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Micromégas, Voltaire

Cours : Micromégas, Voltaire. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  11 Juin 2013  •  Cours  •  1 800 Mots (8 Pages)  •  1 455 Vues

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Extrait du chap. VI de Micromégas

(« Insectes invisibles … dont le pied seul couvrirait le globe où je suis descendu. »)

Conte philosophique saisissant par sa brièveté autant que sa fantaisie, Micromégas met en scène un personnage éponyme, un géant issu de Sirius, qui traverse l’espace interstellaire avec un Saturnien et aboutit sur la planète terre. Ce récit est l’occasion de renouveler le regard sur le monde et les hommes, en adoptant un point de vue extérieur, aussi étonné que critique. Au chapitre VI, les extraterrestres entrent en communication avec les humains ; le passage étudié relate cet échange, et nous verrons par son étude comment cette rencontre permet de renouveler le regard sur le genre humain. Nous étudierons d’abord comment la rencontre est mise en scène, avant de voir qu’elle entraîne un questionnement sur l’Autre ; dans un troisième temps, nous montrerons que ce questionnement génère une réflexion philosophique.

La rencontre avec l’Autre est l’un des thèmes majeurs de la relation de voyage, que Voltaire imite dans ce conte. Pour la mettre en scène, l’auteur a donc recours à des procédés de dramatisation, qui lui permettent de souligner son importance. Le caractère optimiste du conte se manifeste enfin dans le succès de cette rencontre.

Depuis Hérodote, toute relation de voyage a pour finalité la mise en scène de la rencontre avec les étrangers ; cette rencontre est elle-même l’occasion de s’interroger sur l’Autre et donc sur l’humain : « Qui est cet autre ? Qui suis-je face à lui ? », telles sont les questions que le voyageur se pose. Ici, le narrateur utilise différents moyens pour dramatiser cette rencontre et lui donner toute son importance, notamment le différé : dans un conte bref qui ne comporte que sept chapitres, cette rencontre se situe à l’avant-dernier chapitre ; le narrateur a ménagé l’attente du lecteur. Micromégas et son compagnon doivent en outre déployer des trésors d’ingéniosité pour entrer en contact avec les humains : c’est la fonction du début du chapitre que de mettre en scène les moyens de cette rencontre, permise par la curiosité et les interrogations des personnages ainsi que par l’ingéniosité de Micromégas qui fabrique une trompette en rognure d’ongle pour parvenir à établir le contact avec les minuscules humains. Enfin, la dramatisation passe par les manifestations d’impatience de la part des extraterrestres : « l’étonnement », « inexplicable », « brûlaient d’impatience... ». Tous ces procédés permettent de souligner l’importance de cette rencontre.

La rencontre est, par conséquent, à la fois difficile et désirée, ce qui contribue à la mettre en valeur. Cette importance est aussi soulignée par la solennité du discours que Micromégas adresse aux humains. L’apostrophe initiale, par sa longueur, est emphatique : « Insectes invisibles, que la main de Créateur s’est plu à faire naître dans l’abîme de l’infiniment petit ». Le jeu des sonorités contribue à l’harmonie de l’expression ; on remarquera ainsi les assonances en « in » et « i » qui amplifient la résonance de cette apostrophe : « Insectes invisibles », « main », « abîme de l’infiniment petit ». L’allusion au Créateur est également propre à faire entrer cette solennité, confirmée ensuite par l’effroi des humains : « Ils ne pouvaient deviner d’où elles partaient », précise le narrateur. Lorsque le contact parvient enfin à s’établir, la rencontre est placée sous le signe de l’interrogation : la dernière phrase du deuxième paragraphe présente cinq interrogations formulées sur le mode indirect.

C’est enfin une rencontre heureuse qui est racontée. Elle se produit en deux temps : le temps de la surprise puis le temps de l’échange, qui s’établit au troisième paragraphe. Cette organisation permet de souligner une attitude favorable à une rencontre heureuse. La peur est rapidement évacuée. Les voyageurs s’adaptent à ce que peuvent recevoir leurs interlocuteurs : le Nain, « qui [a] la voix plus douce que Micromégas », se substitue à son compagnon pour s’adresser aux humains. Les humains, passé le premier mouvement de surprise, mettent en place des stratégies qui favorisent la rencontre : « observa l’interlocuteur avec des pinnules braquées sur un quart de cercle... ». La mise en scène est ainsi l’occasion pour Voltaire de souligner les conditions favorables à la rencontre avec l’Autre.

Le récit emploie manifestement tous les procédés de la dramatisation pour mettre cette rencontre en évidence ; en même temps, le conteur choisit de faire de cette rencontre un succès, ce qui favorise l’échange et le questionnement sur l’Autre, point essentiel du conte.

Dans ce passage est ainsi énoncée l’attitude favorable à la rencontre : un esprit d’ouverture, apte à reconnaître dans l’Autre un égal. À cette condition, l’échange instauré peut être bénéfique à chacune des parties.

Cette rencontre de l’Autre est donc facilitée par un esprit d’ouverture commun aux deux parties : les paragraphes deux et trois sont ainsi construits en miroir, pour mettre en évidence le partage de la curiosité. Dans le deuxième paragraphe, cet étonnement est souligné par l’expression hyperbolique : « si jamais il y eut quelqu’un d’étonné ». Dans le paragraphe suivant, c’est au tour du Saturnien de manifester cet étonnement : « Mille toises ! s’écria le nain. Juste ciel !... ». L’étonnement, topos de la relation de voyage, est ici la base saine pour une rencontre heureuse ; il favorise une curiosité bénéfique.

La curiosité favorise la rencontre en suscitant l’interrogation, comme nous l’avons vu.

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