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Les risques professionnels

Commentaire d'arrêt : Les risques professionnels. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  20 Décembre 2021  •  Commentaire d'arrêt  •  3 176 Mots (13 Pages)  •  324 Vues

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Séance 6-7 : Les risques professionnels

Commentaire d’arrêt

Emile Cheysson[1] a écrit « malgré les précautions prises, il se produira toujours des accidents, sans que la plupart d’entre eux résultent d’aucune faute (…) ». Un accident peut survenir à n’importe quel moment malgré tous les moyens mis en œuvre pour l’éviter. C’est la raison pour laquelle la perspective juridique de l’accident du travail parait intéressante.  

Il s’agit d’un arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris, Pôle 6, Chambre 12, en date du 17 mai 2019, numéro de pourvoi 16/08787 relatif à la qualification d’un accident survenu dans le cadre de la vie courante au cours d’un déplacement professionnel en accident de travail.

En l’espèce, une société a été informée par la gendarmerie du décès d’un de ses salariés. Lors de la déclaration d’accident du travail, l’employeur a émis sur celle-ci que le « salarié en situation de déplacement professionnel a été retrouvé inconscient dans sa chambre ». Par décision, ce décès a été pris en charge par la Caisse primaire d’assurance maladie au titre de la législation professionnelle.

La société a contesté cette décision devant la Commission de recours amiable, mais celle-ci a rejeté son recours. Ainsi, elle a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins de se voir déclarer inopposable de la décision de prise en charge du décès. Par jugement, ce tribunal a confirmé la décision implicite de rejet de la Commission de recours amiable de la Caisse primaire d’assurance maladie.

La société a interjeté appel du jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale sur les motifs suivants. Dans un premier temps, elle constate que le décès du salarié est survenu alors qu’il avait sciemment interrompu sa mission pour un motif personnel, indépendant de son emploi et après une relation adultérine avec une inconnue. De plus, la société établit qu’il n’était plus en mission pour le compte de son employeur au moment où il a été victime d’un malaise cardiaque ayant entrainé son décès, ainsi, qu’en tout état de cause le malaise cardiaque puis le décès de celui-ci, ne sont pas imputables à son travail, mais bien à l’acte sexuel. En conséquence, la décision de prise en charge de l’accident du travail et du décès doit lui être déclarée inopposable et condamner la Caisse primaire d’assurance maladie au paiement desdites sommes.

La Caisse primaire d’assurance maladie a fait déposer et soutenir oralement par son Conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions. En effet, elle a fait valoir qu’un rapport sexuel relève des actes de la vie courante à l’instar de prendre une douche ou un repas, que la victime bénéficiait de la présomption d’imputabilité, que l’employeur ne rapporte pas la preuve que le salarié a interrompu sa mission pour accomplir un acte totalement étranger à l’objet de celle – ci.

Ainsi, le décès d’un salarié en déplacement professionnel peut-il être considéré comme accident du travail alors même que celui-ci est survenu dans le cadre de sa vie privée ?

La Cour d’appel de Paris confirme la décision du Tribunal des affaires de sécurité sociale qui avait retenu la qualification d’accident du travail le décès survenu suite à un rapport sexuel en déplacement professionnel. En ce sens, il n’est pas contesté que le salarié était en déplacement professionnel. En vertu de l’article L411-1 du Code de la sécurité sociale, le salarié effectuant sa mission a droit à la protection à cet article. Ainsi, pendant tout le temps de la mission qu’il accomplit pour son employeur, il est peu important que l’accident survienne à l’occasion d’un acte professionnel ou d’un acte de la vie courante mais ouvre la possibilité pour l’employeur de rapporter la preuve que le salarié avait interrompu sa mission pour un motif personnel. Il est constant qu’un rapport sexuel est un acte de la vie courante.

De ce fait, nous verrons que pendant tout le temps de la mission que le salarié accomplit pour son employeur, il a droit à la protection des accidents du travail, peu importe que l’accident survienne à l’occasion d’un acte professionnel ou d’un acte de la vie courante (I). Cependant, les juges accordent une dérogation au droit à la protection du salarié durant sa mission (II).

  1. La consécration d’un droit à la protection du salarié durant sa mission

Le revirement de la jurisprudence était nécessaire dans la mesure où il n’était pas facile de déterminer au cours d’un déplacement professionnel ce qui relevait de la vie personnelle du salarié et ce qui relevait du travail en entreprise (A).  La jurisprudence a été amenée à en faire une interprétation très extensive de cette notion (B).

  1. Un abandon du caractère professionnel de l’accident

Le 17 mai 2019, la Cour d’appel a une nouvelle fois eu l’occasion de se prononcer sur la qualification d’un accident survenu dans le cadre de la vie courante au cours d’un déplacement professionnel en accident de travail. En l’espèce, un technicien de sécurité en déplacement professionnel a été retrouvé inanimé à la suite d’un malaise cardiaque ayant entrainé son décès dans une chambre d’hôtel autre que la sienne. La Cour d’appel reconnait qu’il s’agit bien d’un accident de travail en affirmant qu’il est constant que le salarié effectuant une mission à droit à la protection prévue par l’article L.411-1 du Code de la sécurité sociale. En effet, celui-ci dispose qu’« est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise ». Cette définition ne semble pas complète. Les juges ont été amenés à préciser les contours. Les salariés sont amenés à effectuer durant leur mission des actes sans rapport avec leurs fonctions. La Chambre sociale de la Cour de cassation avait, dans les années 1990, opéré à une distinction entre les actes de la vie professionnelle et les actes de la vie courante, ces derniers avaient considérés comme en-dehors du champ d’application des accidents du travail[2]. La difficulté réside dans le fait que certains actes peuvent relever alternativement de la vie professionnelle ou de la vie courante. En conséquence, certains actes de la vie courante restent indissociables de la mission elle-même (par exemple, prendre le repas). Pour apprécier le caractère indissociable ou non, les juges se sont fondés sur la nature de la mission et sur son organisation. Ainsi, les juges ont tenu compte du caractère permanent ou non de la mission. Cette distinction s’avérait particulièrement complexe pour les juges. C’est pourquoi la Cour de cassation a choisi d’étendre la notion d’accident de travail. Au terme d’un revirement en 2001[3], la Chambre sociale a abandonné cette distinction en considérant que le salarié a droit à une protection au titre de l’article L.411-1 du Code de la sécurité sociale « pendant tout le temps de la mission qu'il accomplit pour son employeur, peu important que l'accident survienne à l'occasion d'un acte professionnel ou d'un acte de la vie courante ». Cette position a été réaffirmée par plusieurs arrêts[4]. Dans l’arrêt de 2019, la Cour d’appel la Caisse primaire d’assurance maladie avaient fait valoir qu’un rapport sexuel relevé bien d’un acte de la vie courante, et que cet acte de la vie courante pouvait être constitutif de l’accident du travail.

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