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Marivaux, L'île des esclaves

Dissertation : Marivaux, L'île des esclaves. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  16 Décembre 2021  •  Dissertation  •  3 727 Mots (15 Pages)  •  1 813 Vues

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Dissertation

Marivaux, L'île des esclaves

Benjamin Sodoyer

Le marquis d'agenson écrit à propos de cette pièce : « rien de plus moral, rien de plus sermonnaire que cette pièce, c'est le véritable castigat ridendo mores »

       La comédie a pour but de « corriger les mœurs par le rire » (Castigat ridendo mores, dit l’adage latin). Pour Molière, il s’agit de « corriger les hommes en les divertissant »
Dans sa Préface du Tartuffe, Molière a repris l'antique adage de la comédie : Castigat ridendo mores, et le traduit ainsi :
« Si l'emploi de la comédie est de corriger les vices des hommes, je ne vois pas par quelle raison il y en aura de privilégiés. Celui-ci est, dans l'État, d'une conséquence bien plus dangereuse que tous les autres ; et nous avons vu que le théâtre a une grande vertu pour la correction. Les plus beaux traits d'une sérieuse morale sont moins puissants, le plus souvent, que ceux de la satire ; et rien ne reprend mieux la plupart des hommes que la peinture de leurs défauts. C'est une grande atteinte aux vices, que de les exposer à la risée de tout le monde. On souffre aisément des répréhensions ; mais on ne souffre point la raillerie. On veut bien être méchant ; mais on ne veut point être ridicule. »En effet, c’est la traduction comique de la catharsis.L’humour et l’ironie sont des armes de dénonciation efficaces, elles ridiculisent l’adversaire, permettent de contourner la censure et d’amuser le lecteur, l’amenant ainsi plus facilement à la réflexion.
 L’Île des Esclaves de Marivaux s’inscrit dans cette lignée : Celle des œuvres morales qui s’attachent à présenter des fictions moralisatrices.Sa date de parution s'inscrit aussi quand l’époque est à la contestation, la société est en pleine mutation. Les philosophes des Lumières réfléchissent aux fondements de la société. Les salons se multiplient (Marivaux fréquente ceux de Madame de Tessin et de Madame Lambert) et sont des lieux de réflexions, d’échanges et de remise en cause. On y parle des problème des colonies, celui de l’esclavage,  naissent les idées d’affranchissement des dogmes religieux et moraux. Marivaux à travers sa comédie l'île des esclaves nous dévoile plusieurs de ses sujets .
     Ainsi, nous nous demanderons en quoi, cette comédie, répond à la formule "Castigat ridendo mores" c'est à dire comment elle corrige les moeurs par le rire.

Cette célèbre expression latine, peinte sur la toile du Théâtre italien, nous fournit le plan de notre étude : Qui et comment cette pièce prétend-elle corriger … et de quoi? Nous verrons dans un premier temps la réforme des maîtres puis celle des esclaves.

En deuxième partie en quoi est-elle une comédie? Nous y analyserons les comiques de situations ainsi que le personnage d'Arlequin.

Les réponses à ces questions nous amèneront à nous interroger sur l'ambiguïté de l'œuvre.

      La réforme des maîtres est le principal sujet de l'oeuvre. L'intention est clairement affirmée par Trivelin dès la deuxième scène :

TRIVELIN ~ [. .. ] Nous ne nous vengeons plus de vous, nous vous corrigeons; ce n'est plus votre vie que nous poursuivons, c'est la barbarie de vos cœurs que nous voulons détruire; nous vous jetons dans  l'esclavage pour vous rendre sensibles aux maux qu'on y éprouve; nous vous humilions, afin que, nous trouvant superbes, vous vous reprochiez de l'avoir été. 

Plusieurs fois, Trivelin rappellera l'objectif de l'épreuve infligée aux maîtres : moins punir qu'amender, corriger et instruire.  Il utilisera même une métaphore pour expliquer le but attendu :

TRIVELIN - [ ... ] Vous voilà en mauvais état, nous entreprenons de vous guérir; vous êtes moins nos esclaves que nos malades, et nous ne prenons que trois ans pour vous rendre sains. [. .. ] ARLEQUIN - Et le tout gratis, sans purgation ni saignée. Peut-on de la santé à meilleur compte? L'épreuve est ici assimilée à une cure de laquelle on attend un rétablissement... moral. Le mal est nommé : la « superbe », l'orgueil, l'inhumanité; le traitement a pour but admis de tous d'extirper ce mal; reste à ajuster la thérapie.

Trivelin  assimile l'épreuve de l'esclavage sur l'île à un« cours d'humanité»

La stratégie est elle aussi nettement énoncée. Nous vous humilions, telle est la méthode appliquée par les « Castigat ridendo mores »  insulaires aux maîtres naufragés. la première étape du traitement est dirigée par Trivelin (scènes 2 à 5); la seconde phase est assurée par les deux serviteurs (scènes 6 à 10).

Scènes 2 à 5 Quels discours! Faut-il que vous m'exposiez à les entendre?. Ces mots d'Euphrosine résument bien l'épreuve à laquelle les insulaires soumettent les maîtres : il faut d'abord que les coupables avouent et reconnaissent leurs torts.

TRIVELIN, à Cléanthis - Venons maintenant à l'examen de son caractère : il est nécessaire que vous m'en donniez un portrait, qui se doit faire devant la personne qu'on peint, afin qu'elle se connaisse, qu'elle rougisse de ses ridicules, si elle en a, et qu'elle se corrige. Scène 3

 l'humiliation est encore plus grande car ils doivent l'exposer à leurs serviteurs

Si il « n'avoue » pas il n'est pas question de salut, ou de rémission :

TRIVELIN - Si vous en convenez, cela contribuera à rendre votre condition meilleure; je ne vous en dis  pas davantage ... On espérera que vous étant reconnue, vous abjurerez un jour toutes ces folies [. . .]. Si au contraire vous ne convenez pas de ce qu'elle a dit, on vous regardera comme incorrigible, et cela reculera votre délivrance. Scène 4

 Par quatre fois au cours de la scène, le terme « convenir » est prononcé. Il convient de noter ici la solennité de la demande officielle, juridique, de Trivelin : face à la mauvaise foi d'Euphrosine, il réitère sa formule avec force, et à la fin avec impatience (Hâtez-vous; j'ai autre chose à faire).

à la scène 6 Trivelin disparu, les deux esclaves prennent en quelque sorte son relais. Après la satire verbale commandée par Trivelin, le spectacle « bouffon » que donnent à voir aux anciens maîtres Cléanthis et Arlequin « Nous sommes aussi bouffons que nos patrons. »  est plus humiliant encore, plus douloureux,  Arlequin et Cléanthis, par la volonté de Marivaux, imaginent un jeu plus cruel encore : l'un va déclarer son amour à Euphrosine, l'autre à Iphicrate.  Scène 8

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