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Balzac, Colonel Chabert, commentaire rédigé

Commentaire de texte : Balzac, Colonel Chabert, commentaire rédigé. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  29 Juin 2023  •  Commentaire de texte  •  1 684 Mots (7 Pages)  •  316 Vues

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Exemple de commentaire de texte
entièrement  rédigé

TEXTE SUPPORT : Honoré de Balzac,  Le Colonel Chabert – 1844

Portrait du Colonel à l’arrivée chez Derville

Le jeune avoué demeura pendant un moment stupéfait en entrevoyant dans le clair-obscur le singulier client qui l’attendait.  Le colonel Chabert était aussi parfaitement immobile que peut l’être une figure en cire de ce cabinet de Curtius où Godeschal avait voulu mener ses camarades. Cette immobilité n’aurait peut-être pas été un sujet d’étonnement, si elle n’eut complété le spectacle surnaturel que présentait l’ensemble du personnage. Le vieux soldat était sec et maigre. Son front, volontairement caché sous les cheveux de sa perruque lisse, lui donnait quelque chose de mystérieux. Ses yeux paraissaient couverts d’une taie transparente : vous eussiez dit de la nacre sale dont les reflets bleuâtres chatoyaient à la lueur des bougies.  Le visage pâle, livide, et en lame de couteau, s’il est permis d’emprunter cette expression vulgaire, semblait mort. Le cou était serré par une mauvaise cravate de soie noire. L’ombre cachait si bien le corps à partir de la ligne brune que décrivait ce haillon, qu’un homme d’imagination aurait pu prendre cette vieille tête pour quelque silhouette due au hasard, ou pour un portrait de Rembrandt, sans cadre.

Les bords du chapeau qui couvrait le front du vieillard projetaient un sillon noir sur le haut du visage. Cet effet bizarre, quoique naturel, faisait ressortir, par la brusquerie du contraste, les rides blanches, les sinuosités froides, le sentiment décoloré de cette physionomie cadavéreuse.  Enfin l’absence de tout mouvement dans le corps, de toute chaleur dans le regard, s’accordait avec une certaine expression de démence triste, avec les dégradants symptômes par lesquels se caractérise l’idiotisme, pour faire de cette figure je ne sais quoi de funeste qu’aucune parole humaine ne pourrait exprimer.

                Au XIXème siècle, le courant réaliste  se développe avec les romans d’Honoré de Balzac. Ainsi, dans Le Colonel Chabert, publié en 1844, l’auteur propose dans le premier chapitre un portrait énigmatique du personnage éponyme. Nous nous interrogerons donc sur la vision que le narrateur nous donne  du personnage principal dans ce début de roman. L’examen du texte portera d’abord sur la présentation d’un personnage visiblement meurtri, puis sur le mystère qui l’entoure.  

        Tout d'abord, Balzac nous montre dans le portrait du Colonel Chabert, celui d’un personnage très meurtri.

              En effet, tout son aspect physique est dégradé. Par la phrase "le vieux soldat était sec et maigre", l'auteur focalise l'attention du lecteur sur la silhouette squelettique du Colonel : la phrase courte donne une impression de sécheresse de ton et les sonorités dures "ec" et "aig" la renforcent. Le personnage semble, par ailleurs, très réduit physiquement, par la peur ou par la maladie puisque Balzac évoque son visage "pâle, livide". De même, l'expression "en lame de couteau" suggère la souffrance. Enfin, l'auteur insiste sur la pauvreté matérielle du client de Derville en parlant de "la mauvaise cravate de soie noire" : il est donc mal habillé et "le cou serré "par la cravate" connote aussi un étranglement symbolique, comme si des problèmes allaient jusqu'à l'étouffer. Enfin, le lexique souligne la vieillesse de l'ancien soldat : le portrait fait ressortir les "rides", "les sinuosités froides" et on relève "vieux...vieille...vieillard" ; dans ce dernier mot culmine l'impression d'une vie ruinée et proche de la mort.

         Or, à la dégradation du corps s'associe celle de la conscience. Balzac évoque la misère morale du Colonel par le biais de son regard : en commençant par écrire «ses yeux paraissaient recouverts d'une taie transparente", il crée une impression plutôt repoussante, et en comparant leur couleur à de "la nacre sale", il laisse supposer que tout leur éclat a disparu : ce regard morne est sans doute le reflet d'une grande misère morale. A la fin du passage, le regard de Derville interprète la nature de cet état : les termes sont forts car ils désignent une sorte de folie : "expression de démence triste... dégradants symptômes par lesquels se caractérise l'idiotisme". Le personnage est donc vu comme souffrant d'une maladie mentale et morale ; il est en quelque sorte dégradé intellectuellement.
                      Enfin, l'aspect inconsistant du corps et le vide du regard donnent à ce client une allure fantomatique qui introduit dans le texte la tonalité fantastique. C'est l'insistance récurrente sur l’immobilité qui donne l'impression que Derville est face à un mort-vivant. D'abord, Balzac focalise l'attention sur une attitude "parfaitement immobile" qui connote l'étrangeté chez ce personnage. Il reprend ce thème par une comparaison avec "une figure de cire" qui suggère l'absence de vie et par une périphrase "l'absence de tout mouvement dans le corps" qui laisse penser que l'on n'a pas affaire à un être humain. Cela se confirme par le champ lexical de la mort : celle-ci est d'abord évoquée implicitement par des adjectifs : "pâle...livide...blanches...froides...décoloré", puis plus explicitement par "cadavéreuse" et un groupe verbal "semblait mort" qui confirment au lecteur l'impression fantastique d'un revenant.

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