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Analyse Du Paradoxe Sur Le Comédien

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Par   •  25 Avril 2014  •  4 126 Mots (17 Pages)  •  4 267 Vues

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Paradoxe sur le comédien est un essai sur le théâtre rédigé sous forme de dialogue par Denis Diderot entre 1773 et 1777 et publié à titre posthume en 1830. Selon Diderot, qui s'oppose en cela à l'opinion générale de ses contemporains, l'acteur convaincant est celui qui est capable d'exprimer une émotion qu'il ne ressent pas. C'est le paradoxe : moins on sent, plus on fait sentir.

Diderot expose deux sortes de jeux d'acteurs :

Jouer d'âme qui consiste à ressentir les émotions que l'on joue

Jouer d'intelligence qui repose sur le paraître et consiste à jouer sans ressentir.

Ce paradoxe est le contraste entre l’expression du corps et l’absence d’émotion ressentie de la part de l’acteur, il joue sans éprouver. Il rit sans être gai, pleure sans être triste. L'acteur se sert de son corps comme d’un instrument. Le paradoxe du comédien met donc en évidence l’écart qui peut exister entre le corps et le psychisme

Le paradoxe du Paradoxe sur le comédien repose sur cette contradiction entre affirmation et dépossession : décence d’un côté, et nombre du vers, dépossèdent le comédien de lui-même, l’inscrivent dans la machine répétitive, normative de l’écriture théâtrale; entrailles déchirées de l’autre, et cris inarticulés, affirment hors discours, hors logique, une présence du corps et du cri, et excluent toute forme d’inscription, de normalisation, de répétition.

Comment la séance théâtrale peut-elle produire cet effet (cette affirmation, cette restauration d’une présence singulière), alors que la normalisation du jeu théâtral, que la répétition des séances trahissent l’artefact d’une parole absente, mécanisée, en un mot dépossédée ?

Puisqu’il ne s’agit pas de raisonnement, de langage, de logique, mais d’entrailles et d’émotion, de sensibilité en un mot, l’opinion commune veut que le comédien produise puis communique l’effet théâtral en utilisant sa propre sensibilité : les émotions de l’acteur fabriquent les émotions du spectacle, une même sensibilité, de même nature, se transmet depuis les entrailles du comédien jusqu’à la scène, depuis la scène jusqu’aux entrailles du spectateur. La doxa définit donc une origine et un processus de la représentation.

Contre cette opinion commune, le premier interlocuteur du dialogue, dit « l’homme au paradoxe », défend la thèse opposée, qui constitue le paradoxe sur le comédien : c’est en recourant au sens froid que le comédien produit l’effet théâtral. Cet effet est donc le résultat non seulement d’une préparation technique de l’acteur (il s’entraîne, il répète son rôle), mais également d’une création intellectuelle : il est amené à construire pour son rôle un « modèle idéal », c’est-à-dire une image virtuelle du personnage, qu’il conserve en tête, convoque et perfectionne à volonté. Il copiera ensuite le plus fidèlement possible ce modèle lors du spectacle. Pour l’homme au paradoxe, le grand comédien est un intellectuel, est un créateur non pas tant au moment du spectacle, qu’avant lui, lors de sa préparation. La performance théâtrale est ensuite essentiellement affaire de technique et de répétition.

Le débat sur le jeu du comédien se déploie donc, discursivement, comme dialectique du sens. Mais ce serait une erreur que de réduire le dialogue diderotien à un pur exercice de la pensée, si subtile soit-elle. Le paradoxe sur le comédien, et la dialectique qu’il met en œuvre, ne constituent en quelque sorte que la superstructure du Paradoxe, dont l’aporie logique13 ne peut se déployer qu’à partir d’une « clôture de la représentation » : cette clôture n’est pas seulement la clôture logique de l’aporie ; elle est aussi l’enceinte matérielle de la « scène », de ce « théâtre » qui est pensé comme un espace spécial, extraordinaire, où les choses ne se passent pas comme dans l’espace « réel », la « société ». Entre théâtre et société se joue l’infrastructure de la différence qui fonde la représentation, différence dont l’horizon d’abolition est la « nature » et sa simplicité.

Présenté sous forme de dialogue argumentatif, cet ouvrage ne fut publié

qu'en 1830. Contre l'idée qu'un acteur devrait, pour toucher le public,

ressentir les émotions et les sentiments qu'il interprète, Diderot développe

la thèse “paradoxale” du dédoublement du comédien : celui-ci n'émeut le

spectateur qu'en restant insensible aux passions qu'il feint d'éprouver sur

scène.

Ce tremblement de la voix, ces mots suspendus, ces sons étouffés ou traînés, ce

frémissement des membres, ce vacillement des genoux, ces évanouissements, ces

fureurs, pure imitation, leçon recordée

d'avance, grimace pathétique, singerie

sublime dont l'acteur garde le souvenir longtemps après l'avoir étudiée, dont il avait

la conscience présente au moment où il l'exécutait, qui lui laisse, heureusement pour

le poète, pour le spectateur et pour lui, toute la liberté de son esprit, et qui ne lui

ôte, ainsi que les autres exercices, que la force du corps. Le socque ou le cothurne

déposé, sa voix est éteinte, il éprouve une extrême fatigue, il va changer de linge ou

se coucher ; mais il ne lui reste ni trouble, ni douleur, ni mélancolie, ni affaissement

d'âme. C'est vous qui remportez toutes ces impressions. L'acteur est las et vous tristes

c'est qu'il s'est démené sans rien sentir, et que vous avez senti sans vous démener. S'il

en était autrement, la condition du comédien serait la plus malheureuse des

conditions; mais il n'est pas le personnage, il le joue, et le joue si bien que vous le

prenez pour tel : l'illusion n'est que pour vous ; il sait bien, lui, qu'il ne l'est pas.

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