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Commentaire littéraire scènes 1 et 2 de L'îles des esclaves de MARIVAUX / CNED 1er S

Commentaire de texte : Commentaire littéraire scènes 1 et 2 de L'îles des esclaves de MARIVAUX / CNED 1er S. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  19 Décembre 2016  •  Commentaire de texte  •  3 077 Mots (13 Pages)  •  2 511 Vues

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Nous allons étudier la scène 1 et le début de la scène 2 du premier et unique acte de L'île des esclaves, comédie écrite par Marivaux en 1725. La pièce se déroule dans l'Antiquité grecque où le noble Iphicrate et son valet Arlequin, venus d'Athènes, échouent après une tempête sur une île où les habitants ont inversé les rôles sociaux : les maîtres deviennent ainsi les valets et inversement. Dans ces deux scènes, Arlequin fait comprendre à son maître que la situation n'est plus à l'avantage de ce dernier et qu'Iphicrate n'a plus aucun ordre à lui donner, étant donné le fait que l'autorité est désormais détenue par Arlequin. Cette remise en question des rôles et des autorités nous fait donc nous poser la question suivante : En quoi ces deux scènes permettent une réflexion sur les relations humaines et sur les rapports entre dominant et dominé ? Pour répondre à cette question, nous verrons dans un premier temps en quoi la première scène constitue une scène d'exposition permettant la présentation des personnages, de leurs rôles et de leurs relations. Nous étudierons ensuite les modalités de l'inversion des rôles des deux personnages et de la rébellion d'Arlequin, pour finalement voir en quoi cet extrait, voire plus généralement l’œuvre dans son intégralité constitue la base d'une réflexion sur la relation entre le maître et le valet au XVIIIe siècle. 

 Nous allons donc, dans un premier temps, voir quels éléments font de cet extrait une scène d'exposition théâtrale nous permettant d'analyser les rôles et les relations entre les deux personnages, premièrement par la présentation des personnages en tant que tels et de leurs symboliques, puis par celle de leurs relations, initialement violentes mais étant, par la force des lois imposées sur l'île, en pleine évolution. 

Ces deux scènes présentent la situation.  Cette dimension informative est visible tout d'abord grâce à certains éléments spatio-temporels destinés à informer le lecteur ou spectateur sur les éléments nécessaires à la compréhension de l'intrigue. Certes, c'est uniquement le paratexte présent au tout début de l'extrait qui nous informe du fait que les deux personnages ont échoué sur une île, mais la symbolique n'en est pas moins importante. En effet, figurativement, l'île est coupée du monde et le champ lexical du naufrage (« naufrage », « chaloupe », « je suis perdu ») accentue l'hostilité d'une nature violente et capricieuse qui coupe les personnages de leur monde originel. Cette insularité porte donc un aspect symbolique, cette coupure géographique d'avec le réel portant un message plus psychologique : les personnages se retrouvent seuls face et avec eux-mêmes et se doivent de composer avec cette solitude et cet isolement récents. 

La présentation et l'exposition du « décor » de la pièce se fait donc dans cette scène d'un point de vue géographique, mais aussi au niveau des personnages en eux-mêmes. 

Nous savons donc qu'Iphicrate vient « d'Athènes ». Etymologiquement, son nom est composé de deux termes grecs, « Iphi » et « Kratein » qui signifient « puissance » et « commander ». La puissance du nom se manifeste par ailleurs dans la scène 2 lorsque Arlequin, après avoir exposé à Trivelin qu'au vu de sa condition sociale il ne possédait aucun nom mais seulement des sobriquets, il déclare, au sujet de son maître : « Oh, diantre ! il s’appelle par un nom, lui ; c’est le seigneur Iphicrate. ». Historiquement, Iphicrate a bien existé : il s'agit d'un stratège athénien du IVe siècle avant Jésus-Christ. Ce personnage incarne donc le pouvoir, ce qu'atteste la syntaxe du pouvoir employée dans le texte : Iphicrate s'exprime avec une parole dénuée de verbe qui tranche, la « langue d'Athènes » comme le dit si bien Arlequin. Les phrases nominales exclamatives (« Esclave insolent ! », Misérable ! ») attestent eux-aussi de cette syntaxe. L'épée qu'il utilise à la fin de la scène 1 apparaît d'ailleurs comme un symbole de ce pouvoir, pouvant aller jusqu'à celui de vie et de mort sur son esclave. On peut retrouver cette symbolique au début de la scène 2 dans la réplique dee Trivelin : « Votre esclave ! vous vous trompez, et l’on vous apprendra à corriger vos termes. (Il prend l’épée d’Iphicrate et la donne à Arlequin.) Prenez cette épée, mon camarade ; elle est à vous ». Cette réplique marque encore de manière matérielle l'inversion des rôles des deux personnages que nous allons étudier dans la suite de ce commentaire.  De plus, Iphicrate semble incarner la tragédie, notamment par l'intermédiaire de sa gestuelle : les didascalies indiquent que « au désespoir », il court après Arlequin, accentuant la noblesse tragique du personnage, bien qu'ayant ici pour but de malmener son valet. Le tragique de la situation transparaît notamment dans le registre de son langage : «Mais j'ai besoin d'eux, moi ! », « Juste ciel ! Peut-on être plus malheureux et plus outragé que je le suis ? ». A l'inverse, Arlequin apparaît comme le personnage type du valet de comédie, qui n'est pas sans rappeler, par son insolence et son sens de la répartie, le valet Figaro dans la trilogie théâtrale de Beaumarchais. Les didascalies mentionnent une gestuelle rompant avec la dignité solennelle d'Iphicrate : « Indifféremment », « Riant ». 

Ainsi, les attitudes des deux hommes sont aux antipodes l'une de l'autre, mais qu'en est-il de leurs relations ? Les deux personnages entretiennent globalement des relations tendues, tension marquée notamment par l'enchaînement des répliques et par le passage régulier de l'insulte par Iphicrate : « esclave insolent » à la moquerie et l'insolence d'Arlequin qui, « riant », provoque ouvertement son maître à l'autorité très contestée. Iphicrate n'a donc, au début de l'extrait, pas conscience que la situation a complètement changé, qu'Arlequin et lui ne sont plus à Athènes, mais sur une île où ce sont les esclaves qui ont pris le pouvoir. Lorsque qu'il réalise la nouvelle faiblesse de sa position, il cherche tout d'abord à amadouer Arlequin : "Eh ! ne sais-tu pas que je t'aime ?", puis lorsqu'il se rend compte que son hypocrite affection n'inspire qu'une vague pitié à Arlequin, Iphicrate se tourne à nouveau vers l'insulte pour affirmer son statut et son autorité: "esclave insolent !", "Maraud". Cette dernière

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