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Dissertation philosophie "L'ennemi"

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Par   •  23 Juin 2019  •  Dissertation  •  2 867 Mots (12 Pages)  •  1 371 Vues

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L’ennemi

Introdution :

  Qui veut d’un ennemi ? A priori, personne. Si l’on entend ennemi comme le parfait antonyme d’ami, alors l’ennemi ne possède qu’un sens négatif ; il serait celui qui nous nuit ou nous veut du mal. Dans tout les cas, une personne ou un groupe dont on se passerait aisèment. Pourtant, l’ennemi ne se réduit pas à cette simple idée de nuissance. Il possède plusieurs sens, dont les conséquences sont forts distinctes. En latin deux acceptions mènent à ce mot, la première « inimicus », celui qui a des sentiments hostiles, qui est préjudiciable et haineux ; et « hostis », l’étranger, le rival, celui qui fait la guerre contre quelqu’un. On constate que le premier sens du mot ennemi concerne l’ennemi privé, l’ennemi personnel, contre qui se porte souvent des sentiments négatifs, et le deuximème sens concerne l’ennemi collectif, contre qui l’on fait la guerre et qui prend généralement la forme d’une association d’hommes ou d’un Etat. Ce qui distingue ces deux ennemis est leur rapport à la politique et de fait à la guerre. En effet, on pense d’abord l’ennemi comme un adversaire contre qui l’on se bat. Or, Rousseau distingue les genres d’ennemis dans leur rapport à la confrontation, et affirme que « la guerre n’est point une relation d’homme à homme, mais une relation d’Etat à Etat, dans laquelle les particuliers ne sont ennemis qu’accidentellement ». Aussi, la guerre n’est propre qu’aux ennemis collectifs et non aux ennemis privés. De plus, celle-ci constitue selon Carl Schmitt, l’affirmation « d’une unité politique » ( La notion de politique ) . Ainsi, deux conceptions de l’ennemi émergent, celui qui gène mais dont l’existence ne remet pas en cause notre existence  ; et celui dont la gène, parce qu’il constitue une négation de l’existence d’un groupe, permet de s’affirmer. Cette distinction, nous amène à nous interroger sur le rôle de l’ennemi, sa nécessité ou sa dispensabilité. Aussi, peut-on se passer de son ennemi ? Cette question peut-elle trouver une réponse identique à la fois dans l’homme individuellement ou dans une unité politique tel qu’un Etat ?  S’il est vrai que l’ennemi est d’abord dénié, il n’en reste pas moins qu’il semble nécessaire de le concidérer. Si bien qu’une fois reconnu, il permet à terme de se reconnaitre.

I Le dénigrement de l’ennemi  ( intérieur ou extérieur )

A) L’ennemi de son peuple rompant avec le pacte social ( Etat contre homme, un rapport inégal )  

Certes, des circonstances peuvent nous amener à avoir un ennemi. Dans ce cas, il est courant de le dénigrer, et même de le nier complètement.

 En effet, l’ennemi peut être un ennemi collectif à l’intérieur d’un Etat. Selon Rousseau, l’ennemi c’est d’abord celui qui ne respect pas le pacte social au sein du peuple: un ennemi public. En s’affranchissant du droit social d’un Etat, il est considéré comme un « malfaiteur » ( Rousseau, Livre II chapitre V ). Cet affront indique que la conversation de l’Etat n’est plus compatible avec celle du coupable. Celui-ci devient un ennemi de l’Etat, Rousseau explique : «  Quand on fait mourir le coupable, c’est moins comme citoyen que comme ennemi ». Cette phrase illustre le passage pour un citoyen du statut de citoyen à celui d’ennemi public, parce qu’il aurait défié les lois. Rousseau va plus  loin encore en contredisant son hypothèse de départ et en indiquant que l’ennemi n’étant pas une personne morale, « l’Etat peut lui faire la guerre ». Ici, on remarque le paradoxe avec la définition initiale, qui constitue un rapport de nature inégal entre les deux opposants et de ce fait discrédite l’ennemi. Aussi, L’ennemi n’est plus concurrent, ni adversaire, car sa défaite est certaine.

