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La Culture

Mémoire : La Culture. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  1 Février 2012  •  9 830 Mots (40 Pages)  •  1 362 Vues

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LA CULTURE

Le terme de culture, quand il est utilisé pour nommer la sphère de ce que nous désignons comme « culturel » par opposition à ce que nous appelons la « nature », a aujourd´hui deux applications principales. Le dédoublement même de ces usages impose d´interroger tout particulièrement la cohérence de la notion qui les rassemble.

D´un côté, nous parlons de « la » culture, au singulier, en entendant par là le processus par lequel l´être humain, tout comme il met en valeur la nature en cultivant la terre et en y cultivant certaines plantes pour en récolter les produits, met en valeur ses propres facultés linguistiques, intellectuelles, spirituelles, morales, artistiques. En les développant, en les « cultivant », il fait surgir des langages, des connaissances, des savoirs d´ordre scientifique, technique, philosophique, religieux, ou encore des œuvres d´art : tous phénomènes qu´il considère comme la marque même de son humanité et que nous désignons comme constitutifs de la culture entendue au singulier.

D´un autre côté, le terme de culture s´utilise aussi au pluriel pour désigner la façon dont les divers peuples ou les divers moments de l´histoire de l´humanité se caractérisent par des phénomènes culturels qui les différencient les uns des autres. « Une » culture, parmi la diversité « des » cultures, est alors l´ensemble des manifestations culturelles spécifiques d´un groupe humain. On parle en ce sens de la culture européenne, de la culture indienne, de la culture japonaise ou encore, d´un point de vue historique, de la culture des Anciens et de celle des Modernes, voire de la culture des sociétés contemporaines. Dans tous ces cas, les cultures se distinguent les unes des autres par des systèmes de représentations et de valeurs qui s´expriment dans leurs langages, dans leurs religions, dans leurs arts, dans leurs mœurs et, plus globalement, dans leurs façons respectives de se rapporter au monde, aux autres cultures et à l´humanité dans son ensemble.

Ce dédoublement fait surgir d´emblée le principal problème auquel nous confronte aujourd´hui la question culturelle. Dans la logique de ce que nous visons par l´emploi du terme de culture au singulier, le « culturel » fait signe vers la dimension même de l´humanité. Il invite ainsi à réfléchir sur une identité universelle de l´être humain. Dans la logique de ce que nous entendons par « culture » quand nous utilisons le terme au pluriel, le « culturel » nous oriente bien davantage sur ce qui, au sein de l´humanité, vient différencier les groupes humains. Cette seconde acception, plurielle, du terme nous conduit alors à porter sur la différenciation des cultures une appréciation qui peut être fort contrastée : nous pouvons y voir une richesse à préserver ou plutôt un possible obstacle à la communication entre les hommes, voire à la compréhension qu´ils parviennent à avoir les uns des autres et à la façon dont ils devraient faire preuve réciproquement de tolérance ou de respect. Ainsi la question culturelle engage-t-elle directement celle de la représentation de l´humanité et de la façon dont nous réussissons à articuler dans cette représentation la certitude d´une identité humaine partagée et la reconnaissance des différences selon lesquelles cette identité commune se modalise. À quelles conditions, dans la conception même de la culture et des cultures, une telle articulation est-elle possible et susceptible d´être pensée ? Problématique dont, on en conviendra aisément, les enjeux débordent largement le souci de s´assurer de ce qui fait la cohérence d´une notion.

I. La culture entre la nature et les cultures

Il est difficile, pour construire de façon plus complète cette problématique, de ne pas partir de la discipline qui, parmi les sciences humaines, a contribué le plus fortement à renouveler notre appréhension de la sphère de phénomènes concernée, à savoir l´anthropologie culturelle. Cette discipline s´est en effet donné pour objet l´étude de l´humain aussi bien à travers les divers aspects de la culture (art, religion, technique, science, etc.) qu´à travers la diversité des cultures elles-mêmes. Une telle étude s´est constituée comme un ensemble spécifique d´investigations à partir des années 1930, autour des travaux de l´anthropologue américain Franz Boas. Bien des spécialistes contemporains de l´anthropologie culturelle, à commencer en France par une personnalité aussi éminente que Claude Lévi-Strauss, se reconnaissent comme les disciples de Boas. En ce sens, il pourrait être précieux, pour notre interrogation, de dégager ce qu´ont été à cet égard, notamment chez Lévi-Strauss, les acquis de ce courant de recherches.

1 - Élargir l´appréhension de la culture à la diversité des cultures

Pour orienter méthodologiquement le travail des anthropologues, Boas avait explicité certaines conséquences de la linguistique de Saussure. Chaque langage, avait expliqué Saussure, est un système de signes, dont les lois qui le structurent fonctionnent en dehors de tout contrôle par les sujets parlants : la production même des structures logico-linguistiques se trouvait ainsi renvoyée à une activité inconsciente de l'esprit, en sorte qu'on pouvait donc les étudier abstraction faite du sujet parlant, comme des phénomènes objectifs, solidaires d'autres faits sociaux. De là à l´application de l´approche structurale aux faits sociaux eux-mêmes, à commencer par les faits culturels, il n´y avait alors qu´un pas, dont le mérite de Claude Lévi-Strauss est précisément, sur la lancée de Boas, de n´avoir pas hésité à le franchir en considérant que les faits culturels sont structurés comme un langage.

Ainsi retiendra-t-on comme la marque la plus certaine imprimée par Lévi-Strauss à l´approche des phénomènes culturels la thèse qu´il défendit à propos des systèmes de parenté dans l´Anthropologie structurale (Paris, Plon, 1958) : tout « système de parenté est un langage », et par conséquent, comme c´est le cas des phénomènes au sein d´un langage, « les termes de parenté sont des éléments de signification » n´acquérant précisément cette signification qu´à partir de leur intégration dans un système. Bref, aussi bien pour ce qui touche aux représentations de la parenté que pour tous les autres contenus représentatifs et normatifs qui font partie de la culture d´un peuple, on ne saurait isoler un élément du système auquel il appartient et dont il faut dégager les principes de structuration qui régissent la façon qu´il a, pour le peuple considéré, d´être « signifiant ».

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