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Dissertation sur le théâtre

Dissertation : Dissertation sur le théâtre. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  5 Février 2024  •  Dissertation  •  3 819 Mots (16 Pages)  •  47 Vues

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La notion de théâtre est polysémique puisqu’elle représente à la fois le lieu de représentation (théatron) mais aussi la pratique théâtrale en elle-même. Il apparaît une tension entre les deux termes. Parmi ses Mille et une définition du théâtre, le metteur en scène O. Py énonce la proposition suivante :

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Le théâtre est une attraction terrestre et non apesanteur. Mais il est un poids qui dit « je suis bon ».

O. Py commence sa définition par un article défini qui suppose que le théâtre doit être un objet bien défini. Cependant, il ne précise pas s’il considère le théâtre comme lieu, représentation ou les deux. Le verbe d’état « est » qualifie et caractérise le théâtre, ce qui entre en opposition avec le déterminant indéfini « une » : le théâtre doit être défini par quelque chose d’indéfini ; ici, l’« attraction ». Si le théâtre est « attraction terrestre », il n’est pas « apesanteur ». Pour appuyer le fait qu’il n’est pas « apesanteur », l’auteur supprime le déterminant. L’on voit dès lors une indéfinition grandissante au fur et à mesure de l’énoncé de la définition. Avec son « mais », l’auteur met en contraste l’« attraction terrestre » et le poids qui dit « je suis bon ». L’opposition apparaît injustifiée puisque les deux ne semblent pas être en contradiction. Le poids, lui, parle et se décrit comme bon ; ce poids, c’est le théâtre. Dès lors que le théâtre est « attraction », plusieurs sens lui sont donnés : il peut attirer ou avoir de l’attrait, ou bien encore être le changement d’une lettre par l’effet de sa voisine. Cette attraction terrestre, c’est-à-dire qui appartient à la terre, mais aussi qui s’oppose au spirituel ou qui est lié au sensible, et même qui manque d’élévation : c’est autant de définitions possibles. Le théâtre serait alors quelque chose (lieu ou pratique) qui appartient à la terre, qui attire et qui est bon en ce sens qu’il est porté à aider les autres, en mettant notamment les moyens matériels ou d’assistance morale susceptibles de favoriser leur épanouissement ou leur bonheur. Cela voudrait dire qu’il se donnerait la faculté de répondre aux exigences de la morale. Le théâtre devra peser sur le monde puisqu’il n’est pas apesanteur. Mais ne théâtre ne pourrait-il pas être ce qui a de l’attrait, en se rapportant au choses sensibles et matérielles ? Ainsi, deviendrait-il utile. La définition d’O. Py laisse une grande interprétation des termes, peut être pour continuer dans cette indéfinition permanente du théâtre, qui ne sait se définir entre lieu et pratique et appuierait donc son caractère fuyant.

Comment l’indéfinition du théâtre lui permet-elle d’osciller entre le terrestre et le céleste, le placere et le docere pour et par les hommes ?

Nous verrons d’abord que le théâtre est terrestre parce qu’il montre aux Hommes leurs conditions de vie, leur humanité et leur sensibilité. Cependant, le théâtre est aussi apesanteur dans la liberté imaginative et spirituelle des hommes, comme dans sa réflexivité. Finalement, le théâtre est un mélange de terrestre et de céleste, qui modifie en profondeur les Hommes ; théâtre qui deviendrait un théâtre à ciel ouvert.

Le théâtre antique semble un exemple d’un théâtre très terrestre. Il a un but : favoriser le bonheur et l’épanouissement de la cité. Pour cela, dans la Grèce antique, il apparaît le droit au théâtre. Périclès met en place un système où la cité verse deux ou trois oboles aux plus pauvres pour qu’ils puissent quand même venir assister aux représentations. Dès lors, le droit au théâtre se transforme en devoir social puisque subventionné par les pouvoirs politiques. Le quotidien des Hommes est représenté, ce qui en fait un objet de représentations le plus terrestre, puisqu’il a de l’attrait — lors des grandes fêtes grecques, presque toute la cité se dirige vers le théâtre. On le voit, aller au théâtre en tant que lieu (théatron) est un droit terrestre. Mais la représentation qui en suit l’est tout autant : Aristote nous écrit dans sa Poétique que dans les tragédies, ne sont, certes, pas représentés des Hommes, mais des actions humaines — ce qui l’ancre peut-être encore plus dans la terre. Le théâtre est imitation du monde, du fait de la mimèsis, qui prend la forme d’une praxis, c’est-à-dire d’une action pratique. Quant au genre comique, si l’on ne devait citer qu’un dramaturge de l’Antiquité, ce serait sans doute Aristophane. Dans Les Cavaliers, pièce écrite en 424 av. J.-C., il critique Cléon, le tout-puissant démagogue. Le thème de ce théâtre est donc définitivement ancré dans le quotidien des Hommes, dans leur terrestrialité ; la pratique théâtrale n’est qu’imitation. Il en devient bon puisqu’il permet, dans les tragédies, de purger ses passions — la catharsis — car l’on représente pitié et crainte, que le spectateur ressent aussi, et qui, comme dirait Aristote, est pris d’un sursaut éthique qui lui purgerait de toutes ses passions. Le spectateur, débarrassé de ses sentiments se sent dans une plénitude.

Le rire, lui, est tout autant humanité pure : c’est un lien vers la terre. Théophile Gautier assigne au rire la propriété de désigner l’humanité profonde de celui qui s’y adonne. Effectivement, le rire est une caractéristique que seul l’Homme a. Il est une manifestation de l’orgueil humain, alors que les comédies représentent une inversion des rapports de force. La comédie étant l’imitation des Hommes de qualité morale inférieure dans le domaine du risible, les Hommes rient de la situation dans laquelle ils voient l’autre, cette jouissance d’éprouver une supériorité. Le genre comique prend ses racines dans un sujet terrestre : si l’on prend sa définition anthropologique, il commence avec le mythe de Déméter — déesse de la moisson, de la fertilité de la terre ; littéralement des meter soit terre nourricière — qui allégorise le rapport entre la mère et la fille comme d’une épreuve de la mort entre mortels. La comédie apparaîtrait alors comme une consolation fondamentale, une danse que Baubô aurait effectuée pour divertir Déméter, attristée et à la recherche de sa fille, enlevée par Hadès. Dès lors, Baubô exhibe son corps, ob-scène, id est aux yeux de tous, pour provoquer le rire, qu’on sait comme protection contre l’angoisse. Dans la définition textuelle, l’on parle d’une prise de distance avec le ridicule, comme répulsion fondamentale, un mouvement d’ab-jection, de rejet en dehors de soi, comme purgation d’une passio. L’on voit que la raillerie comique fait dire manifestement et physiquement — rend ob-scène — les vérités, les souffrances intimes des Hommes qu’ils gardaient dans son intériorité. Le théâtre comique est ancré dans la terre par son histoire, par sa définition et, comme la catharsis pour la tragédie, procède à une élimination des passions. Mais le rire, s’il est humain, n’en est pas pour autant si bon : il est satanique et a un rapport avec l’Ange déchu — comme étymologie de son nom même de Diable qui le définit comme calomniateur. Le rire semble alors mauvais et purement humain et terrestre ; il n’est pas bon.

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