Médée

Médée, sorcière liée aux forces du mal et aux ténèbres dans la mythologie grecque, est l’héroïne de nombreux dramaturges tels que Sénèque, Euripide ou encore Corneille. Fille d’Aétès, roi de Colchide, petite-fille du soleil et nièce de la magicienne Circé, Médée n’a cessé de faire parler d’elle. Elle joue un rôle essentiel dans le cycle des Argonautes : sa passion pour Jason et les conséquences funestes qui en découlent font d’elle le type de femme fatale, traîtresse à son père et à sa patrie, abandonnée par l’amant qu’elle a sauvé, mais aussi épouse jalouse et redoutable par ses pouvoirs de magicienne. Elle ira même jusqu’à commettre l’irréparable : tuer ses deux enfants. Corneille, en 1635, présente sa Médée, dans laquelle il mêle courants baroque et classique : baroque, puisqu’il ne respecte pas certaines règles classiques, notamment celle de la bienséance, et classique, en y mettant en scène un personnage de haut rang, soumis à la fatalité. Ainsi, le personnage de Médée peut-il susciter la pitié du spectateur ? Selon l’une des règles classiques, la catharsis, théorisée par Aristote, Médée peut agir sur les spectateurs en leur procurant deux sentiments qui semblent contradictoires : terreur et pitié. Les spectateurs qui assistent à la représentation devraient se purger de leurs passions en s’identifiant au personnage sur scène. Une première partie traitera donc de la pitié que procure Médée aux spectateurs et une seconde partie montrera que, malgré la compassion que l’on peut ressentir à son égard, Médée reste une femme monstrueuse qui terrorise à la fois ses proches et son assistance.

Tout d’abord, Médée suscite la pitié voire l’empathie de ses spectateurs.

En effet, elle est avant tout une femme qui s’est privée de famille et de patrie par amour. Issue de Colchide, cité dans laquelle son père est roi, Médée est obligée de fuir après avoir trahi son père en aidant Jason à conquérir la toison d’or qui appartenait à Aétès. Par amour, par intervention divine, notamment Aphrodite qui la fait tomber éperdument amoureuse de Jason, Médée se retrouve livrée à elle-même, c’est pourquoi elle demande à Jason de l’épouser. Cette femme n’a que Jason sur qui s’appuyer : elle a trahi son père, tué son frère par amour. Sa détermination à aider l’homme qu’elle aime ne peut qu’émouvoir les spectateurs, qui s’identifient sans doute à ce personnage solitaire.

De plus, Médée est une femme trompée. Malgré toutes les épreuves affrontées pour aider l’homme qu’elle aime, ce dernier, Jason, l’abandonne lâchement après leur arrivée à Corinthe. Après avoir conversé avec Créon, le roi, Jason décide de congédier Médée afin d’épouser la princesse Créüse, fille du roi. Précisons que Jason avoue lui-même accommoder sa flamme en fonction de ses affaires ! Blessée, offensée, Médée se retrouve seule : elle a non seulement perdu sa famille et sa patrie, mais en plus de cela, elle perd sa seule raison de vivre : son époux. Créüse, quelques temps avant ses noces, a même l’audace de demander à Médée la robe qu’elle portait lors de son mariage avec Jason. Tristesse, colère, empathie… qui pourrait ne pas s’identifier à Médée et avoir pitié de cette mère de deux enfants, abandonnée par l’homme qu’elle chérit tant

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