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Kant idée d'une histoire d'un point de vue cosmopolitique IV proposition, insociable sociabilité

Commentaire de texte : Kant idée d'une histoire d'un point de vue cosmopolitique IV proposition, insociable sociabilité. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  29 Novembre 2022  •  Commentaire de texte  •  2 593 Mots (11 Pages)  •  268 Vues

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Expliquez le texte suivant :

            “ J’entends ici par antagonisme l’insociable sociabilité des hommes, c’est-à-dire leur penchant à entrer en société, lié toutefois à une opposition générale qui menace sans cesse de dissoudre cette société. Une telle disposition est très manifeste dans la nature humaine. L’homme a une inclination à s’associer, parce que dans un tel état il se sent plus qu’homme, c’est-à-dire qu’il sent le développement de ses dispositions naturelles. Mais il a aussi un grand penchant à se séparer(s’isoler): en effet, il trouve en même temps en lui l’insociabilité qui fait qu’il ne veut tout régler qu’à sa guise et il s’attend à provoquer partout une opposition des autres, sachant bien qu’il incline lui-même à s’opposer à eux. Or, c’est cette opposition qui éveille toutes les forces de l’homme, qui le porte à vaincre son penchant à la paresse, et fait que, poussé par l’appétit des honneurs, de la domination et de la possession, il se taille une place parmi ses compagnons qu’il ne peut souffrir mais dont il ne peut se passer.

                     KANT, Idée d’une histoire universelle d’un point de vue cosmopolitique.

La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise. Il faut et il suffit que l’explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question.

              On confond souvent la société civile avec l’Etat. Pourtant, on définit aussi assez naturellement l’Etat comme une organisation de la société avec des lois constitutionnelles, cela suppose donc qu’à la base de l’Etat, il y a une société, au sens d’une association ou un regroupement avec une vie préalable dont le caractère insuffisant oblige qu’on y ajoute des lois étatiques. Si la société est insuffisante c’est qu’elle est ouverte au sens où son ordre laisse place à d’incessants désordres ; tel est ce que pense Kant sous les termes d’ « antagonisme » et « d’insociable sociabilité ». En même temps, quand Kant parle de la sociabilité, il l’entend comme la disposition des individus, la société est donc pour lui, le lieu des individus privés et de l’usage que chacun fait des êtres en tant que moyens pour parvenir à ses fins. La société serait donc le lieu des affrontements inter-individuels. Pour établir cela, l’auteur, passe par une double thèse ; d’abord, la société est traversée d’antagonisme entre les individus ; ensuite, cet antagonisme qui a toute les apparences d’un défaut est source de développement et arrache l’homme à sa paresse naturelle. Ainsi, en premier lieu, il expliquera ce qu’il faut entendre par l’oxymore, insociable sociabilité ; en second lieu, il montre que c’est un constat psychologique et anthropologique qui s‘élève de la confrontation des passions principales avec autrui ; il en tire la conséquence d’une sorte de ruse de la nature avec les passions qui renversent le côté négatif en côté positif. Cette idée ne va pas sans poser problème soit, en cela qu’on peut contester la psychologie égoïste unilatéralement, soit parce qu’on peut se demander d’où vient cette foi en une sorte de providence rusant avec le mal. Mais, par delà ces problèmes de vérités métaphysiques, on devra peut-être se rendre compte que c’est  la conception même de la société qui est en jeu : ne s’agit-il que de rapports interindividuels ou bien y a-t-il déjà des solidarités sociales avant la politique ?

              Il s’agit pour commencer d’expliquer une définition de l’ « antagonisme ». On peut rapprocher ce terme de celui de contradiction, mais une contradiction dont les termes sont poussés à l’extrême de telle sorte qu’il y a affrontement. Or, ici, il s’agit d’un affrontement interne à l’humanité dont on a pu penser qu’elle se distinguait des autres espèces animales par sa sociabilité, mais dont on croit aussi, selon les pensées de la modernité qu’il faut mettre en avant les individus et sa liberté. Ce qu’on nomme la sociabilité c’est le penchant à vivre en société,  c’est-à-dire à accéder à des valeurs culturels et économiques communes, permettant la coexistence. Cependant l’auteur parle ici d’un « penchant à entrer en société» seulement, ce qui semble supposer que l’état de société n’est pas un état inné de l’homme puisqu’on y rentre. L’état d’où on sort, est sans doute une sorte d’état de nature conçu comme l’état hypothétique d’une vie individuelle et d’une subsistance isolée. Dans cet isolement l’homme est affranchi de tout lien et de toute dépendance à l’égard d’autrui ; or, pour l’auteur, si les hommes aussi loin que porte notre regard sur l’histoire, ont toujours vécu dans des sociétés c’est sans doute qu’il y a un penchant à vivre sous cette forme d’existence. Le penchant c’est une tendance au niveau affectif qui nous porte à suivre une certaine pente. Cette sortie de la naturalité n’est donc pas de l’ordre du commandement rationnel et intellectuel à sortir de l’isolement naturel pour s’associer avec autrui. Toutefois ces dispositions à l’isolement individualiste quoique naturelles persistent dans l’état d’association sous la forme d’une opposition à la prégnance des liens sociaux qui n’est pas que le fait de quelques individus nuisibles et asociaux mais universellement répandue. Ainsi le lien social est dans cesse au bord de la dissolution. Au fond, il s’agit seulement de rendre de compte de cette expérience que nous faisons tous qu’une société est sans cesse traversée par des conflits. L’histoire , aussi, témoigne de cela que des guerres civiles, des pillages, de simples violences civiles ou politiques détruisent ce qu’il a fallu quelquefois des siècles à bâtir.

              Il y aurait donc une tendance à se constituer en société au sens même où les hommes deviendraient interdépendants voire frères, mais celle-ci serait sans cesse menacée d’un retour à la solitude et  l’égoïsme. Cependant le vocabulaire du penchant et de la disposition  nous introduit dans un ordre finalisé, même s’il s’agit de finalité interne, il convient donc de trouver une sens, c’est-à-dire une fin à l’association.

              C’est ce que fait Kant dans la deuxième partie du texte en explicitant selon deux moments le fait de s’associer et celui de se séparer. Si l’homme s’associe aux autres c’est par définition et hors de tout angélisme pour s’élever lui-même, et se cultiver. Il s’agit pour l’homme d’être plus qu’un homme, c’est-à-dire plus que ce qu’il est dans son état actuel, car par définition l’homme contrairement à l’animal est un être inachevé qui ne peut compter que sur lui-même pour développer des virtualités. Etre, pour l’homme c’est être un être de culture, non seulement parce qu’on appartient à une civilisation, mais parce qu’on doit tirer de soi-même ce qu’on sera. S’il doit y avoir progrès c’est justement parce qu’il doit y avoir enrichissement de son identité. Pour cela il faut compter sur autrui dont les forces associées aux nôtres ne sont pas seulement la somme des deux forces mais une mise à la puissance où chacun gagne plus qu’il ne donne. Cependant l’homme n’est pas qu’un être de culture, il est aussi fermé sur lui-même, intéressé que par lui-même, centré sur son moi et donc égoïste. La liberté humaine qui est principe de dépassement est en même temps principe de décisions arbitraires de l’homme soumettant toute chose à sa guise. Chacun veut utiliser la force du tout social dans son propre intérêt. Par suite l’intérêt d’autrui s’oppose à son intérêt propre, car voulant utiliser autrui comme moyen de ses fins, il projette sur autrui les mêmes ruses tactiques. Tout cela pourrait conduire à un monde où l’humanité s’autodétruirait sans cesse.

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