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Lecture linéaire n° 9, « De l’esclavage des Nègres », Montesquieu.

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Par   •  22 Avril 2023  •  Commentaire de texte  •  1 449 Mots (6 Pages)  •  263 Vues

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Lecture linéaire n° 9, « De l’esclavage des Nègres », Montesquieu.

Si j'avais à soutenir le droit que nous avons eu de rendre les nègres esclaves, voici ce que je dirais : Les peuples d'Europe ayant exterminé ceux de l'Amérique, ils ont dû mettre en esclavage ceux de l'Afrique, pour s'en servir à défricher tant de terres. Le sucre serait trop cher, si l'on ne faisait travailler la plante qui le produit par des esclaves. Ceux dont il s'agit sont noirs depuis les pieds jusqu'à la tête ; et ils ont le nez si écrasé, qu'il est presque impossible de les plaindre. On ne peut se mettre dans l'esprit que Dieu, qui est un être très sage, ait mis une âme, surtout une âme bonne, dans un corps tout noir. Il est si naturel de penser que c'est la couleur qui constitue l'essence de l'humanité, que les peuples d'Asie, qui font des eunuques, privent toujours les noirs du rapport qu'ils ont avec nous d'une manière plus marquée. On peut juger de la couleur de la peau par celle des cheveux, qui chez les Égyptiens, les meilleurs philosophes du monde, était d'une si grande conséquence, qu'ils faisaient mourir tous les hommes roux qui leur tombaient entre les mains. Une preuve que les nègres n'ont pas le sens commun, c'est qu'ils font plus de cas d'un collier de verre que de l'or, qui chez des nations policées, est d'une si grande conséquence. Il est impossible que nous supposions que ces gens-là soient des hommes, parce que, si nous les supposions des hommes, on commencerait à croire que nous ne sommes pas nous-mêmes chrétiens. Des petits esprits exagèrent trop l'injustice que l'on fait aux Africains : car, si elle était telle qu'ils le disent, ne serait-il pas venu dans la tête des princes d'Europe, qui font entre eux tant de conventions inutiles, d'en faire une générale en faveur de la miséricorde et de la pitié.


Montesquieu, philosophe des Lumières, se propose, dans son ouvrage De l’Esprit des Lois, de comparer les Lois des différents pays, afin d’y trouver un sens. C’est dans ce livre qu’il va démontrer au livre XV, de manière rigoureuse, le bien-fondé de l’esclavage. En réalité, Montesquieu feint de se ranger du côté de ses adversaires afin de mieux les critiquer. Il s’agit d’un mode courant de dénonciation, basé sur l’ironie. Voltaire, lui aussi, y aura recours lorsqu’il rédigera son Dictionnaire philosophique, et notamment l’Article sur la torture : « Cela fait toujours passer une heure ou deux ». Nous allons donc nous demander, dans cet extrait, comment Montesquieu se sert de l’ironie pour dénoncer l’esclavage. Notre réflexion se divisera en trois temps : Nous étudierons tout d’abord les arguments économiques (les 3 premiers), puis nous nous focaliserons sur les arguments racistes concernant la couleur de peau (il s’agit des 4 arguments suivants), et enfin, nous nous intéresserons à des arguments concernant la comparaison avec des Nations dites « policées » (les 2 derniers).

"Nègre" est un terme qui est aujourd'hui extrêmement péjoratif. Ce terme n'était pas vu comme raciste à l'époque : ce n'est donc pas une offense de la part de Montesquieu

"Si" : Montesquieu s'exprime dans un registre hypothétique. Il se met à la place d'un esclavagiste, ce qu'il n'est pas, d'où l'emploi du conditionnel "je dirais"

S'en suivent 9 arguments :

- Le premier argument se base sur une question économique : les Indiens ont été exterminé par les colombs ou sont morts d'une épidémie. Cependant, il est loin de tenir la route tant il est immoral. On voit bien que Montesquieu n'en pense pas un mot : il utilise bien le terme "exterminer" qui dénonce la violence de ce fait historique. + "ils ont dû" (ironie)

- Le deuxième argument se base à nouveau sur une réalité immorale : si les esclavagistes n'ont pas une main d'œuvre gratuite, le coût de leurs productions sera bien plus élevé. On peut dire que c'est à nouveau un argument ironique puisque l'on se plaint du prix du sucre, loin d'être indispensable, en dépit de vies humaines. Rappelons d'ailleurs que le sucre, à l'époque, était un produit réservé aux élites, notamment car il fallait les capacités pour l'exporter.

- Le troisième argument vise à se moquer du niveau intellectuel des esclavagistes : en inversant volontairement l'expression "de la tête aux pieds". La périphrase "Ceux dont il s'agit" est une périphrase déshumanisante. "Ils ont le nez si écrasé, qu'il est presque impossible de les plaindre" : la cause et la conséquence n'ont aucun lien. De plus, cette phrase est construite sur un cliché : Non, les noirs n'ont pas tous un nez écrasé.

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