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Commentaire d'arrêt de la 3ème chambre civile de la cour de Cassation le 7 juin 2018

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Par   •  15 Octobre 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  2 054 Mots (9 Pages)  •  3 014 Vues

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Commentaire d’arrêt

L’arrêt présentement soumis à notre étude fut rendu par la 3ème chambre civile de la cour de Cassation le 7 juin 2018 et oppose la société L’aigle blanc au syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier Grand Roc. Il vient apporter des précisions sur la position de la juridiction suprême concernant la libre création de droit réels, notamment sur la possibilité de créer des droits réels sui generis perpétuels.

En l’espèce, la SCI l’Aigle Blanc a acquis en 2004 divers lots à vocation commerciale dont l’un à usage de piscine faisant partie d’un immeuble de copropriété. Une convention, additive au règlement de la copropriété, signée par les vendeurs du lot le 20 aout 1970 les engageait à assurer les frais de fonctionnement de la piscine. Il en résulte que la SCI, propriétaire du bien, fut condamnée à procéder à l’entretien et à l’exploitation de la piscine. La SCI alors assigné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Grand Roc en constatation de l'expiration des effets de cette convention à compter du 20 août 2000.

La SCI conteste l’arrêt rendu selon le moyen que les droits réels conférant le bénéfice de jouissance spéciale d’un bien ne peuvent être perpétuels et sont voués à s’éteindre après 30 ans si les parties ne leur ont pas attribué de limite de temps, conformément aux articles 619,625 et 1210 du code civil.

La Cour d’appel de Chambéry a débouté la société de sa demande par un arrêt du 21 mars 2017 en retenant que, certes les droits de jouissance de la piscine ne sont pas perpétuels mais ils ne peuvent toutefois pas être soumis à la limite de 30 ans imposée par l’article 619 du fait de leur qualité de droits sui generis attaché à la copropriété et ayant vocation à s’appliquer jusqu’à la modification du règlement de celle-ci.

La Cour de Cassation a donc du tranché sur la possible création de droit sui generis dérogeant au régime légal du droit d’usage. En l’espèce, il résultait du règlement de la copropriété que le droit de jouissance spéciale accordé n’était pas limité dans le temps, la question était donc de déterminer si le droit sui generis crée pouvait être perpétuel.

La Cour a estimé que les droits litigieux, constituant une charge imposée à certains lots pour l’usage de lots appartenant à d’autres propriétaires, étaient des droits sui generis pouvant être qualifiés de perpétuels puisqu’ils trouvent leur source dans le règlement de la copropriété. Du fait de l’attachement des droits litigieux au règlement de la copropriété, les parties ont exprimé leur volonté de créer des droits sui generis attachés perpétuellement au lot des copropriétaires. Ainsi, la Cour a admis la création d’un droit réel sus generis perpétuel, rejetant le pourvoi.

  1. La prohibition de la perpétuité de l’engagement.

Le régime légal du droit d’usus fruit est hostile à la perpétuité (I) et la jurisprudence semble assimiler le droit de jouissance spécial au droit d’usus fruit (II).

  1. Un régime légal hostile

L’arrêt commence par réaffirmer le principe de non perpétuité des engagements énoncé à l’article 1210 du code civil : « Les engagements perpétuels sont prohibés. Chaque contractant peut y mettre fin dans les conditions prévues pour le contrat à durée indéterminée. » Ainsi, un droit de jouissance spécial est voué à s’éteindre s’il n’est pas délimité dans le temps, au même titre que l’usus fruit ou encore le droit d’usage. Le droit de jouissance spécial est un bien réel, il constitue un rapport juridique entre son titulaire, en l’espèce la copropriété, et le bien auquel se rattache le droit, en l’espèce la piscine. Ce rapport juridique est un lien direct permettant au titulaire du droit de librement tirer avantage du bien.

Le régime des droits réels comme l’usus fruit et le droit d’usage est strictement limité dans le temps par le code civil, de sorte à ce qu’ils ne puissent produire d’effet pendant plus de 30 ans, comme c’est énoncé aux article 619 et 625 du code civil. Par le passé, la Cour de Cassation a pu ramener à 30 ans la durée d’un droit de jouissance qui prétendait dépasser cette limite de temps, notamment par l’arrêt de la Cour de Cassation du 28 janvier 2015. Ainsi, la Cour a était de nouveau amené à se prononcer sur le régime applicable aux droit de jouissance spéciale.

  1. L’assimilation du droit de jouissance spécial au droit d’usus fruit

Par la décision étudiée, la Cour admet la création d’un droit réel de jouissance spéciale mais celui-ci « ne peut être perpétuel et s'éteint, s'il n'est pas limité dans le temps par la volonté des parties, dans les conditions prévues par les articles 619 et 625 du code civil ». Ainsi, la Cour semble refuser qu’un droit réel de jouissance spécial puisse déroger au régime légal et s’appliquer de manière perpétuelle. Elle avait déjà pris cette position dans l’arrêt du 28 janvier 2015 par lequel elle avait décidé que si la durée réelle de la jouissance spéciale n’est pas déterminée par les parties il ne peut cependant pas être perpétuel, Dès lors la cour sous entend que ce droit spécial est soumis au régime de l’usus fruit c'est-à-dire qu’il est limité à 30 ans. Cet arrêt semble remettre en cause la faculté de créer des droits spéciaux pouvant déroger au régime légal. Bien qu’il soit compréhensible que la règle de l’article 1210 ait pour but de protéger les justiciables, elle demeure contraignante et restreint la liberté de création de droits réels puisque ces derniers semblent voués à être rattaché au régime légal.                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                      

Ainsi, la Cour a du procéder à la qualification du bien litigieux. Celle-ci présente des difficultés évidentes du fait de son origine et du contexte contractuel auquel le droit litigieux est rattaché. Il résulte de la qualification que le droit réel crée par la convention du 20 août 1970 « valant additif » au règlement de copropriété est un droit sui generis.

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