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Art poétique, Boileau

Commentaire de texte : Art poétique, Boileau. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  21 Mars 2017  •  Commentaire de texte  •  1 817 Mots (8 Pages)  •  1 424 Vues

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Lecture analytique n°3 Art poétique, Boileau.

I. Une défense du travail de la langue

        A. L'écriture au cœur des préoccupations

  • –  L'écriture est au cœur du discours de Boileau, en témoigne le champ lexical de la langue : « vos écrits » (v.1), « la langue » (v.1, 7), « son » (v.3), « terme » (v.4), « tour » (v.4), « vers » (v.6), « l'auteur » (v.7, 35), « écrivain » (v.8), « ouvrage » (v.18, 21),
    « traits d'esprit » (v.22), « le début, la fn » (v.24), « parties » (v.26), « sujet », « le discours » (v.27), « mot » (v.28), « vos vers » (v.29), « vos écrits » (v.33).
  • –  L'extrait suit un plan précis. Chaque aspect de l'écriture est envisagé, ce qui place ce texte en position de manifeste qui s'attache à étudier les mécanismes de la langue et ses effets : v1 à 8 : sur le choix des mots comme clé de voûte de l'écriture/ v9 à 20 : sur la nécessité de la rigueur et sur la patience du travail de l'écriture/v 21 à 28 : sur la construction du discours/v 29 à la fn : sur la réception critique du travail de l'écriture.
  • –  Certains termes utilisés témoignent de la manière dont Boileau prend la langue à cœur : « surtout » (v1) qui révèle l'urgence du conseil formulé, et la nécessaire application par exemple.
  • –  Cet intérêt pour la langue contamine le lexique : emploi de termes mélioratifs qui relèvent du sacré. L'écriture serait alors une sorte de profession de foi pour l'auteur : « langue révérée » (1), « sacrée » (2), « le plus divin » (7). La langue est au centre des préoccupations et des goûts esthétiques de Boileau : « son mélodieux » (3), « art délicat » (25). Les adjectifs choisis témoignent de cet intérêt porté à la langue.

B. Une mise en abime de ce travail

  • –  Afn de justifer son art poétique, Boileau applique ses propres conseils. Son texte est ainsi écrit en vers et le choix de l'alexandrin confère à l'ensemble une dimension exigeante.
  • –  L'auteur applique à son texte les conseils qu'il prodigue à son jeune lecteur. Ainsi, par exemple, le vers 24 sur la structure d'un ouvrage illustrent par la césure à l'hémistiche le découpage structurel d'un texte.
  • –  De nombreuses fgures de rhétorique témoignent de cette recherche d'un style abouti : métaphore bucolique (v 13 à 16), anaphores (23 à 27), question oratoire (29) permettent ainsi de renforcer l'exposition de sa thèse et de donner plus d'ampleur imagée et argumentative à son propos.
  • –  Le choix des mots à la rime est aussi signifcatif d'une recherche de la perfection stylistique : cf les diérèses comme « mélodieux » (3) et « vicieux » (4) qui soulignent la nécessaire correction que l'écrivain doit porter à son texte.
  • –  Enfn, des aphorismes (« Sans la langue en un mot l'auteur le plus divin est toujours quoi qu'il fasse un méchant écrivain » (7/8), « Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage » (18), parsèment son texte pour appuyer son propos et Boileau illustre donc en même temps qu'il enseigne les ressources lexicales et rhétoriques de cette langue française qu'il défend.

II. Eloge de l'esthétique classique

        A. Patience

  • –  Boileau fustige un travail de la langue bâclé. Il critique la précipitation qu'il place en miroir avec l'idée d'un travail ludique. Mieux vaut travailler par plaisir que par contrainte : « Et ne vous piquez point d'une folle vitesse, Un style si rapide, et qui court en rimant, Marque moins trop d'esprit que peu de jugement » (v.9 à 11). L'emploi de la personnifcation de la phrase permet à Boileau de rendre son idée plus vive et concrète dans l'esprit du lecteur.
  • –  L'emploi de l'impératif associé à des formes de phrases négatives permet également de rendre son propos plus général, afn que celui-ci s'applique à la communauté des lecteurs et de ceux qui entreprennent d'écrire : « Et ne vous piquez point » (v.10). Ces conseils formulés sont aussi apparents dans les conjonctives « que le début, la fn... » (24 et suivants).
  • –  L'esthétique classique requiert de la rigueur, le sens de l'effort dans le travail de la langue, donc de la lenteur, également. De nombreux compléments circonstanciels de manière témoignent de ce travail patient sur la langue : « lentement » (v.14), l'oxymore « hâtez-vous lentement » (v.17), « vingt fois sur le métier » (v.18), « sans cesse » (v.19), « quelquefois » (v.20), « souvent » (v.20). Boileau s'inscrit ici dans la lignée des auteurs classiques à l'instar de La Fontaine dans sa fable « Le Lièvre et la Tortue ».
  • –  Cet effort est remarquable à travers l'emploi du préfxe « re » qui souligne la répétition, la reprise, le brouillon : « remettez » (v.18) et « repolissez » (v.19).
  • –  Le chiasme « Ajoutez quelquefois et souvent effacez » (v.20) souligne, pour terminer l'ensemble métrique, la nécessité de la patience et du travail stylistique dans le processus d'écriture.

