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Est-ce parce qu'ils sont ignorants que les hommes ont des croyances ?

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Par   •  18 Mai 2016  •  Dissertation  •  2 934 Mots (12 Pages)  •  2 388 Vues

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        L'opinion tend souvent à considérer que c'est l'ignorance qui détermine les hommes à avoir des croyances. La croyance religieuse a notamment été remise en cause et dénigrée avec l'avancée des sciences, ce qui a mené à la séparation progressive entre Église et État. Mais est-ce seulement l'ignorance qui pousse les hommes à avoir des croyances ? Ainsi, posséder des connaissances réelles empêche-t-il véritablement quiconque de sombrer dans une croyance aveugle ? Les nazis sous le Troisième Reich, par exemple, avaient des savoir-faire authentiques sur le plan matériel tout en croyant en une idéologie absurde. Si la connaissance n'exclut pas croyance et fanatisme, ne serait-ce alors pas les passions qui détermineraient la plupart du temps l'existence des croyances ? L'homme, en apprenant à se connaître, pourrait donc réaliser ce qui le détermine à croire pour s'en libérer.

        Mais doit-on donc proscrire toute croyance de manière absolue ? Au delà des croyances irrationnelles et délirantes, ne peut-on pas croire en connaissance de cause, de manière éclairée, dans une certaine mesure rationnelle ? Allons plus loin : puisque tout n'est pas démontrable dans l'immédiat, n'est-il pas nécessaire de suivre des postulats pour prétendre accéder un jour à la vérité ? Et si des objets seront toujours indémontrables, comme l'existence de Dieu, ne faudrait-il pas s'en remettre comme le préconise Pascal à notre cœur plutôt qu'à notre raison, qui elle ne pourra jamais apporter de preuves ni de réponses universelles aux questions que l'homme se pose ?

        Tout d'abord, la croyance peut s'imposer à première vue comme l'ennemie du savoir dans le sens où elle paraît découler exclusivement de l'ignorance du sujet : en effet, une opinion est ce qu'on croit être vrai, sans pourtant être capable d'en rendre compte ni d'apporter de preuves concrètes à cette conviction en se basant sur des connaissances réelles. L'homme ayant des croyances n'a pas conscience qu’il croit, et son ignorance est donc ignorante d’elle-même. À l'inverse, celui qui sait ne peut plus croire, car une fois libéré de l’ignorance dans laquelle il se trouvait, il réalise qu'il ne peut plus se satisfaire d'un discourt validant l’irrationnel. Ainsi, c'est à cause de l'ignorance que l'homme peut se trouver dans l'illusion et concevoir le monde de manière erronée, puisqu'il n'a pas de preuves réelles de ce qu'il avance et peut par conséquent se tromper. Si l'homme du Moyen-Âge n'a pas de connaissances scientifiques, il lui est par exemple aisé de croire que la Terre est plate ou qu'elle est le centre du système solaire si c'est ce qu'on lui a toujours répété, même sans lui en donner aucune preuve. La croyance lui permet de combler artificiellement des phénomènes encore inexpliqués par la raison et par les moyens scientifiques de son époque. De même, dans les jeunesses hitlériennes, on endoctrinait les jeunes allemands en les poussant à croire que les Juifs faisaient partie d'une « race » inférieure destinée à disparaître dans l'Histoire. Tout en croyant fermement à cette idéologie et à cette conception de l'Histoire, les Allemands étaient néanmoins incapables de rendre compte de ces dernières, de les justifier de manière rationnelle, et on peut en déduire que c'est à première vue leur manque de connaissances sur le plan historique qui les a déterminés à croire en l'idéologie nazie.

        De plus, on comprend en quel sens la croyance semble être l'ennemie du savoir et de la raison dans la mesure où l'homme qui croit pense détenir la vérité et dès lors ne la recherche donc plus ; il prend des préjugés et des opinions provenant de sa culture, si ignorante soit-elle, pour des vérités et des savoirs incontestables. Il ne réfléchit plus sur la valeur de ses croyances, même si celles-ci s'opposent à l'expérience, et cela peut conduire à un délire où l'homme fanatique ne raisonne plus que de manière unilatérale, sans prendre en compte la moindre preuve – même rationnelle – avancée par ses adversaires. Un religieux, par exemple, pourrait refuser radicalement la théorie de l'évolution pourtant fondée de Darwin parce qu'il ne croirait qu'en la version fantasmagorique proposée par la Genèse, tout comme un nazi serait prêt à assassiner d'autres êtres humains au nom d'une croyance absurde qu'il tiendrait pour vérité absolue. La croyance est alors une faute intellectuelle, dangereuse, et il faut donc s'en séparer en tentant de dépasser son ignorance. Pourtant, l'avancée considérable des sciences n'a pas fait disparaître les religions et on trouve même des scientifiques croyants tout comme des scientifiques qui, sans croire en Dieu, croient au progrès de façon parfois déraisonnable – et ce malgré leurs connaissances et compétences objectives. Dès lors, il convient de se demander si l'ignorance seule permet réellement d'expliquer la croyance ; n'est-ce pas le plus souvent nos passions qui nous déterminent inconsciemment à croire ?

        Ainsi, si les hommes ont des croyances, c'est surtout à cause de leurs passions plus que de leur simple ignorance, même si cette dernière peut y contribuer. L'homme désire avoir réponse à tout, quitte à tomber dans des croyances absurdes faute de preuves. Il est par essence un être de désir et a par conséquence tendance à moduler la réalité qui l'entoure en fonction de ses passions, privilégiant de la sorte certaines croyances par rapport à d'autres selon son intérêt et les prenant sans peine pour des vérités. Dans un premier lieu, comme le dit Kant dans Qu’est-ce que les Lumières ?, la paresse et la lâcheté sont des désirs qui poussent souvent les hommes à suivre les pensées de modèles, même lorsque ces pensées ne se basent pas sur des preuves rationnelles rigoureuses. Il leur est plus simple et moins effrayant de se conformer à des visions déjà existantes du monde plutôt que d'essayer de réfléchir d'eux-mêmes par un travail long et laborieux. La croyance peut aussi reposer sur des influences mimétiques – c'est une croyance collective. La peur joue par ailleurs un rôle important dans l'entretien de la croyance : dans la superstition, l'individu a peur des chats noirs parce qu'il a peur du Diable – dont l'existence est déjà en elle-même une croyance. Dans le racisme également, la peur de l'autre et de ce qui est différent de soi en général jointe avec l'amour-propre déterminant le sujet à se penser comme supérieur expliquent en grande partie la ténacité des préjugés xénophobes ne reposant sur rien et les violences commises à l'égard des étrangers à travers les siècles.

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