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Étude de l'oeuvre De Vita Beata Sénèque

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Par   •  18 Mars 2013  •  10 733 Mots (43 Pages)  •  1 189 Vues

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De vita beata [la vie heureuse] Sénèque

Sénèque : c’est un intellectuel, citoyen naturalisé romain, né en Espagne en 4 av. J. C. Son père, Sénèque le Rhéteur, était un orateur politique célèbre. Sénèque le fils, le philosophe stoïcien, fut conseiller de Néron, et il dut se donner la mort en 65 de notre ère, car il était compromis par le pouvoir de Néron.

Question : comment un philosophe a-t-il pu se compromettre avec la société officielle, et à ce point avec le pouvoir de Néron, duquel il tenait ses titres et sa richesse ?

De fait, Sénèque, en tant qu’individu, a mauvaise réputation. Cf. Pascal Quignard qui dit, dans Le sexe et l’effroi : « Sénèque a écrit : ” il n’y a pas d’être plus ombrageux que l’homme ”. Sénèque le fils fut la haine de tout ce qui était vivant … il adorait l’argent, et la peur de souffrir… opposé de son père … maigreur brûlante dépressive … baptisé le “ pédagogue du genre humain ”, le puritain …. » Nausée, génie et dépression.

Sénèque a écrit le de vita beata en 58 environ, c'est-à-dire dans la dernière partie de sa vie où il s’écarte progressivement des affaires pour se consacrer à des oeuvres majeures. D’ailleurs il avait demandé sa retraite à Néron qui s’était fait un plaisir de la refuser. Sénèque a la réputation de quelqu’un d’ombrageux, de mélancolique et de riche compromis avec le pouvoir.

Question : comment se fait-il que quelqu’un de malheureux, mais en même temps de très puissant, quelqu’un de sombre, ait fait un traité sur le bonheur ?

Est-ce que le stoïcisme a quelque chose à nous apprendre sur le bonheur, étant donné que cela semble être l’apanage de l’école rivale : l’Epicurisme, défini comme un hédonisme, c'est-à-dire une quête du plaisir ? Ou ne serait-ce pas aussi le concept majeur de l’Aristotélisme qui se présente comme un eudémonisme, c'est-à-dire qui rend un culte à « la belle vie » (c'est-à-dire à la vie bonne) ? La réponse des Stoïciens et de Sénèque en particulier est la suivante : nul ne peut être heureux s’il n’affronte le malheur, s’il ne sait pas résister à ce malheur et pour cela, faire la part des choses entre le destin qui peut être cruel, et nos réactions par rapport à lui. Le stoïcisme est une sorte de désespoir lucide : quand on est en vie, on peut toujours être malade ; quand nous désirons, nous nous faisons du mal ; quand nous espérons, nous entretenons des illusions. Les Stoïciens sont des descendants des philosophes Cyniques, dont ils ont hérité de la dureté de la carapace qu’ils opposaient au monde.

I/ : Le Souverain Bien et la sagesse (chapitres I, II, III, IV & V)

a) Se séparer de la foule : « Le chemin de la foule n’est pas le bon » I, II & III, p. 45 à 49.

C’est un paradoxe. En effet, par nature, tous les hommes veulent être heureux, les hommes illustres, comme les plus obscurs. Comment se fait-il qu’ils agissent de travers pour y arriver, et qu’ils fassent plutôt leur propre malheur ? C’est pourquoi il s’agit de « comprendre une fois que nous serons en chemin, si du moins c’est le bon, combien chaque jour nous abattons de besogne, et dans quelle mesure nous sommes plus proches de ce vers quoi nous pousse un désir naturel. » En effet, si on se trompe de chemin, plus on est pressé, plus on s’éloigne. Enfin il faut repérer le paradoxe de la quête qui échoue et qui atteint le contraire du but recherché, à un autre niveau : est-ce qu’il n’est pas plus vraisemblable que 10 000 hommes aient plus de raison qu’un seul ? et qu’un seul soit l’élu des Dieux

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pour y parvenir (le Sage) ? Réponse de Sénèque : les 10 000 sont des fous qui vont tous dans la même direction que le troupeau et qui, par conséquent vont sombrer dans la mer du désir (décrite comme mer des Syrtes, agitée et dangereuse (chap. XIV, 2.)

Idée principale de Sénèque, chapitre I, alinéa n° 4 : « Nous périssons par l’exemple des autres. Nous guérirons pour peu que nous nous séparions de la foule. » Ici, la foule représente l’ensemble des gens insensés. En effet, il faut opposer la situation dans laquelle on peut croire n’importe qui, par exemple lorsqu’il s’agit d’aller dans une ville qu’on ne connaît pas. Ici tout le monde à la limite peut se montrer secourable et nous aider sur notre route. Inversement, quand on demande à quelqu’un (au Ier venu), la route du bonheur ou de la droite pensée, les gens répondent n’importe quoi : « dans celui-là (le cas du bonheur) c’est le chemin le plus battu et le plus fréquenté qui trompe le plus. » ( chap I, alinéa 2) Exemple aujourd’hui, le chemin de l’argent.

Si ce n’est pas l’argent qui fait le bonheur, non plus que le maximum de plaisir dans le minimum de temps, cela ne signifie pas que le Stoïcien n’essaye pas de se débrouiller avec son argent (ce n’est pas sa faute si la société cherche et utilise cet argent de toutes les manières), cela ne signifie pas non plus que le Stoïcien ne prend pas soin de son corps, mais que l’homme vit dans une société qui idolâtre le corps et le désir, alors que le Sage est celui qui les surmonte.

Si la foule se trompe, cela ne concerne pas seulement le bas peuple, mais aussi bien les gens de pouvoir (« aussi bien les gens en chlamyde que les têtes couronnées» (II, 2), prétendue élite de la société, qu’aujourd’hui d’ailleurs on désigne du nom ambigu de « people ». En effet, les gens d’ « élite » sont les parvenus ou les « libérés » que dépeint l’écrivain Pétrone dans le Satyricon. Parmi ces parvenus, qui passent leur vie dans l’excès, il y a le fameux Trimalcion (l’antihéros) chez Pétrone, et chez Sénèque les deux vedettes Nomentanus et Apicius spécialistes des plaisirs du ventre et du bas ventre (chap. XI, 4). Tous ces gens-là se distinguent par « leur intempérance imprégnée de parfums divers » (XI, 4), par leur addiction, et « tu diras qu’ils sont dans les plaisirs, et pourtant ils ne sont pas heureux parce qu’ils ne trouvent pas leur joie dans le bien » (idem), ce qui nous force à distinguer le bonheur du plaisir grossier.

D’où la maxime de Sénèque à la page 48 : « C’est à l’âme de trouver le bien de l’âme » car c’est elle qui constitue la réalité de l’individu, de sa vertu ou de son vice. Conséquence : ce n’est pas parce qu’on est riche ou puissant qu’on est meilleur ; ce n’est pas parce qu’on est envié qu’on est enviable et en quelque sorte un modèle pour les autres. Si au contraire, on était sage, on ferait

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