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L'évolutionnisme

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Par   •  26 Décembre 2012  •  Cours  •  1 587 Mots (7 Pages)  •  705 Vues

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L’évolutionnisme

La linguistique est l’héritière de la science classificatoire des siècles précédents. Rappelons-le, Friedrich von Schlegel oppose les langues organiques (fondées sur la puissance et la fécondité des racines) aux langues mécaniques (produits d’un aménagement compliqué et fragile), opposition assimilable à la dichotomie langues flexionnelles/langues à agglutination. Mais l’étude des langues adopte désormais une approche axiomatique, et la typologie de celles-ci cède peu à peu la place à la grammaire comparée Rask comme Bopp sont à la recherche des lois morphologiques et phonétiques régissant les langues (cf. Simon Bouquet (.)) : il ne s’agit plus de définir les ressemblances, mais de s’appuyer sur celles-ci pour déterminer les liens de parenté. Il existe dès lors une possibilité, par l’observation et la comparaison, de déceler les régularités des phénomènes, et ainsi, de déterminer les lois qui président aux changements linguistiques. La modification du point de vue à l’origine du comparatisme repose sur deux points essentiels :

• les changements dans les langues ne sont pas seulement dus à la volonté consciente de l’homme, mais à des nécessités internes,

• ces changements sont réguliers (cf. Oswald Ducrot (in Ducrot & Todorov, 1972 : 20-35)).

Se basant sur la grammaire, Rask s’intéresse à la classification des langues considérées comme des entités typologisables. N’observant que des correspondances statiques, il prend en compte les phonèmes et les phénomènes de transformations phoniques dès 1814. Bopp, qui en 1816 ne prend en considération que les phénomènes morphologiques, part du principe que la diversité des langues est la résultante de la transformation de la langue-mère, à savoir, l’indo-européen. Cependant, son approche n’est pas réellement historique : son Über das Conjugationssystem der Sanskritsprache in Vergleinchung mit jenem der griechischen, lateinischen, persischen und germanischen Sprache (1816) ne retrace les grandes lignes de l’évolution des langues qu’à des fins méthodologiques. Le passage entre les perspectives comparatiste et historique s’est en effet effectué progressivement par « une analyse des langues en terme d’innovation et de maintien, c’est-à-dire sur un axe historique de relations » (Swiggers, 1997 : 243).

Simon Bouquet (1997 : 89 n.) souligne que la méthodologie adoptée par les comparatistes est indissociable d’une perspective historique. En effet, la comparaison des états de langue procède de la dimension génétique de la discipline, que celle-ci soit à évaluer en terme d’origine ou d’évolution.

Les différentes étapes ponctuant la constitution du champ disciplinaire illustrent ces propos :

• en 1808, Friedrich von Schlegel (Ueber die Sprache und die Wisheit der Indier) élabore une programmatique linguistique et génétique ; dans ce but, il pratique une grammaire comparée à caractère systématique,

• en 1816, le Ueber das Conjugationssystem de Bopp donne une assise scientifique à la discipline ; il compare les langues afin de remonter à la langue-mère,

• en 1818, dans ses Observations sur la langue et la littérature provençale, August von Schlegel élabore les fondements d’une comparaison historique des langues romanes ; la même année, Rask introduit les changements de lettres comme critère de parenté génétique, et établit ainsi la notion de lois phonétiques,

• en 1819, dans sa Deutsche Grammatik, Jakob Grimm établit une grammaire comparée des langues germaniques et analyse les correspondances dans une perspective évolutionniste ; en posant l’approche historique comme la seule qui puisse être considérée comme scientifique, il établit la dimension historique à la discipline,

• en 1822, dans la seconde édition de son ouvrage, Grimm recherche les lois sous-jacentes aux changements phonétiques,

• en 1823 (« De studio etymologico », in Indische Bibliothek), August Wilhelm von Schlegel dresse une typologie des démarches étymologiques dont les vues rejoignent celles de la grammaire comparée et introduisent la notion de reconstruction,

• en 1833, Bopp cesse de considérer les phénomènes de changements phonétiques comme accidentels, et il admet la régularité de certains d’entre eux.

Héritière de différentes pratiques du siècle précédent393, la grammaire comparée constitue, dans les premières années du 19e siècle, un champ hétérogène. Tout comme les sciences du vivant qui se heurtent aux difficultés liées à la détermination des critères de classification, la science comparative naissante hésite quant aux critères de regroupement des langues à adopter (les structures grammaticales, les correspondances lexico-phonétiques, l’histoire interne des formes grammaticales) ou aux méthodes (mise à l’écart du contexte historique, perspective chronologique, mise en corrélation avec l’évolution de l’humanité et des civilisations) pour lesquelles opter (cf. Pierre Swiggers (1997 : 252-255)). Comme l’indique la chronologie ci-dessus, la discipline construit ses assises théoriques entre 1810 et 1820. Est alors adoptée une programmatique de croisement systématique de l’approche comparatiste et de la perspective historique sur les plans morphologique et phonétique (cf. Simon Bouquet (1997 : 89) et Pierre Swiggers (1997 : 243)). En 1840, les conquêtes méthodologiques des comparatistes permettent à la grammaire comparée de constituer un champ scientifique homogène.

Le passage de la perspective classificatoire à la perspective historique n’est pas imputable à la seule mutation interne de la discipline,

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