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Cours sur l'art

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Par   •  8 Mai 2020  •  Cours  •  7 647 Mots (31 Pages)  •  391 Vues

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                                 L’Art

                             et le Beau

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                                               Gustav Klimt, der Kuß, 1907.

I – Qu’est-ce que le Beau ?

     

Le grand Hippias pose la question de la nature du Beau.

Il ne s’agit pas de savoir s’il y a des choses relativement belles et relativement laides : Socrate précise que c’est le Beau en un sens absolu qui l’intéresse.

                                                                                                     

Ne retenons que cette condition et, au risque de l’anachronisme, cherchons ce que cela implique si nous posons la question socratique aujourd’hui.

Socrate (-470 -399) cherche l’essence du Beau : i.e une définition du Beau qui ne soit relative ni à des jugements de valeurs ou de goût, ni à une histoire (L’histoire de l’Art), ni à une culture (la culture et les canons de Beauté de la Grèce de Périclès e.g) ; nous dirions que Socrate ne cherche pas une définition anthropologique du Beau. Une telle définition, en effet, serait contingente, privée d’objectivité et d’universalité : un byzantin du règne de Théophile (829-842) regarderait avec dégoût les fresques de Michel-Ange (iconoclaste) : un grec contemporain de Phidias contemplerait nos cathédrales gothiques avec autant de stupeur qu’un hébreux face aux ziggourats assyriennes au temps d’Assurbanipal (-VII ème)  

Il ne cherche pas non plus une définition consensuelle du beau : le consensus peut être général, voire universel : mais cette généralité et cette universalité resteraient irrémédiablement compromises par l’historicité de tout consensus :  le canon de beauté d’une korê archaïque (-VI ème) n’est plus celui d’une Aphrodite au temps de Praxitèle (né -390)

Les canons de la Beauté ne sont pas une définition du Beau en soi.

Hippias lui s’obstine : aucune différence dit-il ; ce qu’il y a de beau ou ce qu’est le Beau, c‘est la même chose.

Il ne faut pas sous-estimer ce sophisme toujours renaissant : il équivaut à réduire le Beau à l’ensemble des choses considérées comme belles : e.g celles que l’on trouve dans les Musées.

Cette position en apparence neutre à trois conséquences possibles :  

D’abord les sophistes d’aujourd’hui, critiques d’art à la mode, artistes d’avant garde qui considèrent que le talent est une tare et le génie un handicap majeur, ne manqueront pas de dire que tout Musée, réel ou imaginaire (au sens du Musée imaginaire d'André Malraux), ne fait que promouvoir des valeurs esthétiques compassées et le goût réactionnaire d’une classe sociale  dominante afin d’exclure de l’Art un certains nombre de créations.

Ensuite, ce qu’il y a de beau, c’est ce qui est jugé beau dans un temps donné ; or les propagandes des régimes totalitaires n’ont jamais manqué de subordonner les canons du Beau à une certaine idée du Bien, du Pur, liée à une certaine conception de la Santé, de la Force (des individus et du corps social) : bref à une idéologie politique et morale ; un lit de Procruste (1)  qui coupe tout ce qui dépasse. Ce qui  dénonce, réfute ou résiste à cette idéologie est réputé, ipso facto, décadent, corrompu et corrupteur.

C’est ainsi qu’on accule le poète Maïakovski au suicide, la poétesse Anna Akhmatova à l’exil intérieur, Prokofiev ou Chostakovitch au silence.

Enfin, dire que le Beau n’est rien d’autre que les choses considérées comme belles, c’est justifier, a contrario, le relativisme et le subjectivisme : dès lors tout et n’importe quoi peut se réclamer de l’art :

4’33 du compositeur John Cage, l’exposition d’une salle vide par le plasticien Y. Klein, qui ont un sens (réflexion sur les sonorités, le hasard, l’indétermination en musique / théorie de la couleur pure, du vide : surfaces monochromes ; recherche de l’absolu cf. Dépassement de la problématique de l’art) : mais aussi nombre de tenants du happening, de la performance, de l’art minimal ou du situationnisme qui dissimulent une patente médiocrité derrière le prétexte d’une « démarche » ? N’est-ce pas confondre l’Art et le discours sur l’Art ?      

D’un autre côté, lorsque Sol Lewitt, l‘un des principaux représentant de l‘art minimal et conceptuel (1928) enterre un cube de métal (maison Visser, Hollande) et n’en conserve qu’une photographie, ou lorsqu’il fait exécuter des Wall Drawings par des assistants, i.e des dessins muraux en forme d’étoiles tronquées destinées à disparaître sitôt l’exposition terminée, lorsqu’il déclare en 1969 que « l’œuvre d’art est une idée, pas un objet » ne cherche-t-il pas, sans le savoir, ce que Socrate invite Hippias à trouver ?

Alors ?

Le silence de J. Cage, le vide d’Y. Klein, l’absence de Sol Lewitt font-ils vraiment autre chose que chercher - vainement - ce que désignent et montrent de façon évidente le doigt levé du St Jean Baptiste de Léonard de Vinci, le sourire de l’Apollon de Praxitèle, ou l’Art de la fugue de Bach ?

Ce beau dont Hippias est obligé de convenir qu’il ne sait pas le définir, quoiqu’il croit toujours pouvoir dire ce qu’il est.

On peut s’interroger sur l’originalité. Raoul Dufy, e.g, invente le  tag  en 1937 - n’existe-t-il pas, d’ailleurs, depuis le paléolithique ? - les empreintes de mains sur les grottes sont comme une signature : le tag paléolithique a au moins le mérite d’avoir une dimension magique. Le tag dans les banlieues des pays riches et les métro, de New York à Paris, de Paris à Berlin et de Londres à Athènes, est à la fois une marque de désespoir, un cri de révolte, une affirmation de soi au milieu de la misère et du mépris dans ces cités gigantesques où celui qui n’a rien n’est rien, n’existe pas ou est invisible ; des êtres inutiles, surnuméraires.

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