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Adieu Balzac Felman Critique

Dissertation : Adieu Balzac Felman Critique. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  17 Avril 2016  •  Dissertation  •  1 581 Mots (7 Pages)  •  1 545 Vues

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                            DISSERTATION  CRITIQUE FELMAN ADIEU

     

Dans la littérature du XIXème siècle, la condition des femmes est un thème récurrent de cette époque. De Nana de Zola vivant dans le luxe et la luxure grâce à ses charmes à une Emma Bovary de Flaubert, représentante de l’insatisfaction et de l’ennui conjugal, les femmes sont une source d’inspiration pour ses auteurs soucieux de traduire la condition féminine telle qu’elle apparaît réellement dans une société masculine. C’est ainsi qu’un siècle plus tard, Shoshanna Felman, critique littéraire américaine, nous offre cette critique à propos de la nouvelle Adieu de Balzac: « Les femmes semblent être liées à la fois au silence et à la folie, alors que les hommes, partageant l’apanage du discours… autrui ».  Dans cette citation, Felman distingue les femmes et les hommes par la qualité et la quantité de leur discours, les femmes réduites au silence et à la folie, soumises à cette société masculine où les hommes disposent du discours et de la raison. Malgré ce que l’on sait des femmes et de la soi-disant supériorité des hommes du XIXème siècle, peut-on réellement réduire le roman de Balzac à cette affirmation ? L’auteur se contente-il de refléter cet aspect visible de la société de l’époque ? Nous verrons tout d’abord que la femme de cette époque est belle et bien aliénée par l’homme, cependant que les hommes eux aussi subissent une forme d’aliénation et enfin que la cause de cette folie commune est l’Histoire.

        Lors de la lecture de cette nouvelle, l’inégalité des dialogues est frappante entre les deux genres. Les deux seules femmes de cette histoire n’ont qu’un vocabulaire très restreint. Monsieur d’Albon abaisse Geneviève à moins qu’un animal : «la vache est la créature la plus intelligente que nous ayons vue».  Elle est déshumanisée, rendue inférieure et inoffensive. Le discours du magistrat est discriminant mais il ne ressent aucune gêne à le dire, il ne considère pas cette femme comme égale à lui. C’est justement cet irrespect que les femmes connaissent qui les plongea dans le mutisme. Geneviève eut le sentiment d’être aimé par un homme qui n’avait que faire d’elle et la quitta pour une femme avec une dot plus importante, quant à Stéphanie elle fut violée, violentée et rejetée après s’être échappée de la Bérésina. Ainsi, les hommes et leurs abus de pouvoir sont la cause des traumatismes de ces jeunes femmes.

      Cet abus de pouvoir, en plus qu’il soit physique, se fait oralement et psychologiquement. En effet, par opposition au silence féminin, l’oralité masculine est omniprésente tout au long de l’œuvre. Ce sont eux les protagonistes de dialogues rationnels, des narrations comme la bataille de la Bérésina racontée par l’oncle de Stéphanie ou des réflexions qu’ils imposent aux femmes tel que l’expérience de Philippe pour rendre la raison à Stéphanie. Ils sont sûrs d’eux : « Le bonheur nous sourira, ou il n’y aurait pas de Providence » dit ainsi Philippe au magistrat, leur parole est presque performative, ils attendent l’exécution de l’acte après même l’avoir dit. Philippe est décrit comme impatient ne comprenant pas que Stéphanie ne recouvrera pas la raison, il s’attend à une réussite constante dans son approche pour l’apprivoiser ou dans la reconstitution de la Bérésina. De fait, les hommes possédant bel et bien l’apanage du discours, ce dernier constitue leur pouvoir qu’ils exercent en toute normalité sur leur entourage. Ils s’en servent même à outrance entraînant du même coup la déshumanisation de la femme.

          Les femmes dans cette nouvelle sont moins qu’humaine et même moins qu’animal. Cependant Philippe est le premier à se plaindre de l’état de Stéphanie, il contribue pourtant lui aussi à la déshumanisation de cette femme. Il souhaite la soigner, pas dans un élan de compassion et d’empathie pour Stéphanie mais parce qu’il ne supporte plus la douleur qu’il éprouve de la voir folle. C’est un pur sentiment d’égoïsme qui le pousse à user de son pouvoir sur Stéphanie. Ce sont ses semblables qui ont fait de Stéphanie, la femme sans raison qu’il connaît à présent, une gente masculine usant de son pouvoir presque  absolu. Toutefois, les hommes, malgré leur puissance apparente, on peut se demander s’ils détiennent réellement l’apanage de la raison. Ne sont-ils pas eux aussi victime d’une certaine forme d’aliénation ?



     Balzac, dans son œuvre, est explicite face à la folie qui empare ses personnages féminins, cependant il l’est moins quant à celle de ses personnages masculins. Nous constatons que Philippe est l’exemple même de l’aliénation non-déclarée. Une fois qu’il retrouve Stéphanie, il est clairement dépendant d’elle, ses actes et ses paroles nous le prouvent. L’ancien-officier partage des moments très intimes avec Stéphanie, au détriment de son oncle, et passe la quasi-totalité de son temps aux Bons-Hommes. Il se montre possessif envers elle et son humeur dépend des réactions de la jeune comtesse : « Elle ne me reconnaît pas, s’écria le colonel au désespoir. » Cette dépendance quant aux actions de Stéphanie finit même par le rendre fou.

      Philippe de Succy est lui aussi atteint d’une folie qu’il camoufle en faisant passer pour un plan ingénieux : reconstituer la bataille de la Bérésina afin de rendre la raison à Stéphanie par un choc, faire revivre l’épisode d’une histoire qui a ébranlé l’Europe et concerné des milliers d’hommes. Une bataille traumatisante où la faim, le froid, l’horreur et la mort ont marqué les esprits. L’ancien officier, immergé dans son projet, ne voit pas la connotation morbide qui se trouve dans la recréation de cette scène historique. Il y a même un côté destructeur lors de la création du décor : « Il ravagea son parc, afin de compléter l’illusion sur laquelle il fondait sa dernière espérance. […] Il éleva des cabanes, des bivouacs, des batteries qu’il incendia. Enfin, il n’oublia rien de ce qui pouvait reproduire la plus horrible de toutes les scènes ». L’ancien officier est dans ce passage semblable à un fou pris d’une crise et détruisant tout ce qu’il touche. Ainsi, l’apparente raison que détienne les hommes est contrebalancée par une folie sous-jacente, tout aussi bien que le discours qu’ils semblent maîtriser cache en vérité des silences.

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