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Arrêt «Mme Perreux » rendu le 30 octobre 2009 par le Conseil d'État

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Par   •  8 Avril 2013  •  1 870 Mots (8 Pages)  •  2 377 Vues

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Arrêt «Mme Perreux » rendu le 30 octobre 2009 par le Conseil d'État.

Madame Perreux, magistrate mais également présidente du syndicat des magistrats, s'était portée candidate à un poste de chargée de formation à l'Ecole Nationale de la magistrature. Cette nomination lui a été refusée, l'arrêté du 29 août 2006 portant nomination à sa place d'une autre magistrate à compter du 1er septembre 2006.

Par une requête en date du 24 octobre 2006, Madame Perreux demande au Conseil d'Etat l'annulation de cet arrêté, en invoquant l'article 10 de la directive du 27 novembre 2000 qui aménage les règles de preuve en matière de discrimination dont le délai de transposition expirait le 2 décembre 2003, soit antérieurement à l'arrêté litigieux.

Madame Perreux peut-elle donc invoquer directement une directive communautaire à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir (REP) contre une décision individuelle ?

Le Conseil d'Etat affirme qu'à défaut de transposition dans les délais impartis, un requérant peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir (REP) contre une décision individuelle, demander l'annulation d'un règlement incompatible avec une directive. De plus, le Conseil d'Etat ne va pas reconnaître l'effet direct des dispositions de l'article 10 de la directive invoquée par la requérante devant la juridiction administrative, estimant que les dispositions de la directive du 27 novembre 2000 n'étaient pas inconditionnelles.

Par sa décision en date du 30 octobre 2009, le Conseil d'Etat affirme donc qu'il est possible de confronter une décision individuelle directement à une directive dès lors qu'elle n'a pas été transposée dans les délais et que la décision individuelle a été prise après l'expiration du délai imparti de transposition mais uniquement lorsque les dispositions de la directive sont précises et inconditionnelles.

Le Conseil d'Etat exerce donc un revirement de jurisprudence vis-à-vis de l'arrêt du 22 décembre 1978 « Cohn-Bendit » en reconnaissant l'effet direct des dispositions inconditionnelles et précises des directives lorsque le délai de transposition est passé et en définissant des modalités spécifiques d'administration de la preuve lorsqu'il est allégué qu'une décision est empreinte de discrimination.

Pour vérifier si l'on peut invoquer une directive communautaire contre une décision individuelle, le juge reconnaît tout d'abord l'effet direct des dispositions inconditionnelles et précises de la directive dont le délai de transposition est passé (I), puis il détermine les moyens de preuves du juge administratif pour prouver la discrimination (II).

I/. La reconnaissance de l'effet direct des dispositions inconditionnelles et précises d'une directive dont le délai de transposition est passé.

Il convient donc de préciser tout d'abord le contexte juridique ayant conduit à ce revirement de jurisprudence (A), puis de préciser en quoi consiste le revirement effectué par le Conseil d'Etat (B).

A).Le contexte juridique ayant conduit au revirement de jurisprudence.

Le principe posé par le Conseil d'Etat dans la jurisprudence « Cohn-Bendit », était le suivant : « les directives ne sauraient être invoquées par les ressortissants de ces Etats à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif individuel ».Ainsi un justiciable ne pouvait-il, à l'encontre d'un recours contre une décision administrative individuelle, invoquer directement une disposition d'une directive, même si l'Etat avait été défaillant dans son obligation de transposition. La directive était en effet considérée comme n'ayant pas d'effet direct sur la situation d'une personne individuelle puisqu'elle posait des obligations s'appliquant aux seuls Etats.

Cette jurisprudence est restée longuement constante, le Conseil d'Etat n'y ayant jamais renoncé. Néanmoins, la portée de cette jurisprudence a été atténuée en reconnaissant la possibilité d'invoquer, par la voie de l'exception, la contrariété de dispositions de droit interne qui servent de fondement à l'acte individuel, à une directive suffisamment précise, y compris si l'incompatibilité résulte d'une loi ne comportant pas la disposition exigée par la directive (CE Ass., 30 octobre 1996, Cabinet Revert et Badelon) et même si s'interpose une « règle nationale applicable » (CE Ass, 6 février 1998, Tête).

La juridiction administrative confirmait, par le maintien de sa jurisprudence, sa réputation de « résistante ».

En effet, la jurisprudence « Cohn-Bendit » apparaissait peu compatible avec les exigences de la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) qui a consacré « l'effet direct vertical ascendant » des directives (arrêt de la CJCE, 4 décembre 1974).

En effet, depuis 1974, la CJCE considérait que si le délai de transposition d'une directive en droit interne était expiré, l'Etat ne respectait pas ses engagements, et à titre de sanction, la CJCE reconnaissait le droit de tout justiciable d'invoquer contre l'Etat les dispositions suffisamment claires, précises et inconditionnelles d'une directive.

En France, le Conseil Constitutionnel et la Cour de Cassation ont également rappelé que certaines directives pouvaient comporter des « dispositions inconditionnelles et précises », (Cons. Const. 10 juin 2004, loi pour la confiance dans l'économie numérique et Cass., Ch. Com., 7 juin 2006).

Toutefois le revirement opéré par le Conseil d'Etat est quelque peu différent.

B). Le revirement opéré par le Conseil d'Etat

Très certainement conscient de la frontière séparant sa jurisprudence de celle des juridictions voisines, le Conseil d'Etat a préparé son revirement.

Dans un arrêt d'assemblée du 8 février 2007, Arcelor-Atlantique, le Conseil d'Etat rappele en effet que « eu égard aux dispositions de l'article 88-1 de la Constitution, selon lesquelles la République participe aux Communautés européennes et à l'Union européenne, constituées d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences, dont découle une obligation

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