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L’aventure chevaleresque dans les romans de Chrétien de Troyes

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Par   •  24 Mai 2018  •  Fiche de lecture  •  4 581 Mots (19 Pages)  •  742 Vues

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L’aventure chevaleresque dans les romans de Chrétien de Troyes

Mª Esclavitud Rey Pereira, U.C.M.

I - Introduction

M. Stanesco, à la suite de P. Zumthor, affirmait que pour la conscience romanesque du Moyen Âge l’action dans le roman adoptait la forme de l’aventure:

« […] ce qui ad-vient –c’est-à-dire l’irruption de l’inconnu, de l’inouï, de l’estrange… » [1]

Ce qui semble particulièrement vrai dans les romans de Ch. de Troyes, dans lesquels cette action-aventure informe (dans le sens de « façonner », « donner une forme ») les différents niveaux du texte :

  • Son niveau narratif, évidemment, à commencer par l’anecdote, c’est-à-dire l’ensemble d’événements et de faits, de situations et de circonstances qui constituent la matière même du récit, et à continuer par la structure narrative qui le soutient, une structure qui relève aussi bien de l’aventure à raconter que du savoir-faire de l’écrivain, car celui-ci a bien dû explorer les ressources que la poétique du genre mettait à sa disposition, pour construire son récit de la manière la plus efficace possible.
  • Et, à côté de ce niveau narratif, celui du sens du roman, de sa portée, de son intentionnalité, c’est-à-dire, de l’ensemble d’idées, d’opinions et de valeurs que son auteur a voulu transmettre en l’écrivant.

En définitive, et pour employer la distinction si chère aux clercs du Moyen Âge (entre la matière et le sens d’un texte), on pourrait en conclure qu’une analyse de l’aventure ou aventures qui construisent un roman de chevalerie mettrait en évidence comment l’aventure chevaleresque...

  1. constitue la matière même du roman
  2. détermine sa forme narrative, et
  3. finit par en expliquer le sens.

Notre contribution, forcement limitée, d’un côté par l’espace dont nous disposons, et, de l’autre, par le champ d’application choisi, les romans de Chrétien de Troyes, va donc approfondir, encore que partiellement, ces trois niveaux ou modes de fonctionnement de l’aventure chevaleresque dans le corpus textuel délimité; surtout les deux premiers niveaux, que d’ailleurs nous présenterons de manière indistincte, tout en suivant le mouvement naturel de lecture qui perçoit la matière romanesque comme de la « matière informée », alors que, par rapport au troisième niveau, nous nous limiterons à souligner ici quelques aspects généraux sur le sens de l’aventure dans ces romans, car toute considération plus précise relèverait d’une étude particulière de chaque roman que nous ne pourrons entreprendre dans ces pages.

C’est ainsi que cet exposé commencera sur une révision des caractéristiques de l’aventure chevaleresque chez Chrétien de Troyes, de sa valeur et de ses implications, en corrélation toujours avec l’instance narrative qui lui est inséparable, le chevalier.

Nous allons ensuite y ajouter quelques considérations à l’égard des deux autres composantes du récit romanesque qui complètent et précisent nécessairement le cadre de l’aventure dans le roman, c’est-à-dire, ses coordonnées temporelle et spatiale.

Pour nous référer, dans un troisième moment, à la voix narrative du roman, car celle-ci, en raison même de la manière de raconter qui lui est propre, contribue à construire, avec les autres composantes textuelles déjà mentionnées, l’effet de sens que le texte nous transmet.

Ces trois moments de notre analyse seront fréquemment traversés d’allusions et de courtes réflexions concernant les effets de sens que ces textes créent et transmettent, ce qui les rend responsables, en dernière instance, de l’intentionnalité et la portée de l’oeuvre romanesque christanienne.

Finalement, notre conclusion au présent travail essaiera de mettre en relief, au moyen d’une courte synthèse, les aspects fondamentaux traités dans ces pages.

Mais avant d’aborder l’analyse de l’aventure chevaleresque dans les romans de Chrétien de Troyes, présentons, très schématiquement, l’écrivain et son œuvre.

On peut dire sans doute de Chrétien de Troyes qu’il est le premier grand romancier de la littérature française. Il est né en 1135 et meurt vers 1190. Il a vécu une grande partie de sa vie dans la cour fastueuse de Marie de Champagne, puis il a passé ses dernières années au service de Philippe d’Alsace, dans la cour de Flandre, où il est mort.

Le peu de choses que nous savons de lui, c’est son oeuvre qui nous l’a livré. Aussi, dans les prologues de certains de ses romans le même auteur nous parle-t-il de ses bienfaiteurs, de son oeuvre, ses sources et ses influences, de ses intentions et encore de son travail d’écriture.

De plus, une analyse du contenu de ses romans met en évidence les quatre grandes sources d’inspiration qui informent son oeuvre :

  • L’inspiration classique, surtout d’Ovide, dont il se sert surtout pour décrire le sentiment amoureux.
  • L’inspiration bretonne, qui se manifeste dans le choix de ses personnages : le roi Arthur, la reine Guenièvre et l’ensemble des chevaliers de la Table Ronde... Ainsi que dans leur cadre de vie : notamment l’Angleterre arthurienne et l’Armorique française.
  • L’inspiration provençale, avec sa doctrine de l’amour courtois, dont Le chevalier de la Charrette, troisième roman de notre auteur, semble l’exemple romanesque le mieux achevé.
  • Et l’inspiration mystique, enfin, lorsque vers la fin de sa vie, déjà au service du comte de Flandre, il entre en contact avec la tradition du Graal.

Outre ses cinq romans chevaleresques, qui constituent l’objet de notre étude : Érec et Énide (écrit vers 1165), Cligès (qui date de 1176), Le chevalier de la Charrette et Le chevalier au Lion (écrits tous les deux entre 1177 et 1181) et Le conte du Graal (écrit avant l’année 1190), il est encore l’auteur de plusieurs chansons lyriques, écrites en français, et de quelques adaptations et ouvrages de jeunesse qui, malheureusement, ne nous sont pas parvenus[2].

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