B. Modération et simplicité

  • –  Critique des défauts en usage que Boileau conseille d'éviter. Emploi de termes péjoratifs pour décrire les styles ampoulés et confus : « impropre », « vicieux » (v.4), « pompeux barbarisme » (v.5), « un vers ampoulé », « orgueilleux solécisme » (v.6), « terrain fangeux » (v.16). Là encore, la personnifcation du vers poétique ou de la syntaxe renforce l'argumentation de Boileau. Les termes utilisés par Boileau témoignent de ce rejet pour la complexité inutile : les suffxes en -isme peuvent être désagréables à l'audition et abondent donc dans le sens de Boileau.
  • –  Dénonciation des auteurs précieux (cf courant de la Préciosité) qui alourdissent leur style par des tournures de phrases et un lexique alambiqués. Le classicisme est l'excellence, mais celle-ci passe par la simplicité, l'authenticité.
  • –  Cette nécessité de la simplicité est marquée par des comparaisons que Boileau fle tout au long du texte : « Marque moins que peu » (12), « j'aime mieux (...) qu'un torrent débordé » (13/15).
  • –  Cette simplicité doit apparaître dans la structure claire que l'écrivain choisit de donner à son texte : ainsi Boileau illustre cela dans la 3e strophe : l'idée d'une dissémination de la pensée et donc des mots est récusée par l'auteur. IL emploie pour ce faire un lexique signifcatif : « fourmillent », « pétillent » (21/22). Ces termes évoquent donc l'absence de clarté et le brouillage sémantique.
  • –  La comparaison avec la construction d'un monument renforce son idée.

III.Nécessité de la critique

        A. Le rejet de la fagornerie

  • –  Selon Boileau, il faut donc bannir les fatteurs car ils ne peuvent porter un jugement objectif qui réponde à cette esthétique classique : le perfectionnement.
  • –  En ouvrant sa dernière strophe par une question rhétorique, il enjoint donc son destinataire de ne pas céder à cette tentation narcissique « Craignez-vous pour vos vers la censure publique ? » (29)
  • –  Par une formule qui s'apparente à un précepte (emploi du présent de vérité générale), il dénonce les auteurs qui acceptent les compromissions par narcissisme : « L'ignorance toujours est prête à s'admirer » (30).
  • –  Il s'agit donc de rechercher la critique, justement parce qu'elle ne peut être que constructive dans cette recherche de perfection stylistique.
  • –  La tournure négative fnale « et non pas qu'on vous loue » (38) témoigne de cette mise à distance des fagorneurs.
  • –  Le lexique de la fatterie est omniprésent dans ce passage : « s'admirer » (31),
    « arrogance » (35), « fatteur » (36), « applaudir » (37), « loue » (38). Il souligne la diffculté à dépasser pour parvenir à obtenir un avis critique sincère de ses lecteurs.
  • –  Boileau distingue l'ami du fatteur. Le véritable ami est celui qui ne craint pas de déstabiliser son destinataire. Boileau enjoint son lecteur de faire preuve d'esprit critique par l'impératif « Mais sachez de l'ami discerner le fatteur » (36).

B. La recherche de l'authenticité

  • –  Refus des fausses critiques « vous raille et vous joue » (37), mise à distance des hypocrites.
  • –  La crainte du jugement ne doit pas être un obstacle. Il s'agit pour Boileau de recherche justement cette critique qui ne peut qu'être positive. On retrouve pour ce faire un champ lexical de la critique : « censure » (29), « critique »
  • –  Recherche de l'authenticité, de la vérité et donc de la sévérité du jugement. Le portrait du critique objectif idéal est brossé en quelques traits : « sévère » (30),« prompts » (32), « censurer » (32), « confdents sincères » (33), « zélés adversaires » (34) « ami » (36), « conseille
  • –  Cette recherche de l'authenticité est traduite par une sorte de mise à nu de l'écrivain qui s'offre en proie à ses détracteurs : « Dépouillez devant eux l'arrogance d'auteur » (35).
  • –  La structure du vers 37 témoigne de cette illusion que l'on peut avoir sur son propre travail : « Tel vous semble applaudir, qui vous raille et vous joue » (37). Ici, le vers est tronqué sémantiquement (en terme de sens) à la césure, en deux temps : un premier qui marque la facticité des louanges par le verbe « semble » et un second temps qui révèle la supercherie de cette fausse critique dans la subordonnée relative « qui vous raille et vous joue » (= qui se moque de vous).
  • –  Enfn, l'écrivain doit se prêter au jeu du regard réfexif sur sa propre écriture. Par un procédé de répétition et d'assonance en « v », Boileau souligne le nécessaire regard que l'on doit porter au miroir au de sa propre conscience : « Soyez-vous à vous- même un sévère critique » (30).

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