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Commentaire Arrêt DES 24 Semptembre 2009: la responsabilité civile

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Par   •  2 Avril 2013  •  2 539 Mots (11 Pages)  •  1 226 Vues

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Commentaire d’arrêt

Cass. 1ère Ch. Civ., 24 septembre 2009

La responsabilité civile suppose, pour obtenir réparation, de remplir trois conditions : un dommage, un fait générateur de responsabilité, et un lien de causalité. L’arrêt du 24 septembre 2009 de la 1ère Chambre civile se penche sur la charge de la preuve concernant le lien de causalité, dans une affaire médicale.

Une femme a été exposée, durant la grossesse de sa mère, à une hormone synthétique dénommée diéthylstilbestrol (DES), prescrite à une certaine époque aux femmes enceintes pour prévenir des risques de fausse couche, et fabriquée par les sociétés « UCB Pharma » et « Novartis santé familiale ». Elle est désormais atteinte d’un cancer du col de l’utérus qu’elle impute à la prise in utero de cette hormone.

Elle assigne donc, avec son mari, les deux laboratoires en justice afin d’obtenir la réparation de leurs préjudices. La Cour d’Appel de Versailles, le 10 avril 2008, rend un arrêt qui déboute les époux de leurs demandes : la mise sur le marché de cette molécule par les deux laboratoires ne peut être le fondement d’une action collective, ce fait n’étant pas en relation directe avec le dommage subi. Elle reconnaît cependant que l’exposition in utero de la victime à la molécule est la cause directe de la pathologie tumorale. Mais les demandeurs n’ont pas rapporté la preuve que le produit à l’origine du dommage a été fabriqué par l’un ou l’autre des laboratoires. Les époux se pourvoient alors en cassation.

Il s’agit donc pour la Cour de cassation de déterminer si l’établissement du lien de causalité suppose que la preuve de la prise du produit issu d’un laboratoire précis soit rapportée par le demandeur.

Ainsi, la 1ère Chambre civile rend un arrêt le 24 septembre 2009 qui casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Versailles. Selon elle, à partir du moment où les juges du fond ont admis le lien entre l’exposition au DES de la victime et la tumeur, il appartenait ensuite à chacun des laboratoires de prouver que ce n’est pas son produit qui est à l’origine du dommage. La Cour d’Appel a donc violé les articles 1382 et 1315 du Code civil.

L’apport incontestable de l’arrêt est celui du renversement de la charge de la preuve : la victime bénéficie en l’espèce d’une présomption imposant ensuite aux laboratoires de rapporter une preuve négative pour qu’ils ne soient pas obligés à réparation.

Nous analyserons donc dans un premier temps le renversement de la charge de la preuve opéré par l’arrêt, avant de nous pencher sur les conséquences en matière de preuves et de réparation sur les nombreuses autres affaires de type « médical ».

I. LA CHARGE DE LA PREUVE DU LIEN DE CAUSALITE RENVERSEE PAR L’USAGE DES « PRESOMPTIONS » :

Le principe général en matière de charge de la preuve connaît des exceptions (A) qui ont conduit dans cette affaire au renversement de la charge de la preuve (B).

A. Un principe général en matière de charge de la preuve souffrant d’exceptions :

L’article 1382 pose le principe de base de la responsabilité délictuelle : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ». Mais pour obtenir réparation sur le fondement de cette responsabilité civile délictuelle, il faut remplir trois conditions : l’existence d’un dommage, d’un fait générateur de responsabilité, et enfin d’un lien entre les deux, appelé « lien de causalité ». C’est ce dernier qui nous intéresse ici : sa démonstration est indispensable. Et le principe veut qu’il incombe au demandeur (la victime) d’apporter la preuve de ce lien entre le fait générateur qu’elle impute au défendeur et son dommage (ce lien doit être direct et certain). La Cour de cassation n’hésite pas à considérer ce lien de causalité comme une question de droit sur laquelle elle peut exercer un contrôle. Par ailleurs, l’autre grand principe affirme que le doute bénéficie toujours au défendeur.

Pour autant, ces principes connaissent des exceptions, essentiellement dans les affaires médicales. Une preuve d’un lien de causalité certain est parfois difficile à obtenir dès que l’on entre dans le domaine scientifique. C’est pourquoi la jurisprudence s’est parfois contentée de « fortes probabilités », avec le recours aux présomptions (cf. article 1353 du Code civil). Elles peuvent se définir comme « les déductions tirées à partir d'un fait connu, pour établir la vraisemblance d'un fait inconnu ». Pour servir de preuve, elles doivent répondre à trois critères : la présomption doit comporter des éléments graves, précis et concordants.

Ces présomptions ont rapidement été utilisées pour renverser la charge de la preuve en matière de responsabilité contractuelle. Par trois arrêts datés de 2001, la Cour de cassation a opéré, en se basant sur ces présomptions de causalité, un véritable renversement de la charge de la preuve. La 1ère Chambre civile a en effet posé un principe simple (arrêt du 9 mai 2001, deux arrêts le 17 juillet 2001) : Dès lors qu’une personne démontre que l’infection dont elle est atteinte est survenue après une transfusion sanguine, et qu’elle ne présente aucun mode de contamination qui lui soit propre, il appartient au centre de transfusion de démontrer que son sang était exempt de vice. Les seules conditions sont que l’infection soit apparue après la transfusion, et qu’aucune autre explication ne soit possible. Comme il s’agit d’une présomption simple, elle peut être simplement détruite par la preuve contraire.

On voit donc que l’établissement du lien de causalité est toujours exigé, et incombe en principe au demandeur : cependant, la jurisprudence sait se montrer parfois « arrangeante » pour établir ce lien, et il revient ainsi parfois au défendeur d’apporter la preuve contraire pour ne pas être obligé à réparation.

B. Le renversement de la charge de la preuve dans la responsabilité du fait des produits défectueux :

On a vu dans le paragraphe précédent qu’un renversement de la charge de la preuve était possible dans certains cas. Mais dans les exemples cités, il s’agissait de décisions s’appuyant sur l’article 1147 du Code civil, c'est à dire sur la responsabilité dite « contractuelle ». Or, le mécanisme de présomption est souvent utilisé dans la responsabilité du fait des choses, et plus particulièrement des produits médicaux (c’est le cas en l’espèce). Cette

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