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Le Biographique

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Par   •  19 Mai 2013  •  2 675 Mots (11 Pages)  •  624 Vues

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II. DISSERTATION :

Dans son article concernant les Misadventures de Sylvia Smith, Deborah Ross écrit : « Sylvia n’a rien à dire, c’est vrai, les histoires qu’elle raconte n’ont rien de mémorable, sans doute, mais tout leur intérêt ne réside-t-il pas dans leur banalité même ? ». Pensez-vous que pour entreprendre le récit d’une vie, il faut que celle-ci soit « mémorable » ?

De nombreux auteurs mirent par écrit leur vie et leurs souvenirs que ce soit à travers des autobiographies romancées ou non, des journaux intimes ou encore des mémoires. Ainsi, nous pourrions citer les Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand, ou même les Confessions et Les Rêveries du promeneur solitaire de Rousseau ou encore la Vie de Henri Brulard de Stendhal qui sont restées de nos jours de grandes autobiographies. Dans un même style mais quelque peu particulier, Sylvia Smith, et ses Misadventures, est un écrivain originaire de Londres qui a réalisé son œuvre à quarante-trois ans, soit trois ans après en avoir eu l’idée. Pourquoi Sylvia Smith a-t-elle entrepris de faire son récit de vie ? D’abord, elle n’en a pas la moindre idée ; elle estimait seulement que sa vie avait été « amusante et intéressante », répond-elle à Deborah Ross. Cette dernière est l’auteur d’un article paru dans le journal anglais « The Independant » publié en août 2001 ; elle y affirme que « Sylvia Smith a pour réputation d’être très, très ennuyeuse. ». L’autobiographie de l’auteur lui a également valu ce commentaire presque admiratif d’un critique : « Je n’ai jamais rien lu d’aussi ennuyeux. ». Deborah Ross confirme cette idée dans son article : « Sylvia n’a rien à dire, c’est vrai, les histoires qu’elle raconte n’ont rien de mémorable, sans doute, mais tout leur intérêt ne réside-t-il pas dans leur banalité même ? ».

De ce fait, il nous vient une question : pour qu’un auteur entreprenne le récit d’une vie, faut-il que celle-ci soit « mémorable » ? Autrement dit, comment la banalité d’une vie sans intérêt particulier peut-elle être jugée digne d’entrer dans la mémoire de des lecteurs ? Mais, avant de juger un récit de vie digne d’être mémorisé ou non aux yeux des lecteurs, ne faudrait-il pas avant tout connaître l’intention de l’auteur ? Et même si une pareille banalité telle que les mémoires de Sylvia Smith est publiée, ne nous tendrait-elle pas en réalité un miroir comme moyen de nous interroger sur nous-mêmes et sur le sens de notre vie ?

Nous tâcherons de répondre à ces questions en découvrant, en un premier temps, quelles ont été les raisons et l’intention de certains auteurs à entreprendre un récit de vie. Dans un second temps, nous verrons qu’un récit banal, malgré l’ennui qu’il procurerait chez le lecteur, pourrait cependant l’exhorter à s’interroger sur son propre parcours et son sens.

Certes, la banalité, le fait de « ne rien avoir à dire », a priori engendrent l’ennui chez le lecteur. L’écrivain, en oubliant d’introduire des éléments qui suscitent une émotion, de la pitié ou de l’admiration prend le risque d’émettre un discours creux qui alors affranchirait l’attention du lecteur. Néanmoins, avant de ne juger le contenu du texte, ne devrions-nous pas prendre connaissance de l’intention de l’auteur ?

En effet, rappelons, par exemple, une œuvre de Jean-Jacques Rousseau : Les rêveries du promeneur solitaire, ouvrage autobiographique inachevé publié en 1782, soit quatre ans après la mort de l’auteur. Ce livre est composé de dix chapitres ou dix « promenades » dont la réflexion est centrée sur la nature de l’homme et son esprit. Grâce à des anecdotes revenant sans cesse sur sa vie personnelle, Rousseau nous présente sa vision philosophique du bonheur, proche de la contemplation, de l’état ataraxique, à travers un isolement relatif, une vie paisible, et surtout, une relation fusionnelle avec la nature, développée par la marche, la contemplation, l’herboristerie que l’auteur pratique. En dépit de sa volonté, son œuvre a été publiée alors qu’il affirme dès sa première promenade qu’il n’a établi ce récit de vie que pour lui : « Je fais la même entreprise que Montaigne, mais avec un but tout contraire au sien : car il n’écrivait ses Essais que pour les autres, et je n’écris mes rêveries que pour moi. ». Bien que le lecteur soit interpellé par la toute première phrase du livre (« Me voici donc seul sur la terre, n’ayant plus de frère de prochain d’ami de société que moi-même »), personne d’autre n’était censé lire son œuvre. Les Confessions de Rousseau, quant à elles, sont aussi une autobiographie publiée après sa mort. Contrairement à ses Rêveries, l’auteur a écrit ses Confessions pour se justifier et répondre aux nombreuses accusations dont il était victime en plus d’être accuser de paranoïa à ce moment de sa vie. Deux œuvres et pour chacune, une raison différente qui justifie l’entreprise de l’auteur : la première a été publiée afin de permettre à Rousseau d’accomplir un acte catholique, celui de l'aveu des pêchés, de la confession ; l’autre a été écrite pour son propre plaisir mais a été publiée contre son intention alors que toutes deux sont dignes d’être mémorisées.

Environ deux siècles plus tard, on offre un carnet de notes à une petite fille qui fête sa treizième année en 1942 qu’elle utilisera comme journal intime connu sous le nom de Journal d’Anne Frank. De son vrai nom, Annelies Marie Frank était une adolescente allemande juive qui écrivait son journal alors qu'elle se cachait avec sa famille et quatre amis à Amsterdam pendant l'occupation allemande de la Seconde Guerre mondiale. Anne Frank est morte à seize ans du typhus dans le camp de Bergen-Belsen ; son journal relate sa vision des évènements, depuis le 12 juin 1942 jusqu'au 1er août 1944. Son père Otto Frank, qui était le seul survivant du groupe, revient à Amsterdam à la fin de la guerre et apprend que le journal d'Anne avait été sauvegardé. Convaincu du caractère unique de l'œuvre de sa fille, Otto Frank tenta de le faire éditer. Une fois publié, plus de vingt-cinq millions d'exemplaires du livre ont été vendus et il a été traduit dans plus de cinquante langues. Qui aurait cru qu’un journal intime d’une jeune adolescente aurait bombardé autant d’esprits ? Voici donc un jeune auteur qui, à l’origine, n’aurait jamais eu l’idée de faire publier son journal mais dont l’œuvre est pourtant considérée comme l'un des piliers de la littérature de la Shoah et l'une des œuvres-clés du vingtième siècle.

Entre temps, deux auteurs ont marqué le vingtième

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