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Les Leçons De L'histoire Américaine Régime « Congressionnel » Ou régime « Présidentiel » ?

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Par   •  8 Décembre 2013  •  5 298 Mots (22 Pages)  •  1 344 Vues

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Régime « congressionnel » ou régime « présidentiel »? Les leçons de l'histoire américaine

Le régime des Etats-Unis d'Amérique est la seule iUustration durable de l'un des grands modèles du constitutionnalisme clas¬ sique : le système présidentiel (1). La valeur heuristique de tels modèles est fortement contestée aujourd'hui, de façon parfois exces¬ sive. On admet qu'un régime politique n'est pas seulement, ni même principalement, déterminé par l'économie juridique de ses institu¬ tions. D'autres facteurs doivent être pris en considération : nature du système partisan bien sûr, mais aussi, plus largement, tempéra¬ ment et culture politiques spécifiques, singularité des pratiques issues de circonstances historiques données, voire bien qu'il ne soit guère de mode d'y insister à l'ère des masses poids des hommes. La compréhension du fonctionnement du régime américain passe donc nécessairement par l'analyse du travail concret de la consti¬ tution sur une période presque bicentenaire. Ceci vaut en général mais singuUèrement pour les subtiles relations qu'entretiennent le Président et le Congrès.

(1) Sur le régime américain, en langue française : Mathiot, La vie politique aux Etats-Unis et les tendances récentes, Cours iep, Paris, Les Cours du droit, 1974-1975 (et mise à jour) ; Denenberg, Introduction au système politique des Etats-Unis, Paris, Economica, 1978 ; Ogg et Ray, Le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique, Paris, PUF, 1958 ; Tune, Les Etats-Unis, Paris, lgdj, 3e éd., 1973 ; Vile, Le régime des Etats-Unis, Paris, Le Seuil, 1972. Parmi les réflexions récentes sur les relations Président-Congrès : Tune, Le couple Président-Congrès dans la vie politique des Etats-Unis d'Amérique, Mélanges Burdeau, Paris, lgdj, 1977, p. 561 s.

Pouvoirs 29, 1984

36 Stéphane Riais

L'invention du régime « présidentiel »

Le système « présidentiel » n'est pas né tout casqué, dans ses modalités techniques, de la tête d'un législateur de génie. Il est le fruit d'un compromis (d'une série de compromis de détail), comme l'est d'aiUeurs le fédéraUsme moderne lui aussi découvert par les constituants de Philadelphie. Il ne faut point trop s'attarder sur les filiations doctrinales, même si Montesquieu et surtout Locke étaient entre autres bien connus des « Pères fondateurs ». Il n'est pas non plus utile de recourir à l'hypothèse d'une volonté de créer, par réaction, un régime à tout prix différent de celui de l'Angleterre. Un tel désir de spécificité ne s'est en vérité affirmé en demi-teintes que la pratique précisera que sur un point : l'idée de supralégaUté constitutionneUe issue de la méfiance antérieure à l'encontre du législatif britannique. Mais on n'a pas songé à faire « autre chose » que le régime « parlementaire » pour la bonne et simple raison que ce dernier certes presque à maturité dans les années 1780 ne sera vraiment stabilisé à Londres que quelques décennies plus tard (2). On est mieux inspiré lorsqu'on se tourne vers la déjà longue expé¬ rience constitutionnelle des anciennes colonies : eUe a permis de tester bien des techniques avec des résultats positifs ou négatifs et eUe a favorisé le déploiement d'un constitutionnaUsme américain certainement inégalable en son temps. Quoi qu'il en soit, le régime « présidentiel » est sorti d'une dis¬ cussion serrée. D'un côté, les centralisateurs les « fédéralistes » disait-on dans une acception de ce terme différente de celle qui prévaut aujourd'hui étaient favorables non seulement à une nette unification des Etats préexistants mais encore à un puissant exécutif. Parmi eux, le très éUtiste Alexander Hamilton était le plus radical et tendait vers une conception proprement monarchique du pouvoir. De l'autre côté, ceux que l'on appellera plus tard « républicains » puis « démocrates », et dont le maître à penser, Jefferson, était absent de la convention, voulaient défendre les droits des Etats et, au sein de l'Etat fédéral dans la mesure où ils l'acceptaient ils rejetaient la création d'un exécutif envahissant (3). A PhUadelphie, les « fédéralistes » eurent en vérité l'initiative car

(2) Voir Castel, Le Premier Ministre britannique (1782-1832), Revue historique de droitfrançais et étranger, 1981, p. 199 s. (3) Sur les idéologies américaines, v. notamment Birnbaum, La structure du pouvoir aux Etals-Unis, Paris, puf, 1971 ; Marienstras, Les mythes fondateurs de la nation américaine, Paris, Maspero, 1976 ; Béranger et Rouge, Histoire des idées aux Etats-Unis, Paris, puf, 1981.

Régime congressionnel au présidentiel 37

le système antérieur, très lâche, de la confédération, avait mal fonctionné depuis Fiske, on parle pour ces années difficiles de « période critique ». Ils proposèrent d'abord un projet modéré large¬ ment inspiré par Madison (4). Les antifédéralistes ripostèrent par le dépôt d'un projet alternatif. Mais ils finirent par négocier pour l'amender sur la base du texte initial, car HamUton, entre-temps, les avait effrayés en proposant une constitution wftra-centraUsatrice et autoritaire. C'est ainsi que se dégagea peu à peu le régime complexe que l'on dit aujourd'hui « présidentiel » et qui se caractérise par une séparation des pouvoirs assez stricte en excluant la responsabilité poUtique de l'exécutif monocéphale devant le législatif, en ne lui conférant pas, symétriquement, le droit de dissoudre ce dernier, et en agençant divers freins et contrepoids (checks and balances) tels un droit de veto limité au profit du Président ou la possibilité pour le Sénat de ratifier les traités ou les nominations présidentielles. On paraphrasera Richard Neustadt en observant que la séparation des pouvoirs n'empêche pas leur coUaboration dans l'exercice des fonctions (5). Ce compromis originaire n'a pas été modifié par les amendements peu à peu apportés au texte de 1787, même si certains ont affecté, de façon accessoire au point de vue qui nous occupe, l'institution presidentieUe (les 12e, 20e, 22e et 25e notamment). Mais l'histoire lui a donné des significations successives et contradictoires jusqu'au début de ce siècle. A qui profite la séparation des pouvoirs ? S'il n'est pas certain aujourd'hui que ce soit toujours à la Présidence, U était avéré pour les meilleurs spécialistes de la fin du siècle dernier

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