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Étude du roman Au Bonheur Des Dames d'Emile Zola

Note de Recherches : Étude du roman Au Bonheur Des Dames d'Emile Zola. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  6 Octobre 2012  •  1 565 Mots (7 Pages)  •  857 Vues

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DENISE était venue à pied de la gare Saint-Lazare, où un train de

Cherbourg l'avait débarquée avec ses deux frères, après une nuit passée sur

la dure banquette d'un wagon de troisième classe. Elle tenait par la main

Pépé, et Jean la suivait, tous les trois brisés du voyage, effarés et perdus, au

milieu du vaste Paris, le nez levé sur les maisons, demandant à chaque

carrefour la rue de la Michodière, dans laquelle leur oncle Baudu

demeurait. Mais, comme elle débouchait enfin sur la place Gaillon, la

jeune fille s'arrêta net de surprise.

Licence : Domaine public

1I

DENISE était venue à pied de la gare Saint-Lazare, où un train de

Cherbourg l'avait débarquée avec ses deux frères, après une nuit passée sur

la dure banquette d'un wagon de troisième classe. Elle tenait par la main

Pépé, et Jean la suivait, tous les trois brisés du voyage, effarés et perdus, au

milieu du vaste Paris, le nez levé sur les maisons, demandant à chaque

carrefour la rue de la Michodière, dans laquelle leur oncle Baudu

demeurait. Mais, comme elle débouchait enfin sur la place Gaillon, la

jeune fille s'arrêta net de surprise.

- Oh ! dit-elle, regarde un peu, Jean ! Et ils restèrent plantés, serrés les uns

contre les autres, tout en noir, achevant les vieux vêtements du deuil de

leur père.

Elle, chétive pour ses vingt ans, l'air pauvre, portait un léger paquet ; tandis

que, de l'autre côté, le petit frère, âgé de cinq ans, se pendait à son bras, et

que, derrière son épaule, le grand frère, dont les seize ans superbes

florissaient, était debout, les mains ballantes.

- Ah bien ! reprit-elle après un silence, en voilà un magasin ! C'était, à

l'encoignure de la rue de la Michodière et de la rue Neuve-Saint-Augustin,

un magasin de nouveautés dont les étalages éclataient en notes vives, dans

la douce et pâle journée d'octobre. Huit heures sonnaient à Saint-Roch, il

n'y avait sur les trottoirs que le Paris matinal,les employés filant à leur à

bureaux et les ménagères courant les boutiques. Devant la porte, deux

commis, montés sur une échelle double, finissaient de pendre des lainages,

tandis que, dans une vitrine de la rue Neuve-Saint-Augustin, un autre

commis, agenouillé et le dos tourné, plissait délicatement une pièce de soie

bleue. Le magasin, vide encore de clientes, et où le personnel arrivait à

peine, bourdonnait à l'intérieur comme une ruche qui s'éveille.

- Fichtre ! dit Jean. Ça enfonce Valognes... Le tien n'était pas si beau.

Denise hocha la tête. Elle avait passé deux ans là-bas, chez Cornaille, le

premier marchand de nouveautés de la ville ; et ce magasin, rencontré

brusquement, cette maison énorme pour elle, lui gonflait le coeur, la

I 2retenait, émue, intéressée, oublieuse du reste. Dans le pan coupé donnant

sur la place Gaillon, la haute porte, toute en glace, montait jusqu'à

l'entresol, au milieu d'une complication d'ornements, chargés de dorures.

Deux figures allégoriques, deux femmes riantes, la gorge nue et renversée,

déroulaient l'enseigne : Au Bonheur des Dames. Puis, les vitrines

s ' e n f o n ç a i e n t , l o n g e a i e n t l a r u e d e l a M i c h o d i è r e e t l a r u e

Neuve-Saint-Augustin, où elles occupaient, outre la maison d'angle, quatre

autres maisons, deux à gauche, deux à droite, achetées et aménagées

récemment. C'était un développement qui lui semblait sans fin, dans la

fuite de la perspective, avec les étalages du rez-de-chaussée et les glaces

sans tain de l'entresol, derrière lesquelles on voyait toute la vie intérieure

des comptoirs. En haut, une demoiselle, habillée de soie, taillait un crayon,

pendant que, près d'elle, deux autres dépliaient des manteaux de velours.

- Au Bonheur des Dames, lut Jean avec son rire tendre de bel adolescent,

qui avait eu déjà une histoire de femme à Valognes. Hein ? c'est gentil,

c'est ça qui doit faire courir le monde ! Mais Denise demeurait absorbée,

devant l'étalage de la porte centrale. Il y avait là, au plein air de la rue, sur

le trottoir même, un éboulement de marchandises à bon marché, la

tentation de la porte, les occasions qui arrêtaient les clientes au passage.

Cela partait de haut, des pièces de lainage et de draperie, mérinos,

cheviottes, molletons, tombaient de l'entresol, flottantes comme des

drapeaux, et dont les tons neutres, gris ardoise, bleu marine, vert olive,

étaient coupés par les pancartes blanches des étiquettes. À côté, encadrant

...

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