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Fiche de lecture Les récits de la Kolyma

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Par   •  8 Mai 2019  •  Commentaire d'oeuvre  •  3 163 Mots (13 Pages)  •  1 064 Vues

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Fiche de Lecture, Les récits de la Kolyma de Varlam Chalamov

        

        « Kolyma, Kolyma, ô planète enchantée /  l’hiver a douze mois, tout le reste c'est l’été ». C’est une des maximes que les détenus utilisaient pour définir la Kolyma.

        

        Les récits de la Kolyma de Varlam Tikhonovitch Chalamov est un recueil de nouvelles qui illustre son expérience dans les goulags de l’Union Soviétique, essentiellement celui de la Kolyma. Il se trouve dans l'extrême orient de la Sibérie, où la température descend parfois à moins 50 °C, le froid, la faim et l'épuisement dus aux travaux forcés tuaient en masse ceux qui étaient déportés dans ce goulag, situé à près de 10 000 kilomètres de Moscou. Entre 1937 et 1953, près de 3 millions de personnes (des Soviétiques, surtout, mais aussi des prisonniers de guerre allemands) y sont mortes à la tâche. La Kolyma n'était pas un "camp", à proprement parler, mais une multitude d'établissements disséminés dans la taïga, où détenus politiques et de droit commun travaillaient ensemble dans d'innombrables mines d'or. Selon Robert Conquest, historien britannique, le taux de mortalité des condamnés atteignait 30 % la première année et s'approchait de 100 %, la deuxième... 

        Mais Chalamov évoque aussi brièvement ses passages en prison, au camp de la Vichera et enfin son retour à Moscou. Cent quarante trois nouvelles, qui s’imprègnent des événements que l’auteur a vécu et s’enrichissent par la force de son écriture, nous transportent dans l’horreur des camps. Il maintient la finesse du tracé poétique tout au long de son oeuvre, la mêlant à des faits historiques importants pour comprendre la vie au Goulag. Il a connu l’horreur de la vie dans les camps aurifères du grand nord de la Sibérie entre les années trente et cinquante.

        Chalamov est né dans une famille aisée, ruinée par la révolution de 1917. Après ses études secondaires, en 1924, il fuit la misère et trouve du travail près de Moscou. Il devient ouvrier en 1926 et accède à l’université. Il commence à fréquenter les bibliothèques et entre dans les cercles littéraires de son école. Il commence à écrire.

        En 1929, il est arrêté dans une imprimerie clandestine qui diffusait le Testament de Lénine. Il passe deux ans dans un camp de travail à Vichéra, nord de l’Oural, où il rencontre sa femme.

        En 1937, Varlam Chalamov est condamné à cinq ans de bagne pour « activité contre-révolutionnaire trotskiste ». Il est envoyé en Kolyma, dans cet Extrême-Orient soviétique. Dans des conditions inhumaines, il travaille dans différentes mines, d'or en particulier. Il n'est en fait libéré de sa peine qu'en 1951, mais reste assigné à résidence à Kolyma. Il écrit de la poésie.

        L’auteur fait preuve d’un travail de mémoire incroyable il rédige ces récits de 1954 à 1973 et offre à son lecteur un panel impressionnant de connaissances allant des anecdotes à des aspects importants et pourtant méconnus des camps en URSS.

        Après dix sept années d’enferment, Chalamov acquiert assez d’expérience pour rédiger l’un des plus éminents ouvrages de référence sur le goulag.

        

        Un des aspects bien connus de l’univers concentrationnaire et pourtant très bien exploité ici c’est la faim. Dans de nombreux récits, Chalamov montre bien que la nourriture est, dans le camp, un met rare, précieux. Dans le récit « Cherry-Brandy » l’auteur nous parle de la distribution du pain sur des « plateaux en contre-plaqué ». Les rations sont si petites qu’il est dur d’être raisonnable et c’est pour ça qu’il explique que les premiers jours sont les plus difficiles et même si ces  « voisins essayèrent de l’arrêter »,  il avala d’une traite le pain sans en laisser une miette pour plus tard. Les rations sont distribuées normalement une fois par jour mais Chalamov nuance ce fait. Dans le camp les portions sont minimes et apportent très peu de force pour le travail. L’auteur montre d’ailleurs que beaucoup s’écroulent sur les chemins enneigés pour être laissés à leur compte après qu’on leur ait pris leur manteau.

        Pour se nourrir, on trouve dans les camps des magasins d’alimentation. Ils permettent, aux prisonniers condamnés pour des délits de droit commun et les voleurs récidivistes considérés comme les « amis du peuple », d’acheter de la nourriture comme du pain ou encore des conserves, comme celle de lait concentré sur laquelle il consacre tout un récit. En effet, celui ci permet de comprendre qu’il y a une hiérarchie dans le camp et que même les prisonniers sont divisés entre eux ce qui renforce l’individualité. Mais pour survivre au camp, et Chalamov le dit lui même, il faut s’entraider. Il rend hommage à la fin de son récit sur « le Gant » à quelques camarades sans qui il n’aurait jamais pu s’en sortir.                 

J’ai par ailleurs un arrière grand père qui a survécu à un camp soviétique à l’ouest de Moscou, pas loin de la Prusse et même si les conditions ne devaient pas être les mêmes qu’à la Kolyma, il écrira à sa femme qu’ils n’auraient jamais pu survivre à l’isolement et au travail du camp sans l’aide précieuse de quelques prisonniers russes à ses côtés. Il y resta enfermé quatre ans.

        En outre la maladie est également un aspect indispensable à aborder pour tenter de comprendre le système concentrationnaire soviétique. Après avoir quitté la prison, le personnage d’Andreïev, du récit « la Quarantaine », arrive dans un camp de transit. Après avoir passé « une cour entourée des dix rangées réglementaires de fil de fer barbelé, avec un portillon devant lequel une sentinelle en pelisse, armée d’un fusil, faisait les cents pas, il arrive dans une cour » avec un gigantesque entrepôt.

        Les conditions de vie sont horribles. Chalamov souligne les effluves de corps sales, de vêtements moisis et d’âcre sueur humaine. Il décrit l’entassement d’un millier de personnes dans des châlits en bois s’étalant à perte de vue sur quatre étages. L’auteur dit qu’ils avaient été construit pour durer une éternité ce qui étonnant lorsqu’on prend en considération l’aspect éphémère des camps de la Kolyma qui était démonté lorsque les mines étaient « à sec ».

        Cependant de telles conditions entrainaient inéluctablement des épidémies. Le typhus faisait rage dans les camps et Chalamov nous raconte ces périodes de quarantaine pendant lesquels « les prisonniers restaient étendus là, depuis plus d’un mois, ils n’allaient pas au travail, ils allaient juste aux bains où l’on désinfectait les vêtements » . Pour l’auteur c’était vingt mille journées de vie sauvegardées.

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