Le Blé En Herbe

Le Blé en Herbe

Extrait n°3

Problématique s’agit-il véritablement d’un épilogue ou d’une histoire sans fin ?

I. Tout laisse à penser que cet extrait clôt ce roman

A. La logique le voudrait et ce pour les raisons suivantes :

-Ce passage se situe à la toute fin du roman.

- La logique de l’histoire semble respectée. Nous avons suivi les 2 personnages dans leur initiation à l’amour en empruntant des chemins différents et nous les avons vus évoluer. Nous les retrouvons au lendemain de leur première nuit passée ensemble. Comme le blé en herbe qui ne demande qu’à mûrir, l’été, ils ont mûri aussi à leur façon et sont devenus de jeunes adultes.

-La structure du roman accentue cette cohérence de l’histoire. La boucle semble être bouclée.

La dernière scène fait écho à la 1èrepar le jeu des regards échangés.

Dans l’Incipit, Phil observe du haut de la colline Vinca descendant à la plage.

Dans l’épilogue, il la surveille en contre-bas, elle se trouvant sur le balcon. Il y a juste inversion de la situation.

B. Phil, lui-même, semble attendre une fin à son histoire

« Phil veille comme un homme venu là pour un attentat », dissimulé par un élément du décor de la scène, des fusains. Il est dans l’attente.

-Il y a de sa part un souci de mettre en scène cette scène finale

Relevons les indications scéniques telles

« les rideaux glissent sur leur tringle » comme un lever de rideau lors d’une représentation

« Vinca parut entre les contrevents » , elle est au balcon

- Cette théâtralité s’explique par l’enjeu : Phil craint que la nuit d’amour passée avec Vinca ne mette un terme à leur complicité de longue date.

Nous savons dans les lignes précédant l’extrait que Phil regrette cette nuit passée avec la jeune fille Il feignait de s’adresser à elle et lui confiait que « Rien n’est perdu si tu oublies et si moi-même j’efface un souvenir déjà voilé par la nuit ».

Déjà au chap 16, il pressentait que l’être unique « Phil-Vinca » qu’il formait , allait mourir, cette année et se demandait déjà s’il pouvait l’empêcher »

Le jeune-homme se montre nostalgique de cet « amour-amitié » d’avant tissé par tant d’années de complicité, cet amour pur, innocent. Il craint d’avoir perdu la jeune fille qui s’est abandonné à lui.

Aussi « il appelle son courage et réussit à ne pas tourner la tête » à l’apparition de Vinca au balcon.

II. En vérité cet extrait ne termine en rien l’histoire. C’est une fin de roman « ouverte »

A. Paradoxalement le dénouement que redoutait Phil n’a pas lieu et plonge celui-ci dans le désarroi voire la stupéfaction la plus totale.

1. Loin de pleurer et d’être abattue comme il le craignait, Vinca semble être restée elle-même ou mieux s’être révélée dans sa féminité.

Vinca, à son réveil, accomplit les mêmes gestes habituels. « Elle chante la chanson qu’elle chante tous les jours », notons ici ces pléonasmes pour souligner la banalité de son attitude.

Elle se peigne, arrose les plantes, regarde au loin le paysage. Cette évocation cadre bien avec la Vinca naturelle et pétillante que nous connaissions. Phil nous dresse un portrait harmonieux de la jeune file avec le regard porté sur ses paupières, ses lèvres, ses cheveux, comme s’il s’agissait de faire un blason, c'est-à-dire un éloge de la beauté féminine.

« Cette petite fille à l’air si naturel » s’est métamorphosée en une séduisante jeune femme.

Vinca à présent est loin de cette petit fille sauvageonne qui allait à la pêche aux crevettes, ses habits tout abimés. L’été lui a permis de prendre conscience de sa féminité et elle en joue.

« Colette dans ce passage nous la montre plusieurs fois en train de se peigner , geste féminin s’il en est et très sensuel « elle enfonce ses mains dans l’épaisseur de ses cheveux ».

Elle use d’autres atouts : « le sourire et la rouge éclatèrent ensemble sur son visage qu’elle pencha entre ses cheveux ».

Avec « la brindille sèche qu’elle retire de sa chevelure, nous pouvons peut-être voir le symbole de son « mûrissement ». De même que le blé en herbe évoque le passage de l’adolescence à l’âge adulte et la découverte de l’amour charnel, de même cette brindille évoque l’épanouissement de cette jeune femme.

Ses yeux luttaient d’azur avec la mer matinale »

Elle esquissa un vague sourire, « écrasant sa gorge sur le balcon de bois, elle-même se tendant vers la chambre de Philippe.

Son charme est intact, il n’ a pas changé mais s’est accru.

2.

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