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Lorenzaccio : Oeuvre De Parole Ou D'action ?

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Par   •  22 Mai 2013  •  3 462 Mots (14 Pages)  •  4 568 Vues

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Selon vous, Lorenzaccio est-elle plutôt une œuvre de parole ou d'action?

Eléments d'intro : - caractère inédit de la pièce, placée dans un volume au titre explicite Un spectacle dans un fauteuil, donc, davantage faite pour être lue que jouée (et donc vue) ; des choix dramaturgiques caractéristiques d'une époque, le Romantisme, qui n'a pas été sans poser des problèmes (et qui en pose encore aujourd'hui) pour mettre en scène Lorenzaccio - partir de la fonction du drame [à raccourcir pour garder l'effet d'amorce] : représenter l'action humaine, conçue comme une dynamique particulière de désirs et d'obstacles se jouant, directement et immédiatement, dans un univers éthique ou social. La temporalité du drame est le présent; son espace propre est celui des relations interindividuelles (Peter Szondi : «la sphère de l'entre-deux»); son élément fondamental est le conflit, c'est-à-dire la collision des forces opposées, d'un désir et de ses obstacles, supposant un équilibre entre ses forces antagonistes. Enfin, le médium particulier du drame est le dialogue. - reformuler la problématique pour mettre à jour la complexité et la tension créée entre ces deux termes : soit : si l'on considère qu'au théâtre, parole et action sont conjointes/ indissociables, Musset a-t-il véritablement privilégié l'une par rapport à l'autre et ce, à quelle fin? soit : peut-on dire que dans la pièce, la parole prenne une place plus importante que l'action proprement dite? - [annonce du plan] Si l'on peut à juste titre considérer Lorenzaccio comme une "œuvre de parole", l'action présente est une composante essentielle du drame ; cette tension entre les deux pôles engendre de la part de Musset une perspective critique sur leur combinaison

I - Lorenzaccio, une pièce très "écrite", que l'on pourrait presque qualifier de "bavarde"

A - une place prépondérante accordée à la parole

1- la richesse des dialogues et monologues : pièce qui se construit sur une mosaïque de paroles : les commentaires des marchands sur la situation de la ville ou du commerce, ou sur l'improbable numérologie pseudo-politique du chiffre 6 lié à la mort du Duc ; hormis Alexandre, auquel Musset refuse une intériorité (personnage brutal, grossier, qui ne réfléchit guère), les personnages principaux ont leur monologue, qui permet de saisir leurs pensées et leur psychologie : Philippe Strozzi, II,1 ; cardinal Cibo, II, 3 ; Lorenzo, IV, 2 et 9) ; on peut d'ailleurs saluer la construction dramaturgique de Lorenzaccio, qui permet souvent de mettre en regard (et en opposition) deux visions opposées (au monologue idéaliste de Strozzi répond le monologue réaliste et pragmatique de Cibo)

2- une utilisation de tous les ressorts du langage et des styles : le contrepoint ironique entre les insultes des rejetons Strozzi et Salviati et le pédantisme de leur précepteurs qui font assaut d'amabilités et de propos ronflants et pontifiants ; la parole brutale du Duc (affectueuse seulement pour son "mignon") face au discours plus travaillé de Lorenzo, qui cache son être profond sous le masque de la duplicité (voir la tirade I,1 sur la jeunesse débauchée, entre leçon libertine digne d'un Dom Juan et lyrisme sensible)

3- en accord avec les codes romantiques, qui privilégient le mélange des genres et des registres, on assiste à un déploiement extraordinaire de toutes les possibilités du langage, du plus emporté (Pierre) au plus contenu (Philippe), du plus creux (les pédants) au plus profond (monologue de Lorenzo), du plus authentique (discussion entre Philippe et Lorenzo, notamment à l'acte III,3) au plus retors et manipulateur (le cardinal Cibo) ; Musset excelle dans l'écriture des dialogues et la capacité à créer des personnages qui se révèlent aussi à travers leurs discours et leur relation à autrui, par ce qu'ils disent et ce que l'on dit d'eux (citer ne serait-ce que les diverses dénominations dont est affublé Lorenzo)

B - une parole qui parfois prend le pas sur l'action

1- de nombreuses scènes qui ne font pas avancer l'action, ou du moins servent plutôt à donner informations et réflexions sur la situation : les scènes entre le marchand de soieries et l'orfèvre

servent de pauses, commentent la situation de Florence et l'opinion de la "vox populi" ; une scène comme celles des deux dames de la cour et de l'officier allemand (I, 5) renvoie au luxe frivole de la cour, mais aussi à l'emprise de Charles-Quint sur la cité et les accommodements du pouvoir avec l'ennemi ; la scène entre les précepteurs et les deux enfants, reproduisant le déterminisme familial et les conflits entre Strozzi et Salviati (inverse de Romeo et Juliette)

2- la visée de Musset est également de permettre de comprendre les personnages, à travers les paroles qu'ils prononcent ; une scène aussi longue que la discussion entre Philippe Strozzi et Lorenzo (fameuse suite de tirades de l'acte III, 3), qui a très souvent été réduite lors des mises en scène postérieures, permet de dévoiler les pensées de chacun et de mieux appréhender l'être profond de Lorenzo, sans toutefois lever complètement l'ambiguïté du personnage

3- enfin, certaines paroles se substituent même à l'action : loin de montrer toutes les actions sur scène, certaines péripéties, dans la tradition de la tragédie, sont racontées par un personnage : c'est le cas pour Pierre (et Salviati dans une moindre mesure puisqu'il travestit la réalité pour le Duc : II, 7), qui raconte à son père son altercation avec Julien Salviati (III,2) ou Pippo, qui narre à Philippe la mort de Lorenzo (V,7) ; pour faire bonne mesure, la parole peut aussi générer l'action, ou la susciter : dans l'intrigue Strozzi, après moult atermoiements, le prieur de Capoue déclenche la colère de Pierre en racontant l'offense faite à Louise, qui entraîne vengeance et empoisonnement

C - La place accordée à la parole permet aussi à Musset de la mettre en abyme, de poser la question de ses pouvoirs ou limitations Les mots sont souvent l'occasion d'une visée réflexive, et d'une interrogation sur ses pouvoirs : 1- thème de la parole authentique ou falsifiée, trompeuse (mensonge ou vérité?) : les diverses entrevues entre la marquise Cibo et son beau-frère mettent en avant les interrogations de la marquise quant aux intentions du cardinal : IV, 4 "Quel fil effrayant de vos pensées voudriez-vous me faire tenir?" /

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