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Chamoiseau

Commentaire d'arrêt : Chamoiseau. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  30 Avril 2020  •  Commentaire d'arrêt  •  1 374 Mots (6 Pages)  •  415 Vues

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Nous avons décidé de nous intéresser au rôle et à la signification des noms et surnoms dans Antan d’enfance de Patrick Chamoiseau. À première vue, ceci peut sembler être un détail insignifiant, mais en réalité les noms et surnoms revêtent une puissante signification symbolique. C’est précisément la signification symbolique de ces noms que nous allons analyser tout au long de ce devoir. Quelle est l’utilité des noms et surnoms dans Antan d’enfance ? Quels messages et idées défend-ils ? Comment Chamoiseau use-t-ils des noms et surnoms pour défendre une position politique forte ? Voilà les intégrations qui guideront notre réflexion. Pour y répondre, après avoir étudié la symbolique des noms lors de l’histoire coloniale, nous verrons comment dans Antan d’enfance Chamoiseau fait des noms et des surnoms un outil politique pour se réapporier l’histoire coloniale mais aussi pour défendre la mémoire de ses ancêtres esclaves.

Tout d’abord, avant de parler de l’œuvre Antan d’enfance, un survol historique du nom propre pendant l’époque coloniale est nécessaire afin de mieux rendre compte de l’importance du patronyme et du surnom dans le contexte antillais. Dès leur arrivée en Amérique, les esclaves africains ont été dépouillés de leur nom propre, et par conséquent, ont perdu leur identité et tout rapport avec leur pays d’origine. Dans la société esclavagiste, les colonisateurs ont donc enlevé le nom originel des esclaves africains, puis ils leur ont redonné un simple prénom (souvent chrétien) de substitution. Par ailleurs, comme l’a montré Lapierre1, beaucoup des noms donnés aux escales étaient similaire à tel point qu’il était devenu difficile de distinguer les esclaves les uns des autres.

Le geste d’enlever le nom et de renommer l’esclave selon une autre généalogie montre la puissance symbolique et réelle des colonisateurs. Il s’agissait de la première étape pour priver les Africains de leur identité représentée surtout par le nom. L’effacement du nom propre et son remplacement par un prénom démontrent que les Français ont évidemment gommé le patronyme et tous les liens des esclaves transbordés avec le pays d’origine. Le régime esclavagiste supposait que

1 LAPIERRE, Nicole. Changer de nom, Paris : Gallimard, 2006 [1995].

les Africains soient vendus comme neufs, intacts et sans aucune trace de leur passé d’avant leur arrivée sur les terres occidentales. Cette rupture avec le pays natal dont l’effacement du nom est le symbole est absolument fondamentale pour mettre en place la création d’une société d’esclaves anonymes et faibles. Ainsi, en interdisant aux esclaves de porter un nom patronymique, le système colonial a brisé le rapport entre les Africains et leurs descendants, et ainsi privé de leur communauté passé, les esclaves se sentaient plus seuls, comme isolés, atomisés et deviennent donc des proies plus faciles à dominer pour le régime colonial.

Ensuite, pour Chamoiseau, les surnoms sont généralement positifs parce qu’ils représentent une sorte de rejet du patronyme qui a été imposé pendant l’époque coloniale, même si ces surnoms ont pu être péjoratifs à l’origine. En outre, les surnoms sont parfois plus proches de l’identité de l’individu que les patronymes arbitrairement attribués par la société dominante. L’effacement des patronymes dans Antan d’enfance devient ainsi une façon, grâce à la liberté de l’écriture, de se révolter contre la société dominante remontant à l’époque coloniale. Chamoiseau crée des surnoms dans le but de renégocier l’identité des descendants des esclaves et afin de se débarrasser du patronyme qui est effectivement une imposition, une imposture. L’absence des patronymes dans son récit d’enfance est sans aucun doute une décision consciente de la part de l’auteur pour signaler le rejet des noms de famille provenant de la colonisation.

L’attribution des patronymes arbitraires démontre que les colonisateurs ont réussi à oblitérer le lien de filiation généalogique entre les Africains et leurs descendants tout en empêchant les descendants antillais de reconnaitre leurs racines. Par conséquent, l’absence décisive des patronymes à l’intérieur d’Antan d’enfance est révélatrice, car l’omission des noms de famille signale que Chamoiseau rejette la valeur identitaire du faux patronyme qui lui a été transmis. L’écrivain construit donc son propre personnage et sa propre histoire autour de l’utilisation du surnom « le négrillon » et l’invention

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