Dissertation sur l'amitié, discussion de la réflexion 83 de La Rochefoucauld

L’amitié est importante pour plusieurs raisons, par exemple, pour éviter la solitude, échanger des idées ou des sentiments. Plusieurs auteurs ont d’ailleurs décidé de traiter de ce sujet, tel que La Rochefoucauld. D’après lui, l’amitié n’est qu’une forme d’échange dont chacun tire un intérêt personnel. Il dit d’ailleurs dans ses Réflexions ou Sentences et Maximes morales : « Ce que les hommes ont nommé amitié n’est qu’une société, qu’un ménagement réciproque d’intérêts, et qu’un échange de bons offices ; ce n’est enfin qu’un commerce où l’amour-propre se propose toujours quelque chose à gagner. » (maxime 83). Pour autant, l’amitié n’a-t-elle qu’une fonction « utile » ? Nous verrons dans un premier temps que dans la plupart des cas, c’est en effet la vérité. Cependant, nous montrerons ensuite que dans le cas, moins fréquent, de l’amitié véritable cela dépasse cette idée.

Les amitiés ordinaires sont souvent fondées sur des services, de l’aide ou l’agrément que l’un et l’autre peuvent s’apporter. L’homme a tellement de besoins à satisfaire qu’il est normal de faire appel aux autres.

Tout d’abord, on peut parfois se lier à quelqu’un dans le but, peut-être inconscient, d’en obtenir un bien ou pour améliorer notre position dans la société. Ainsi La Rochefoucauld dans son recueil Réflexions ou Sentences et Maximes morales cherche à démontrer avec plusieurs réflexions que toutes nos actions et passions sont dues à l’amour-propre. La réflexion 85 « Nous ne nous donnons pas à eux pour le bien que nous leur voulons faire, mais pour celui que nous en voulons recevoir. » montre effectivement que cette amitié est en quelque sorte égoïste et qu’elle ne s’est nouée que dans l’objectif d’en obtenir quelque chose. Montaigne lui aussi soutient cet argument dans son essai De l’amitié lorsqu’il compare l’amitié parfaite aux amitiés ordinaires. Il affirme que « ce que nous appelons ordinairement amis et amitiés, ce ne sont qu’accointances et familiarités nouées par quelque occasion ou commodité ». Cela révèle bien l’utilité, la commodité des amitiés ordinaires. On retrouve aussi ce « commerce » de services dans la fable L’ours et l’amateur des jardins de La Fontaine où l’Homme en échange d’offrir sa compagnie à l’Ours, n’a plus besoin de chasser et n’est plus dérangé par les mouches pendant son sommeil.

Ensuite, une amitié peut être également motivée par le plaisir que l’un et l’autre vont se procurer. Cicéron dit par exemple dans Lélius ou l’Amitié, un dialogue sur l’amitié, que « l’amitié commune ou médiocre […] a de l’agrément ». L’amitié ordinaire apporte donc un certain plaisir. Dans L’Ingénu de Voltaire, le personnage de L’Ingénu dit qu’il a appris le français, une langue qu’il avait envie d’apprendre, grâce à un ami « - Un Français […] pour qui je conçus beaucoup d’amitié, m’enseigna sa langue ; j’apprends très vite ce que je veux apprendre ». Cet enrichissement a donc été possible grâce à un ami ordinaire.

Certes une amitié ordinaire peut être qu’un échange utile, cependant l’amitié véritable résulte plutôt de sentiments réciproques.

En effet, l’amitié véritable est beaucoup plus qu’un simple commerce. Deux

...