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Le Surréalisme

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Par   •  3 Novembre 2014  •  2 900 Mots (12 Pages)  •  593 Vues

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Que recouvre exactement le terme « surréalisme » ?

Définir ce terme suppose de définir au préalable ce que peuvent être le « surréel » ou la « surréalité ». Ce qui donne lieu, pendant toute l'année 1924, à une querelle entre deux groupes d'héritiers d'Apollinaire, bien décidés chacun à revendiquer sa filiation et à imposer sa propre conception du surréalisme. Nous nous concentrerons ici sur trois manifestes d'importances évidemment inégales.

1. L'attaque principale vient, à la fin du printemps et dans le courant de l'été 1924, du tandem Paul Dermée-Yvan Goll, assistés de Pierre Albert-Birot, le régisseur des Mamelles de Tirésias dont nous avons parlé plus haut.

Yvan Goll en particulier revendique l'antériorité de l'utilisation du terme en rappelant qu'il a déjà défini sa conception du surréalisme dans la préface de son drame satirique Mathusalem en 1919 (1) : « Le surréalisme est la plus forte négation du réalisme. Il fait apparaître la réalité sous le masque de l'apparence, favorisant ainsi la vérité même de l'être. Des masques : grossiers, grotesques, comme les sentiments dont ils sont l'expression. Non plus des héros, mais des hommes, non plus des caractères, mais des instincts mis à nu. Tout ce qu'il y a de plus nu. Pour connaître un insecte il faut le disséquer. Le dramature est un savant, un politicien, un faiseur de lois : le dramaturge surréaliste place à sa guise des éléments empruntés à un lointain domaine de la vérité, qu'il a perçue alors qu'il collait l'oreille aux murailles étanches du monde.»

L'année suivante, en préface à ses deux « surdrames » Les Immortels, il a complété sa pensée, dans des termes que leur poésie pouvait rendre séduisants, mais qui restaient malgré tout bien vagues : « Le dramaturge nouveau sent qu'il doit livrer un combat, et affronter, en tant qu'homme, tout ce qui, en lui comme autour de lui, est animal ou chose. C'est une pénétration dans le royaume des ombres, lesquelles s'accrochent à tout et se tapissent derrière toute réalité. Dès qu'elles auront été vaincues, la libération sera peut-être possible. Le poète doit réapprendre qu'il existe d'autres mondes bien différents de celui des cinq sens : le monde surréel.»

La guerre est donc déclarée, dans un article du Journal littéraire du 16 août 1924, contre ce que Pierre Albert-Birot appellera plus tard « l'école bretonnière ». L'article d'Yvan Goll, « Une réhabiltation du surréalisme », provoque une sèche riposte de Breton, Aragon et d'autres dans le même Journal littéraire du 23 août : « Le surréalisme est tout autre chose que la vague littérature imaginée par M. Goll. C'est le retour à l'inspiration pure, c'est la poésie enfin dégagée du contrôle arbitraire, du sens critique, et, loin d'avoir été abandonné depuis Apollinaire, c'est depuis ce temps qu'il a pris toute sa valeur. » Dès lors, les deux clans sont constitués. Début octobre, tentant de prendre Breton de vitesse, Yvan Goll lance sa revue Surréalisme et y publie, sans nom d'auteur, un Manifeste du surréalisme. Comme il est difficile à trouver (2), nous le mettons ici en ligne en intégralité :

« La réalité est la base de tout grand art. Sans elle pas de vie, pas de substance. La réalité, c'est le sol sous nos pieds et le ciel sur notre tête.

Tout ce que l'artiste crée a son point de départ dans la nature. Les cubistes, à leurs débuts, s'en rendirent bien compte : aussi humbles que les plus purs primitifs, ils s'abaissèrent profondément jusqu'à l'objet le plus simple, le plus dénué de valeur, et allèrent jusqu'à coller sur le tableau un morceau de papier peint, dans toute sa réalité.

Cette transposition de la réalité dans un plan supérieur (artistique) constitue le Surréalisme.

Le surréalisme est une conception qu'anima Guillaume Apollinaire. En examinant son oeuvre poétique, nous y trouvons les mêmes éléments que chez les premiers cubistes ; les mots de la vie quotidienne ont pour lui « une magie étrange », et c'est avec eux, avec la matière première du langage, qu'il travaillait. Max Jacob raconte qu'un jour, Apollinaire nota simplement des phrases et des mots entendus dans la rue, et en fit un poème.

Seulement avec ce matériel élémentaire, il forma des images poétiques. L'image est aujourd'hui le critère de la bonne poésie. La rapidité d'association entre la première impression et la dernière expression fait la qualité de l'image.

Le premier poète au monde constata : « Le ciel est bleu ». Plus tard, un autre trouva : « Tes yeux sont bleus comme le ciel ». Longtemps après, on se hasarda à dire : « Tu as du ciel dans les yeux ». Un moderne s'écriera : « Tes yeux de ciel ». Les plus belles images sont celles qui rapprochent des éléments de la réalité éloignés les uns des autres le plus directement et le plus rapidement possible.

Ainsi, l'image est devenue l'attribut le plus apprécié de la poésie moderne. Jusqu'au début du XXe siècle, c'était l'oreille qui décidait de la qualité d'une poésie : rythme, sonorité, cadence, allitération, rime : tout pour l'oreille. Depuis une vingtaine d'années, l’oeil prend sa revanche. C'est le siècle du film. Nous communiquons davantage par des signes visuels. Et c'est la rapidité qui fait aujourd'hui la qualité.

L'art est une émanation de la vie et de l'organisme de l’homme. Le surréalisme, expression de notre époque, tient compte des symptômes qui la caractérisent : il est direct, intensif, et il repousse les arts qui s'appuient sur des notions abstraites et de seconde main : logique, esthétique, effets de grammaire, jeux de mots.

Le surréalisme ne se contente pas d'être le moyen d'expression d'un groupe ou d'un pays : il sera international, il absorbera tous les ismes qui partagent l'Europe, et recueillera les éléments vitaux de chacun.

Le surréalisme est un vaste mouvement de l'époque. Il signifie la santé, et repoussera aisément les tendances de décomposition et de morbidité qui surgissent partout où quelque chose se construit.

L'art de divertissement, l'art des ballets et du music-hall, l'art curieux, l'art pittoresque, l'art à base d'exotisme et d'érotisme, l'art étrange, l'art inquiet, l'art égoïste, l'art frivole

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