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Histoire politique et religieuse

Dissertation : Histoire politique et religieuse. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  29 Octobre 2019  •  Dissertation  •  4 862 Mots (20 Pages)  •  394 Vues

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Dissertation d’histoire

Sujet : « Nous sommes un Etat laïc, notre société ne l’est pas pour autant. »

En 2016, la commission « Laïcité et fonction publique » était chargée d’écrire un rapport sur l’application du principe de laïcité par les membres de la fonction publique au quotidien. Si le cadre juridique de l’Etat est laïc, son application à la société n’est pas pour autant évidente.

En 1789 les idées modernes de libertés individuelles liées à la laïcité font leur entrée en grande pompe et avec fracas dans l’histoire politique et sociale de l’Etat français. Il faudra pourtant attendre plus d’un siècle et des remous politiques et religieux inédits pour qu’en 1905, Eglise et Etat se séparent de façon pérenne et que la société soit sur une pente continue de laïcisation.

La laïcité désigne le principe selon lequel la sphère religieuse ne doit pas empiéter sur la sphère politique et inversement, c'est-à-dire un principe de séparation du pouvoir temporel et spirituel. Un Etat laïc est donc un Etat qui traite la société civile en tant que société civile indépendamment de la religion et veille simplement à ce que la religion n’empiète pas sur sa sphère. Mais que peut être une société laïque ? Car la religion est éminemment sociale. Une société laïque ne peut être que celle que forme un Etat laïc quand celui-ci est un « nous », c'est-à-dire quand la société civile se reconnaît dans sa participation à l’Etat. Ainsi dans une société laïc, le citoyen est laïc, quelles que soient les convictions de l’individu privé. Lorsqu’il vote, ce ne pas un catholique ou un protestant qui vote mais simplement un citoyen. On remarque à ce titre que tout au long du XIXe siècle, la carte électorale est très liée à la pratique religieuse. De plus la conception française de la laïcité est originale. La conception anglo-saxonne par exemple conçoit la laïcité comme le fait que l’Etat traite toutes les religions de la même manière, toutes peuvent s’exprimer dans l’espace publique de la même façon tant qu’elles ne portent pas atteinte aux droits d’autrui. Or la conception française refuse le port de signes religieux ostentatoires dans l’espace publique. Cette ostentation est considérée comme une atteinte à la laïcité elle-même, comme ne pas vouloir faire partie de l’Etat laïc. La conception française de la laïcité exige donc de la société civile en tant qu’elle constitue le corps de l’Etat qu’elle soit laïque. La religion doit appartenir à la société seulement en tant que croyance personnelle d’un individu privé et l’Etat doit la traiter comme telle c'est-à-dire simplement assurer à chaque individu sa liberté de croyance associée à l’idée moderne des libertés individuelles. La laïcité est donc très liée à une société qui petit à petit à partir d’une société d’ordres d’Ancien Régime, s’individualise et se libéralise. C’est le cas en France au XIXème siècle. Or la religion n’est pas simplement une croyance privée. Elle est avant tout sociale. Les rites et la pratique collective sont consubstantiels à la religion. La religion organise le temps social, la journée est rythmée par les cloches, l’année par les fêtes, la vie par les sacrements. Au XIXème siècle elle remplit des fonctions sociales importantes : enseignement et hôpitaux principalement et le prêtre est une figure sociale importante au sein de la paroisse. Elle dispose d’une organisation hiérarchique d’encadrement qui ressemble à une administration. Qui assurera ces fonctions sociales ? Pour renvoyer la religion dans la sphère privée, il va donc falloir que la religion et la société elles-mêmes se transforment. Car l’Etat et la société sont dans une relation de dépendance mutuelle et la paix religieuse conditionne la paix sociale qui conditionne la survie de l’Etat. L’Etat ne peut donc pas simplement décréter la laïcité. Or le temps politique n’est pas le même que le temps social et le temps religieux. Les mentalités, les habitudes et les normes de valeur n’évoluent pas selon la même temporalité que les lois. Le temps religieux, très lié à une conception de la société organisée selon un ordre divin est réticent au changement rapide et à l’idée de progrès, symbole de l’hybris de l’homme qui croit pouvoir modeler le monde à sa façon. Ainsi l’adaptation de la religion à la modernité dont participe la laïcité a été longue et douloureuse.

Le XIXème siècle est un moment de tension particulier entre ces différentes temporalités. Il s’agira de comprendre comment la construction de la laïcité en France au XIXème siècle apparaît comme un point de tension entre les évolutions sociales, politiques et religieuses.

Afin de traiter ce sujet nous nous appuierons sur des sources secondaires universitaires et sur quelques sources primaires, lettres, archives départementales, ouvrages d’époque.

De 1789 à 1830, politique et religion sont liés dans l’association du catholicisme et du royalisme opposés au républicanisme et à l’anticléricalisme. La société est encore profondément religieuse et à des changements politiques trop brutaux fait suite un reflux de la laïcisation de l’Etat. La révolution de 1830 coïncide avec une onde anticléricale et la période qui s’ouvre jusqu’à 1870 voit se distendre les liens entre catholicisme et royalisme et libéralisme et anticléricalisme. Un pas est franchi dans l’acceptation de l’idée d’une séparation de l’Etat et de l’Eglise, quand bien même l’appareil symbolique religieux reste très puissant et utilisé par le pouvoir politique. De 1870 à 1905 s’installe progressivement une république moderne, dont les républicains peuvent prendre la tête pas à pas parce que la société s’est suffisamment transformée pour le permettre. Ils lancent un processus de laïcisation de la société qui connaît des réactions mais n’en progresse pas moins.

I. 1789-1830 : républicains anticléricaux et catholiques royalistes

La révolution de 1789 est source d’un changement politique brutal. L’Etat, ses structures et sa politique changent plus vite que la société ne le peut. Ne pouvant faire évoluer la société et la religion plus vite que leur temporalité propre ne le permet, l’Etat oscillera entre une tendance à intégrer la religion et se la subordonner (le Concordat napoléonien vise à faire de l’Eglise de France une Eglise nationale) et une lutte contre le pouvoir religieux pour s’en émanciper (déchristianisation sous la Convention, arrestation du pape en 1809). Après être allée trop vite,

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