B) L’ennemi comme étranger de ma condition ( le problème entre condition et considération )

 Mais surtout, l’ennemi dans sa seconde acception, fait référence à l’étranger. Celui qu’on ne comprend pas et que généralement on ne veut pas comprendre. Soit parce qu’il témoigne d’une condition similaire ou d’une condition différente, celle-ci est souvent la cause d’un dénie de l’ennemi.

 En effet, la condition d’un homme est ce qui est le plus à même de le définir objectivement, or si les conditions au sein même d’une société sont trop inégales, alors cela peut provoquer des conflits et faire émerger des ennemis. Dans de la démocratie en Amérique , Tocqueville montre le rapport entre les conditions sociales des individus et leur cohésion dans la société. Dans le livre III chapitre 1, il explique qu’ « il n’y a de sympathies réelles qu’entre les gens semblables ; et, dans les siècles aristocratiques, on ne voit ses semblables que dans les membres de sa caste. ». Cette idée permet d’illustrer le problème des conflits de classes au sein des sociétés développées. Les conflits de classes font émerger des associations politiques qui revendiquent leur existence au profit des autres classes. En cela, ils dénient leur ennemi car ils ne peuvent envisager de vivre avec lui ; leur solution étant son extermination formelle ( la fin des conditions bourgeoises et nobles ). De même, selon Tocqueville, « des nations » et donc généralement des Etats, considérant l’opposant comme un étranger pourront faire preuve d’un grand dénigrement dans son traitement lors d’un conflit. Il explique que « les romains égorgaient les généraux ennemis, après les avoir traîné en triomphe derrière un char ». Les romains pensaient simplement que les étrangers ennemis « n’étaient point de la même espèce humaine ». Aussi, l’ennemi, quand il est affilié à une nature différente de celle de son adversaire, perd toute considération aux yeux de son opposant.

C) L’ennemi comme criminel ( Disqualifier l’ennemi au nom de la morale et non de la justice )

 De fait, pour dénigrer son ennemi au point de le dénier, il est possible de le destituer de ce statut pour lui donner le statut de coupable et plus spécifiquement de criminel.

 Dans la notion de politique préfacée par Julien Freund, ce dernier avance que « La relation spécifique et fondamementale qui ne se laisse déduire d’aucune autre relation et à laquelle on peut réduire toute activité et tout motif politique est celle d’ami - ennemi ». En effet, le rapport à l’ennemi est constitutif de la politique, or celui-ci est très souvent dénié au nom de la loi ou de la morale. Faire exister son adversaire, c’est admettre que l’on possède un opposant qui peut prevaloir sur soi, qui est comparable à soi ; aussi, en le rendant criminel, il est immédiatement disqualifié, laissant son opposant gagnant par défaut. Cette thèse est largement expliquée par Julien Freund dans La négation de l’ennemi , ou il démontre que le traitemement moderne des traités de paix et des ententes internationales sont de pures hypocrisies. Le cas du traitement de l’allemagne après la première guerre mondiale illustre ce phénomène. Freund explique que l’Allemagne vaincue ne pouvait pas négocier lors du traité, « L ‘ennemi était nié puisqu’il perdait sa qualité d’interlocuteur politique pour devenir un coupable du point de vue d’une idéologie morale ». L’allemagne n’était pas traité du point de vue du droit international mais bien du point de vue de la morale, dont les vainqueurs se faisaient les garants. Il ajoute : « Dès lors qu’on cherche à nier l’ennemi politiquement du point de vue du moralisme juridique on le transforme immanquablement en un coupable ». Ce déséquilibre entre les protagonistes de la guerre marque un dénigrement de l’ennemi dans son traitement, qui ne peut pas aboutir à une réconciliation sereine. Ce traité de paix, n’en est pas un, puisque le dénigrement infligé à l’ennemi risque de raviver des recoeurs, et dans le cas de la première guerre mondiale, porter en germe les raisons de la seconde.  

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