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La subjectivité en question : genèse et intermittences du sujet

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Par   •  23 Janvier 2024  •  Cours  •  5 801 Mots (24 Pages)  •  42 Vues

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LA SUBJECTIVITE EN QUESTION : GENESE ET INTERMITTENCES DU SUJET.

A. Introduction et problématique.

Partons de la représentation commune de la conscience : elle serait une activité analogue à un faisceau lumineux qui tour à tour éclairerait les objets et se déplacerait comme un spot sur un tableau (le monde « réel »). Les objets successivement éclairés, devenus conscients, retourneraient ensuite à leur obscurité initiale. Par exemple, prendre conscience de la présence de ce meuble, c’est en dévoiler la présence, comme si je devais éclairer les objets pour que leur existence se manifeste et soit assurée. Dès que la prise de conscience cesse, en se focalisant sur autre chose, l’objet premier retourne à son existence muette et opaque, à cette quasi inexistence que constitue l’objet tel qu’il doit être en lui-même, hors de mon regard1.

Mais la thèse du sens commun présuppose :

  • que le « réel » subsiste en soi sans qu’intervienne la conscience et qu’il a une effectivité indépendante d’elle. Bref, on suppose que le réel est en lui-même tel qu’il est lorsqu’il est perçu ;

  • que la conscience, par conséquent, ne structure pas le réel et ne le leste d’aucune signification ni n’introduit en lui le moindre sens : prendre conscience de la présence de quelque chose, c’est apercevoir simplement qu’il existe et constater en dehors de soi cette existence brute, identique à sa représentation dans la conscience ;
  • enfin, cette thèse suppose que la conscience est un épiphénomène, c’est-à-dire un phénomène qui se surajoute à la phénoménalité du monde, sans autre détermination que d’être une fonction de constat (l'aperception ne serait que le constat ou éclairage de ce qui est en dehors d'elle).

Mais un axe d’analyse peut être donné par anticipation (nous y reviendrons) :

Si la conscience est tenue pour une réalité séparée du monde (si elle est épiphénoménale,

  • savoir si sa séparation du monde est de fait et elle subsiste en elle-même tout comme le monde extérieur subsiste en soi hors de la conscience), on rencontre un premier obstacle : une conscience vide, sans monde, sans autre, est absolument inconcevable, il ne saurait y avoir une conscience de rien. Etre conscient c’est être conscient de quelque chose. Dans la première ébauche de conscience un être autre qu’elle est engagé, et il est impossible de tenir la conscience pour une réalité isolée, à savoir sans aucune relation à un autre qu’elle. Ce qui implique que toute conscience est corrélative : le sujet conscient n’est tel que parce qu’il entre en relation avec un autre (ou avec sa propre objectivation, c’est-à-dire lui-même comme objet de sa propre conscience). Toute conscience existe donc nécessairement comme conscience d’objet ou comme conscience de soi. La conscience n’est donc pas, a priori, indépendante de toute altérité, quel qu’en soit le mode : au contraire, elle est en tant que telle relation à un autre.

[pic 1]

  • En effet, l’existence en elle-même, celle d’un bureau, par exemple, est une quasi inexistence en ce qu’elle ne s’apparaît pas à elle-même. Pour le bureau, de son « point de vue » pour ainsi dire, rien n’existe, la question même d’une existence quelconque est pour lui un pur non sens (il n’a pas de soi, ce qui le distingue de l’être-sujet). Aussi l’existence de l’objet, hors de toute conscience qui en dévoile la présence et le sens, équivaut au néant. L’existence ne se met en quelque sorte à « exister » que par et pour une conscience. Exister, c’est avoir conscience d’exister, si l’on veut.

Notons que cette hypothèse d’une conscience vide est théoriquement permise par la définition usuelle de la conscience comme réalité séparée du monde (moi d’un côté, le monde de l’autre) : si elle en est ontologiquement séparée, il est possible de faire l’hypothèse d’une conscience sans objet. Or, qu’on ne puisse faire l’expérience d’une telle conscience, ou que toute conscience ait un objet, sans quoi elle n’est plus conscience, est la preuve selon laquelle la thèse scissionnaire ou dualiste (extériorité réciproque de la conscience et du monde) est une thèse fausse. Sur ce premier axe, la question est la suivante : quel est cet autre qui entre dans l’ébauche de toute conscience et comment lui est-il donné ? Quel est son statut ?

Problématique :

Attention : l’analyse de la conscience se fait avec le langage de l’adulte et la langue philosophique, qui supposent des distinctions et des opérations qui n’existent pas encore au niveau de la conscience native ou de la conscience sensible. Il faut proscrire les reconstructions théoriques et tenter de décrire ce phénomène tel qu’il existe en lui-même.

  1. En premier lieu, comment comprendre et décrire le commencement de la conscience ? Quelles sont les conditions pour qu’on puisse affirmer d’un être qu’il est conscient ? La conscience commence-t-elle avec le langage, ou avec la sensation ? Ensuite, est-elle une réalité naturelle, un donné de l’expérience humaine (c’est-à-dire qu’elle n’est produite que par sa propre spontanéité), le résultat d’une histoire humaine et relationnelle, ou encore un processus de subjectivation dont il faut analyser le sens ?

  1. Comment penser la conscience de soi : comme une intériorité face ou dans le monde, ou comme une relation sans retrait, sans « dedans » ?
  1. La conscience de soi, ou sujet, peut-elle être assurée de son existence ou celle-ci requiert-elle un autre fondement que la prise de conscience réfléchie de sa propre effectivité ? Peut-elle être à elle-même son propre fondement ?
  1. Comment comprendre, enfin, le processus de subjectivation dans son rapport au monde humain ?
  1. L’expérience inchoative de la conscience.

Dans son acception usuelle, la conscience est témoignage intérieur, « bourdonnant de mots » comme l’écrit Merleau-Ponty. Mais la discursivité de la conscience est-elle originaire, est-elle advenue et/ou intermittente ? Quelle est la relation de la conscience au langage ?

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