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L'art Peut-il Se Passer De règles?

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Par   •  15 Avril 2013  •  2 806 Mots (12 Pages)  •  1 660 Vues

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L’art peut-il se passer de règles ?

On se représente souvent l’artiste comme un individu qui serait doué d’un don créatif, et dont l’activité se contenterait de suivre

le cours de son inspiration. L’art ne serait donc pas un travail, mais le résultat d’une démarche totalement libre et spontanée

réservée à quelques élus ; la création artistique serait ainsi inexplicable, et ferait du même coup l’objet d’une admiration

particulière, du fait même de l’incapacité à en rendre raison.

Aussi se demander si l’art peut se passer de règles, c’est-à-dire si l’activité artistique peut être envisagée comme une création

indépendante de tout procédé technique et méthodique, pose le problème de la compréhension de cette activité. La création

artistique relève en effet d’une certaine pratique ; il s’agit bien, pour l’artiste, de faire quelque chose, de produire un objet —

poème, statue, musique, film, etc. — en fonction d’un projet, à partir d’une idée première, ou plus généralement en recherchant

une cohérence propre à l’oeuvre à venir. La question pose ainsi le problème de savoir, dans l’hypothèse où l’art obéirait à des

règles, si l’artiste peut dire à l’avance quel résultat donnera son activité, et de quelle qualité il sera. Ou bien dans l’hypothèse

inverse, suivant laquelle il n’y aurait pas de règles dans la création artistique, cette question pose également le problème qui

consiste à se demander si l’on peut apprendre à devenir artiste, du fait qu’aucun enseignement réglé ne pourrait être transmis

du maître à l’élève.

Afin de répondre à ces différents enjeux, il est essentiel de commencer par légitimer le lien qui est mis en question ici entre l’art

et les règles.

La notion d’art, en elle-même, contient l’idée d’une activité propre à l’être humain, en ceci que relève de l’art tout ce qui est

artificiel et qui, du même coup, s’oppose à une production naturelle. Dans son sens premier, est donc art ce qui est produit par

une activité intentionnelle de l’homme. Avant donc de faire penser à des oeuvres artistiques, l’art doit plus généralement être

envisagé comme une pratique donnant lieu à la production de certaines actions ou de certains objets, voulus par un être

humain. Ainsi, le mot latin « ars » et le mot grec « teknè » sont-ils de parfaits équivalents, et signifient exactement « savoirfaire

», ensemble de procédés, métier. C’est d’ailleurs ainsi qu’on continue d’entendre la notion d’art, lorsqu’on évoque l’art culinaire, l’art du boulanger, ou l’art du discours. Dans ces différents cas et dans bien d’autres, l’art est donc une technique, ou

un ensemble de procédés techniques, que l’on sait devoir être efficaces. Car c’est bien l’efficacité qui est recherchée alors,

c’est-à-dire l’utilité de différentes actions considérées comme nécessaires à la production d’un effet voulu. Ainsi l’art culinaire

consiste-t-il à respecter des dosages d’ingrédients, à procéder à des mélanges, à réaliser un certain nombre de gestes dans un

ordre précis, le tout étant censé déboucher sur la production d’un plat qu’on a prévu d’obtenir. En ce sens bien précis, on peut

dire que la définition même de l’art consiste à revendiquer la fidélité à des règles : c’est parce qu’on suit les différentes étapes

de production d’un objet, que notre action sera efficace.

Aussi doit-on admettre que dans l’art entendu plus particulièrement comme création d’oeuvres artistiques, il y a bien également cette dimension technique qui consiste à suivre des règles de production. On parle bien en effet des différentes techniques de la peinture, par exemple : on ne peint pas de la même manière pour faire une aquarelle, une huile, une gouache, un dessin au fusain. Une sculpture sur bois ne se fait pas avec la même technique qu’une autre sur plâtre, sur marbre, ou sur métal. De même en musique pour ce qui est de connaître l’art de l’harmonie, ou en cinéma pour ce qui concerne la maîtrise des différents types de plan — champ, contre-champ, plans dits « de coupe », etc. En ce sens, il est clair que comme on peut apprendre l’art culinaire en suivant une formation, en respectant à la lettre les recettes de cuisine, on peut aussi apprendre les règles de la pratique artistique de son choix. La maîtrise de l’aquarelle ou du dessin au fusain peut en effet être transmise par un enseignement ; il s’agit bien dans ce cas d’acquérir un savoir-faire, d’assimiler quelques règles de l’habileté en procédant par étapes successives, en respectant différentes contraintes liées aux matériaux, aux outils employés. Dès lors il est clair que n’importe qui, par un tel enseignement, peut accéder à la maîtrise d’une activité artistique liée à un certain genre de création.

Pour autant, il est nécessaire de distinguer une telle maîtrise, de la qualité proprement artistique de ce qu’on est capable de produire. Le simple fait de maîtriser l’art de l’aquarelle — c’est-à-dire la technique de l’aquarelle — ne fait pas de moi un artiste, comme le simple fait de savoir le solfège ne fait pas de moi un compositeur. Pour le dire autrement, on peut considérer que l’on a bien une activité artistique lorsque l’on peint, que l’on joue d’un instrument de musique, ou que l’on écrit des poèmes ; mais cela ne signifie pas nécessairement qu’il s’agisse d’une véritable création artistique, lorsque la valeur de ce que l’on produit réside essentiellement dans une application de compétences techniques. Ce qui fait la valeur d’un tableau de Picasso, ce n’est pas seulement l’aptitude du peintre à utiliser ses pinceaux mieux qu’un autre ; ce qui fait la force d’une symphonie

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