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La forêt de Colbert à aujourd'hui

Dissertation : La forêt de Colbert à aujourd'hui. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  25 Juin 2022  •  Dissertation  •  2 371 Mots (10 Pages)  •  807 Vues

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                 En Côte d’Ivoire, face à l’urbanisation sauvage, le parc du Banco, “poumon vert” d’Abidjan, se barricade. La réserve de 3474 hectares, décrétée forêt protégée en 1929, est notamment menacée par les coupes de bois des habitants et l’explosion démographique. La forêt, qui est définie selon le site de l’ENS de Lyon comme “une formation végétale constituée d’arbres plantés ou spontanés aux cimes jointives ou peu espacées, dominant souvent un sous-bois arbustif ou herbacé et s’étendant sur au moins 4 hectares”, est menacée de disparition alors qu’elle absorbe le gaz carbonique et rejette l’oxygène indispensable aux 6 millions d’Abidjanais. De plus, elle joue un rôle important dans la régulation du régime de pluviométrie et dans la recharge de la nappe phréatique approvisionnant la ville d’Abidjan en eau potable. Début 2022, la construction d’un mur long de 10 kilomètres a débuté, il va ceinturer le parc pour stopper l’extension d’Abidjan, qui se fait sans la moindre préoccupation de la préservation ou de la restauration du patrimoine naturel. Cette actualité ivoirienne se reflète partout dans le monde et notamment en France ou l’histoire de la forêt métropolitaine française est sujette à de vives discussions, depuis le régime de Louis XIV à aujourd’hui. Cette actualité résume tout autant les activités d’exploitation, c’est à dire l’utilisation des ressources de la forêt à des fins économiques, et les activités de protection, c’est à dire d’une part la préservation, qui signifie la non-utilisation, la sanctuarisation et la mise à l’abri de la nature par une approche biocentrée et d’autre part la conservation, via une approche écocentrée cette fois-ci, qui définit un usage limité de la nature, avec des activités durables incluant l’intervention humaine. Cela nous amène à nous demander pourquoi et comment l’Etat français prend-il en charge la gestion de la forêt, entre exploitation et protection, de l’ancien régime à nos jours ?                  Dans une première partie, nous observerons, de l’ancien régime à la seconde moitié du 19ème siècle, la protection de la forêt pour mieux l’exploiter. Dans une seconde partie, nous analyserons, de la seconde moitié du 19ème siècle à la fin du 20ème siècle, la protection des forêts, qui s’élargie peu à peu à la nouvelle notion de préservation. Enfin, dans une troisième partie, nous étudierons le monde d’aujourd’hui avec les enjeux des deux logiques en tension de la protection de la forêt, entre conservation et préservation.

De l’ancien régime à la seconde moitié du 19ème siècle, nous observons des mesures de protection de la forêt de la part de l’Etat français, qui s’en suit d’une exploitation bien plus contrôlée. Tout d’abord, l’ordonnance des eaux et des forêts de 1669, préparée par Colbert, qui est contrôleur général des finances et secrétaire d'État à la Marine, est signée par Louis XIV, monarque absolu qui règne de 1661 à 1715. Cette ordonnance a pour objectifs de limiter le recul de la forêt. En effet, depuis la fin du Moyen-Age, la superficie forestière ne cesse de reculer en France métropolitaine. Entre l’ordonnance de Colbert en 1669 et le milieu du XVème siècle, environ 100 ans auparavant, la forêt française a perdu 10 millions d’hectares de superficie, elle ne recouvre plus que 12 millions d’hectares contre 22 millions en 1550. Cependant, comme dirait Colbert : “La France périra faute de bois”. C’est ainsi dire que la forêt est une ressource essentielle pour la population et pour l’Etat, qui en a besoin notamment pour la construction navale, la forêt doit fournir le bois de construction des navires de guerre et de commerce. Un navire de guerre est une "forêt sur l'eau" : un navire de 74 canons (60 m de long), nécessite 2500 chênes centenaires pour sa construction, ce qui représente la forêt du Tronçais. L’Etat français et plus précisément la Marine nécessite ce bois dans le cadre la politique étrangère et commerciale de Louis XIV. L’ordonnance de Colbert fixe des délimitations de zones préservées et ordonne une réglementation de l’abattage de la vente des arbres, par exemple il est interdit de couper un arbre jeune de moins de 10 ans. Cette ordonnance a un impact sur les paysages ou l’on voit se mélanger les futaies et taillis, mais à la fin du XVIIème siècle un petit âge glaciaire entraine de nouveau un défrichement massif de la forêt française. En 1789, la couverture forestière ne représente plus que 8 millions d’hectares et est très dégradée, notamment par les taillis, qui épuisent les sols et par les zones de pâtures pour le bétail. Suite à ces dégradations, le corps royal impose un renforcement de la protection, avec la création de commissaires et gardes forestiers royaux, avec la volonté d’unifier la gestion de la forêt et d’exploiter celle-ci de façon raisonnée. Bien qu’il y ait eu un progrès dans la volonté de préserver les forêts, la “Grande réformation” de Colbert n’est pas parvenue à enrayer la diminution du couvert forestier.

Dans le même mouvement que l’Ordonnance de Colbert de 1669, le Code forestier de 1827 vise à renforcer à nouveau la réglementation en adoptant des lois qui règlementent l’usage de la forêt. La superficie forestière est au plus bas en 1827 avec seulement 7,5 millions d’hectares de forêt. Ces lois visent à réduire l’exploitation du bois de construction, de chauffage, de charbon de bois qui sont indispensables pour les paysans et aussi les communes, en appliquant des mesures telles que l’interdiction de prélever directement des ressources dans les forêts domaniales appartenant à l’Etat ou l’interdiction de pacage de certains troupeaux. L’objectif de ce Code forestier est donc d’augmenter la superficie forestière pour répondre aux besoins de l’Etat et l’objectif est réussi avec une augmentation rapide du couvert forestier grâce au renforcement du contrôle de l’Etat sur la forêt. Cependant, cela ne convient pas à tous et cette restriction de l’utilisation de la forêt et des ressources entraine des conflits d’usage tel que la “Guerre des Demoiselles”.

Plus loin dans l'histoire, sous le II Empire, nous observons une politique volontariste de boisement pour répondre aux besoins de l’industrialisation et aux premières préoccupations environnementales. Napoléon III, alors à la tête du II Empire, témoigne d’un intérêt particulier pour les questions agricoles et forestières, dans une optique de rationalisation et intensification des usages agricoles du terroir. Dans un contexte d’industrialisation, qui augmente les besoins en bois comme avec les chemins de fer ou l’urbanisation qui nécessite un fort apport en bois. Cette politique volontariste de boisement entraine des reforestations ou des restaurations de massifs forestiers dégradés. Elle a pour but de procurer du bois d’œuvre nécessaire au développement de chemins de fer, contrer les inondations ou encore assurer la sécurité du territoire aux frontières. Par exemple, la forêt des Landes de Gascogne, qui est aujourd’hui une des principales forêts françaises, était auparavant une vaste étendue de terre incultivable. Cette politique très volontaire rencontre cependant des résistances, la population française se sent volée par l’Etat français qui rachète grand nombre de secteurs forestiers, ne laissant pas libre cours à l’utilisation des ressources par les citoyens français.

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