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Une symbiose judéo-chrétienne

Compte rendu : Une symbiose judéo-chrétienne. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  31 Mars 2023  •  Compte rendu  •  5 093 Mots (21 Pages)  •  152 Vues

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Compte-rendu Ivan Marcus :

        L’article qui fera l’objet de notre compte-rendu est un chapitre du livre « Les cultures juifs : une nouvelle histoire » de David Biale. Ce dernier établit dans sa préface qu’à chaque période de l’histoire, les interactions avec la majorité non juive ont joué un rôle essentiel dans la formation de la culture juive et que même les cultures qui semblaient être les plus fermées au monde extérieur ont adapté des idées et des pratiques propres à leur entourage. La situation des Juifs ashkénazes du Moyen Âge constitue une parfaite illustration et c’est ce dont Ivan Marcus traite dans son chapitre  « Une symbiose judéo-chrétienne : La culture d’Ashkénaz à ses origines ».

        Ivan Marcus ouvre son chapitre avec une citation tirée du Sefer Ḥassidim : « … Sachez que si des Juifs vivent dans cette ville, leurs enfants et leurs petits-enfants aussi se comporteront tout comme les chrétiens. Car dans chaque ville, en tout cas à peu près partout, les Juifs se comportent tout comme les chrétiens ». On comprend pourquoi cette citation apparaît dès le début car tout son propos va consister à démontrer combien cela fût vrai pour les Juifs Ashkénazes du Moyen- Âge. Dans un premier temps, sans explorer encore un sujet en particulier, il commence par expliquer comment le processus même de résistance culturelle impliquait l’appropriation et l’adaptation de symboles chrétiens comme moyens de construire une identité juive. Dans un second temps, il qualifie de trompeuse la doxa selon laquelle le Moyen-Âge européen aurait été uniquement une époque de préjugés, de violences, d’intolérance et de persécution constante envers les Juifs alors même que selon l’auteur, les persécutions chrétiennes furent en général l’exception et non la règle et elles ne caractérisèrent que certaines périodes. La norme aurait plutôt été constituée de modèles divers de mixité sociale

entre Juifs et chrétiens : d’ordre socio-économique (négoce, médecine, prêts d’argent) et d’ordre socio-religieux (conversions, relations sexuelles, discussions sur la religion), entre autres.

        Ivan Marcus évoque aspects  de la confrontation judéo-chrétienne intimement liées : d’une part la confrontation conflictuelle et hostile qui opposait parfois les membres d’une communauté à l’autre et d’autre part, la coexistence proche et quotidienne des membres de ces deux communautés dans la société où ils vivaient. Si les élites au pouvoir des deux cultures faisaient des efforts pour les séparer, c’est bien parce que leur mixité sociale au quotidien était une réalité et qu’il y avait cette crainte réciproque des influences néfastes que les uns pouvaient exercer sur les autres.

        L’auteur regrette que malgré cette proximité sociale entre les membres des deux cultures les spécialistes de l’Europe, les spécialistes de l’Europe médiévale ne se sont intéressés aux chrétiens que lorsqu’ils ont été les agents agressifs d’une société persécutrice à l’égard des Juifs. Il tente alors de retracer historiquement les raisons qui peuvent expliquer cela. Il évoque   notamment l’idéologie du souvenir et du martyre élaborée par les poètes synagogaux au début du XIIè siècle qui implique que c’est la période de persécution qui imprègne totalement la mémoire des Juifs d’Ashkenaz. Les historiens modernes se sont appuyés sur les récits ainsi conservés pour bâtir leurs analyses et si on rajoute à cela l’idée d’une ségrégation démographique, on aboutit à l’image d’un monde Ashkénaz médiéval culturellement et socialement isolé et assiégé de toutes parts et qui n’auraient pas pu alors interagir avec son milieu environnant. L’auteur établit encore une fois que ce n’est pas exact et que même s’il y avait des persécutions significatives de Juifs en Europe du Nord au Moyen Âge et surtout à partir du XIVè siècle, il ne s’agit ni d’une expérience spécifique aux Juifs d’Europe du Nord, ni d’une expérience constante et dominante durant cette période médievale. Les persécutions étaient donc d’une fréquence irrégulière et c’est justement pour cette raison que l’auteur choisit de considérer chaque évènement comme quelque chose de particulier, de le remettre et l’analyser dans son contexte et d’aller ainsi à contre-courant de l’idéologie du martyre en Ashkenaz qui prônait que c’était typique de cette période.

  La naissance d’Ashkenaz  

        Après cette partie introductive, l’auteur aborde plusieurs thèmes dont le premier est l’histoire de la naissance d’Ashkenaz qui retrace les différentes installations des Juifs en Allemagne, en France et en Angleterre. Il évoque les plus anciennes décisions politiques royales concernant les Juifs en Europe du Nord qui datent de Charlemagne et plus précisément de son fils, Louis le Pieux ( 814-840). Ce dernier accorda des chartes privées protectrices à des marchands juifs individuels vers 825 et la poursuite de cette politique carolingienne par les dirigeants de l’Empire germanique suivants avait encouragé l’immigration juive et devenait un facteur de l’expansion démographique et urbaine de l’Europe au début du Moyen Âge. L’auteur  retrace l’évolution de la vie communautaire en parlant du changement et de la diversification des rôles au sein des communautés juives au fur et à mesure de cette expansion démographique et urbaine de l’Europe chrétienne. Des innovations étaient nécessaires de la part des chefs religieux et des anciens en raison de la localisation des premières communautés nord-européennes sur une nouvelle frontière juive. A Mayence, elles se manifestaient par exemple à travers les décisions légales des rabbins qui interprétaient et appliquaient directement des passages du Talmud, de traités antérieurs de la Mishnah ou même de la Bible au lieu de se référer aux décisions et précédents des geonim babyloniens. Un signe d’une nouvelle évolution communautaire survient en 1084 avec la Charte de Spire qui fut la première charte communautaire accordée à une communauté juive en Europe chrétienne . La politique carolingienne de protection royale et impériale de l’autonomie locale juive qui s’est développée à l’origine dans les villes d’Allemagne était un modèle pour les communautés juives dans les terres du royaume de France, d’Angleterre, d’Espagne chrétienne et en Europe centrale jusqu’au début des temps modernes.

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