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Dissertation : la morale n'est-elle qu'une affaire de conventions

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Par   •  18 Février 2019  •  Dissertation  •  3 002 Mots (13 Pages)  •  1 069 Vues

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Noémie BERTRAND (TL)

        Dissertation de philosophie : La morale n’est-elle qu’une affaire de conventions ?

         En matière de morale, l’Homme est à la fois savant et ignorant. En effet, selon Aristote, il est caractérisé par sa position particulière, à mi-chemin entre les animaux et les dieux. Un animal se contente de survivre et l’idée de morale n’a aucun sens pour lui tandis qu’un dieu est toujours une incarnation du bien absolu. Autrement dit, l’idée profonde, intime et spontanée de la morale n’a de sens que dans un contexte humain et il semble que ce soit cette idée, présente en chacun, qui nous rende humains. Ainsi, l’Homme est obligé de prendre en compte l’idée d’une existence morale sans être capable de toujours la réaliser tant son contenu est indéfinissable. C’est pourquoi en tous lieux et à toutes époques les Hommes se sont accordés sur des règles, allant dans le sens de l’intérêt commun et s’opposant à ce qui est naturel. On les appelle des conventions. Pour autant, la morale se réduit-elle à ces principes codifiés, tel nous paraît être le sens de la question posée : « La morale n’est-elle qu’une affaire de conventions ? »

En effet, il semble évident que ces conventions existent dans le but de garantir la justice et de guider l’Homme vers un comportement moral dans un contexte particulier. Pourtant, il paraît compliqué d’affirmer que ces conventions sont une image de la morale. En effet, elles se contredisent d’une société à une autre tandis que la morale doit être pensée comme énoncé universel du Bien et du Mal. Nous en avons tous l’idée et c’est cela qui nous permet d’affirmer notre humanité, notre place entre l’animal et le dieu.

Comment penser des principes moraux absolus disant le Bien et le Mal, apparemment nécessaires pour le bon fonctionnement de l’Humanité, indépendamment des conditions précises de l’action et donc de façon intemporelle et universelle, alors que la seule traduction concrète de ces principes semble être contenue dans les conventions, qui varient dans le temps et l’espace, toujours fortement teintées par la situation et la culture de chaque groupe humain ? Ce problème renvoie à des notions fondamentales telles que le devoir, la justice, la liberté du sujet, le singulier et l’universel qui pourront être pensées à partir de notre réflexion.

Pour tenter de répondre, nous verrons que la morale que l’on observe à travers les conventions est relative, puis qu’elle n’est pas réductible à ces conventions, enfin nous penserons une valeur morale universelle permettant de penser le projet de chacun.

Une convention est un accord sur une règle à respecter par tous et dans l’intérêt de tous. Cette règle va souvent à l’encontre de ce qui aurait été fait naturellement, elle permet donc notamment de maîtriser les pulsions néfastes. L’existence de ces conventions est donc absolument nécessaire pour faire vivre une société et permettre la justice : la jurisprudence, qui est l’interprétation de la loi par les tribunaux doit s’appuyer sur des conventions afin de décider au mieux d’un verdict pour l’individu. Les conventions permettent ainsi à l’individu d’articuler son existence à celle des autres, certaines sont d’ailleurs dites « sociales ». En observant les conventions de différentes époques et régions du monde, on remarque que toutes varient : la morale serait alors relative à un contexte économique, politique, culturel puisque la seule traduction concrète de cette morale, qui apparaît souvent complexe et abstraite, se retrouve dans l’éthique, ce qu’il faut faire dans une situation précise. Grâce aux conventions, on peut envisager la morale de façon pratique. Des conventions diverses seraient le signe de morales diverses. Il semble alors qu’il faut comprendre que le sentiment de morale que nous avons en nous n’est qu’un effet, un résultat, de ces conventions apprises depuis la naissance. L’éducation, qui inculque les devoirs et les interdits, variant d’une société à une autre, définit notre sentiment de morale. La morale ne serait donc ni innée ni naturelle. Les principes que nous pensons naturels seraient en fait des coutumes, que nous aurions intégrées à notre comportement. On retrouve d’ailleurs dans la définition de convention l’idée d’opposition à la nature. Ainsi le mal est ce qui nous a été enseigné comme mauvais.

Ce phénomène s’apparente à « l’intériorisation des interdits », idée développée par le psychanalyste Sigmund Freud qui décompose l’esprit humain en trois entités : le Ça (il représente nos pulsions instinctives), le Sur-Moi (il incarne tous les interdits venant de l’extérieur et désormais intériorisés) et le Moi (garant de la stabilité du sujet, il apporte le réalisme qui permet sécurité et réussite). Dans le cas où l’individu est soumis à une éducation stricte, qu’il n’a accès qu’à très peu de liberté, le Sur-Moi se fera si fort qu’un sentiment de culpabilité insupportable s’emparera de lui et pourra le mener à souffrir de grands troubles psychologiques. Quand un interdit est intériorisé, il est également courant que l’origine de cette interdiction soit oubliée, c’est-à-dire qu’on ne comprend pas pourquoi telle action est mauvaise mais on a la certitude qu’elle est effectivement mauvaise. Or, on remarque que les conventions ne s’appuient pas toutes sur de la morale pure. Certaines peuvent être artificielles et arbitraires. On peut prendre l’exemple de la politesse, par exemple le fait de saluer les individus rencontrés. Dans ce cas, il est évident que cette convention a une utilité sociale et non morale. Dans certains contextes, comme les dictatures, les gouvernements autoritaires, ou les périodes d’insécurité, ne pas remettre en question les conventions peut être dangereux. Une convention à laquelle on ne trouve plus de sens moral nous apparaît purement formelle, on ne saurait dire quel est son sens moral. Elle peut être créée dans l’intérêt d’une personne ou d’un groupe de personnes. Dans le cas où elle est motivée par un intérêt, où elle aurait un but autre que de garantir la morale elle-même, elle est amorale (hors de la morale) au mieux, immorale au pire.

Ainsi, toute convention engage par définition un accord relatif, historique entre les hommes ; et de ce fait, les conventions sont aussi multiples et particulières que les sociétés elles-mêmes et sont sujettes à variations dans le temps. Il y aurait autant de morales possibles que de formes de sociétés et de conventions possibles. Le sentiment intime de morale, l’idée de Bien et de Mal que nous avons spontanément sont en fait dus à notre éducation qui nous a enseigné des conventions, devoirs et interdits. A force de répétition, les interdits sont intériorisés et nous procurent de la culpabilité si nous nous apprêtons à agir en les bafouant. Mais on remarque que l’individu ne connaît pas et ne saurait expliquer l’origine morale d’une convention intériorisée. Il a simplement la certitude qu’une action est bonne ou mauvaise, selon ce qui lui a été transmis. Si l’individu ne doit sa morale qu’à son éducation, alors des abus peuvent être commis, car il semble qu’il ne pense pas par lui-même. De plus, l’idée que la morale soit dépendance de la société, de l’éducation, de la culture, des conventions n’est-elle pas incompatible avec l’idée même de morale ? La morale ne suppose-t-elle pas, au contraire, la possibilité de dépasser les particularités qui séparent les sociétés les unes des autres, vers un horizon universel et de critiquer ces particularités, quand elles contredisent cet horizon (tel par exemples que les régimes autoritaires) ? La morale n’engage-t-elle pas, au contraire, un effort pour dépasser les conventions qui séparent les hommes ? N’y-a-t-il pas un fondement commun moral qui donne leur légitimité aux conventions, et sur lequel elles seraient créées ?

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