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La Bruyère, « De la cour » Livre VIII remarque 74 (Les Caractères, 1696)

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Par   •  4 Mars 2024  •  Analyse sectorielle  •  3 430 Mots (14 Pages)  •  66 Vues

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Lecture linéaire n°11 : La Bruyère, « De la cour » Livre VIII remarque 74 (Les Caractères, 1696)

 

[74]- L’on parle d’une région où les vieillards sont galants, polis et civils; les jeunes gens au contraire, durs, féroces, sans mœurs ni politesse : ils se trouvent affranchis de la passion des femmes dans un âge où l’on commence ailleurs à la sentir; ils leur préfèrent des repas, des viandes, et des amours ridicules. Celui-là chez eux est sobre et modéré, qui ne s’enivre que de vin : l’usage trop fréquent  qu’ils en ont fait le leur a rendu insipide; ils cherchent à réveiller leur goût déjà éteint par des eaux-de-vie, et par toutes les liqueurs les plus violentes; il ne manque à leur débauche que de boire de l’eau-forte. Les femmes du pays précipitent le déclin de leur beauté par des artifices qu’elles croient servir à les rendre belles : leur coutume est de peindre leurs lèvres, leurs joues, leurs sourcils et leurs épaules, qu’elles étalent avec leur gorge, leurs bras et leurs oreilles, comme si elles craignaient de cacher l’endroit par où elles pourraient plaire, ou de ne pas se montrer assez. Ceux qui habitent cette contrée ont une physionomie qui n’est pas nette, mais confuse, embarrassée dans une épaisseur de cheveux étrangers, qu’ils préfèrent aux naturels et dont ils font un long tissu pour couvrir leur tête: il descend à la moitié du corps, change les traits, et empêche qu’on ne connaisse les hommes à leur visage. Ces peuples d’ailleurs ont leur Dieu et leur roi : les grands de la nation s’assemblent tous les jours, à une certaine heure, dans un temple qu’ils nomment église; il y a au fond de ce temple un autel consacré à leur Dieu, où un prêtre célèbre des mystères qu’ils appellent saints, sacrés et redoutables; les grands forment un vaste cercle au pied de cet autel, et paraissent debout, le dos tourné directement au prêtre et aux saints mystères, et les faces élevées vers leur roi, que l’on voit à genoux sur une tribune, et à qui ils semblent avoir tout l’esprit et tout le cœur appliqués. On ne laisse pas de voir dans cet usage une espèce de subordination; car ce peuple paraît adorer le prince, et le prince adorer Dieu. Les gens du pays le nomment ***; il est à quelque quarante-huit degrés d’élévation du pôle, et à plus d’onze cents lieues de mer des Iroquois et des Hurons.

Mouvement / progression :

Lignes 1-7 : portrait moral des (jeunes) hommes de cette « région »

Ligne 7-15 : portrait physiques (des femmes puis des hommes)

Lignes 15-21 : le rapport de ces habitants à la religion

Lignes 23-24: conclusion : découverte du pays

Lecture linéaire n°11 : La Bruyère, « De la cour » remarque 74 (Les Caractères, 1696)

Amorce possible :

Jean de La Bruyère (1645-1696) est un auteur emblématique du Classicisme. Il n‘est connu que pour une seule œuvre, ses Caractères, qu’il n’a cessé, depuis leur première parution en mars 1688, d’améliorer en augmentant les différentes éditions (entre 1688 et 1696 pas moins de neuf éditions se succèdent), repoussant toujours la parution de sa deuxième œuvre, Dialogue sur le Quiétisme, le laissant inachevé par sa mort brutale.

Amorce possible :

L’œuvre majeure de Jean de La Bruyère est sans nul doute  Les Caractères, qui ont pour objectif de décrire la société de cette deuxième moitié du XVII° siècle. Le recueil est organisé en chapitres et présente la hiérarchie sociale de son temps, avec une progressivité évidente : aux « Bourgeois » succède « la Cour » (dont nous étudierons la remarque 74), puis les « Grands » et enfin le « Souverain ». Dans ce recueil on trouve des réflexions, des maximes, mais aussi des portraits. On assiste à des portraits en actes, c’est à dire à travers les actions et les habitudes des personnages décrits.

CONTEXTUALISATION : Le regard de La Bruyère est assez pessimiste, comme nous allons le voir dans cette remarque 74 du livre « De la cour ».

ANNONCE DES MOUVEMENTS : Ce texte peut être découpé en quatre parties : des lignes 1 à 7, l’auteur dresse un portrait moral d’hommes d’une « région » dont on ne connait pas le nom, puis nous découvrons les portraits physiques de ces habitants – d’abord les femmes, puis les hommes, aux lignes 7 à 15. Ensuite, des lignes 15 à 23, le portraitiste présente le rapport de ces habitants à la religion. Enfin, les dernières lignes forment une conclusion et nous permet de connaître, ou plutôt de deviner le nom de ce pays présenté ironiquement comme une utopie. Cette étude de la remarque 74 nous conduira à nous poser la question suivante :

PROBLEMATIQUES POSSIBLES :

Quel regard le portraitiste porte-t-il sur ses contemporains ? En quoi cette remarque reflète le Théâtrum Mundi ?

1er mouvement : le portrait moral des hommes / Leurs habitudes (lignes 1 à 7)

ARGUMENT : Le portraitiste met en place une apparente distance ou impartialité dans sa description. Il se place comme l’observateur privilégier d’un payslointain et méconnu de ses contemporains toutefois son regard aiguisé soulève une critique acerbe dés les premiers mots avec….

……………l’emploi d’un pronom indéfini : « L’on » l’article est une résurgence de la forme originelle du pronom indéfini, qui était en ancien français le substantif désignant l’homme. Le narrateur s’efface derrière ce pronom, mais cela souligne son regard aiguisé.

Le locuteur a pour objectif de présenter un lieu, qui reste mystérieux : c’est le rôle du déterminant indéfini « une région » (l. 1), qui s’oppose à l’adverbe « ailleurs » employé à la ligne 3.

 Chaque lecteur est invité à trouver ce lieu, grâce à la présentation de ses habitants, dans les lignes suivantes, par l’intermédiaire d’une PSR qui sert de périphrase « où les vieillards sont galants… »

ARGUMENT : La Bruyère dénonce de cette façon des comportements qu’il semble parfaitement connaître, et va développer cette critique dans la suite du texte, qui semble tout d’abord proposer une explication, une justification à ces attitudes jugées indignes.

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