet art rhétorique révèle du personnage..

Nous répondrons à cette question à la faveur de trois axes. Nous verrons tout d’abord comment se fait l’éloge de l’inconstance ; puis nous montrerons que ce texte est également un plaidoyer visant à disculper le séducteur ; enfin nous nous pencherons sur le portrait que le héros brosse de lui-même.

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Cette tirade permet à Don Juan de répondre à Sganarelle et d’exposer une vision de l’amour qui fait du personnage un mythe au point de donner une expression par antonomase. Don Juan déclame un éloge de l’inconstance en réponse aux remontrances de son valet. Les procédés argumentatifs se multiplient dans le texte pour faire un éloge paradoxal. En effet Don Juan porte aux nues une attitude généralement réprouvée, décriée : celle de l’infidélité.

Ainsi on remarque que le personnage cherche à s’imposer sans demi-mesure face à Sganarelle. Cette tirade est avant tout une réponse.

Les phrases interrogatives, exclamatives et négatives du début montrent que Don Juan remet en question les propos de Sganarelle, il réagit de façon agressive et vive. Il commence par un « Quoi ! » expressif, qui suggère que l’idée est impensable et inadmissible. Ce seul mot donne le thème de la tirade. Don Juan est dans le refus absolu de ce que lui dit son interlocuteur. Puis la question qui suit est une pure question rhétorique (l.40.42 ) : « Tu veux qu’on se lie (…) ? »Le héros n’attend évidemment pas de réponse et la forme interrogative est une façon de dénoncer des propos scandaleux. D’ailleurs la phrase construite avec une série d’accumulations semble présenter une liste de reproche ( « qu’on se lie » ; « qu’on renonce » ; « qu’on n’ait plus ») (l..43) Elle montre la lourdeur, le poids de ce que serait un tel comportement pour Don Juan. Le libertin continue de mettre à distance les propos de Sganarelle en utilisant ensuite l’ironie à travers l’expression « la belle chose » (l.42). Cette phrase signifie le contraire de ce qu’elle dit, il s’agit donc d’une antiphrase qui vise à critiquer ce que dit Sganarelle. Enfin la répétition du « Non, non » (l.46) achève de mettre en valeur l’opposition du maître aux idées de son valet. Ainsi tout le début de cette tirade montre que Don Juan s’oppose en s’attaquant à ce que dit Sganarelle.

On peut d’autre part constater qu’il y a une dépréciation systématique de la constance dans les propos du séducteur.

Le choix du vocabulaire révèle bien combien cette valeur est décriée. Elle est associée, chaque fois qu’elle est évoquée, à une idée de mort. On trouve tout d’abord deux expressions qui relèvent d’un champ lexical de la mort dans « ensevelir dans une passion » (l.44) avec l’image très nette d’une inhumation puis très explicitement le mot « mort » (l.44). A la fin du texte c’est le verbe s’endormir ( l. 70) qui véhicule la même idée. Ainsi Don Juan associe-t-il la constance à une perte de vitalité. Par opposition, et tout à fait logiquement, il valorise l’inconstance en lui associant l’idée d’un réveil « réveiller nos désirs » ( l.72). Ces jeux d’oppositions lexicales déterminent une échelle de valeurs où une des vertus suprêmes de la société, la fidélité, est dénigrée pour laisser place à un éloge de la liberté en amour.

Enfin le jeu des pronoms personnels révèle également les enjeux argumentatifs de cette tirade. Don Juan cherche à convaincre Sganarelle et pour cela il adopte une posture énonciative complexe : tantôt il s’affirme et revendique bien haut sa position, tantôt il s’abrite derrière des opinions qu’il présente comme déjà convenues et établies. L’emploi des pronoms dans la tirade est révélateur de ce jeu de cache-cache de Don Juan, utilisant toutes les formes d’énonciation pour mieux convaincre l’interlocuteur, pour le cerner.

Ainsi on trouve la première personne « Pour moi » (l.50) fortement accentuée en début de phrase ou encore le « je » dans « je ne puis refuser mon coeur » (l.56) habilement mélangée avec un « on » (l.40) ou un « nous », (l.47). Ces formes de l’énonciation généralisent le discours, évitent au locuteur le statut intenable, quand il s’agit de convaincre, de marginal. Pour obtenir gain de cause il faut rallier les foules et Don Juan le sait bien. Quoique défenseur d’une thèse paradoxale il arbore une posture générale. De même la tirade prend parfois le ton de la maxime chère aux moralistes du siècle de Molière. Le style gnomique est bien repérable dans l’emploi du présent de vérité générale et dans la brièveté de la formule : « la constance n’est bonne que pour les ridicules » (l.46) Quelle force rhétorique que celle de Don Juan qui n’hésite pas à prendre aux honnêtes hommes du siècle et dont il est l’opposé la façon de parler sentencieuse. L’immoral sinon l’immoraliste ici prend les armes du moraliste pour prêcher sa parole de suborneur.

Ainsi nous avons pu voir dans cette première partie que Don Juan prenait la défense de l’inconstance et critiquait la position plus orthodoxe de Sganarelle, défenseur des valeurs prônées par la société.

Cependant Don Juan ne fait pas simplement un éloge de l’inconstance il affirme aussi son

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