La mélancolie

La mélancolie

de l'Antiquité à nos jours, une première approche …

INTRODUCTION

Définition Larousse : État de dépression, de tristesse vague, de dégoût de la vie, propension habituelle au pessimisme . Aujourd'hui nous associons spontanément dépression et mélancolie. Cependant cette notion remonte à l'Antiquité. En effet nous trouvons des héros antiques que de nos jours on qualifie de mélancoliques dans la mythologie grecque, à l'instar d'Orphée. On peut considérer Orphée comme le premier poète lyrique, il chante accompagné de sa lyre. Après avoir perdu Eurydice, sa bien aimée, il chante sa douleur, et présente ainsi une figure de la mélancolie. La mélancolie est à la fois un état source d'inspiration et une esthétique. La mélancolie est donc liée à la création artistique depuis l'Antiquité. C'est pourquoi il convient de traiter de la mélancolie en littérature. Il s'agit d'une notion complexe, qui n'a pas toujours eu le même sens, et qui traverse plusieurs domaines, comme la médecine, la littérature et la peinture. Le plus logique est d'en faire une approche chronologique, de l'Antiquité à nos jours. C'est donc ce que nous ferons. Cependant le temps d'un exposé est trop bref pour s'attarder sur la perception de la mélancolie à chaque époque. Nous parcourrons donc rapidement les siècles, et nous arrêterons plus longuement sur l'Antiquité, où l'on trouve les premières traces écrites de la mélancolie, la Renaissance, objet de ce cours, et le XIX°, que l'on pourrait qualifier de « siècle de la mélancolie ».

L'ANTIQUITE

Etymologiquement, « mélancolie » provient du grec « mélas » qui signifie « noir » et « kholé » qui signifie la bile. L'étymologie du mot nous renvoie donc à la médecine antique grecque. Plus précisemment à la théorie des quatre humeurs que l'on attribue aujourd'hui à Hippocrate. Né environ en 460 avant JC et mort environ en 370 avant JC, Hippocrate est le plus ancien médecin grec sur lequel les historiens disposent de sources. Dans ses travaux, il reprenait la conception grecque qui établissait une correspondance entre le microcosme et le macrocosme, entre le corps humain et la cohérence du cosmos. Ainsi, Hippocrate professait que le corps humain était constitué de quatre humeurs, de la même façon que toute matière est constituée de quatre éléments : Eau, Air, Terre et Feu, et de quatre qualités : Humide, Sec, Chaud et Froid, le corps humain étant alors le reflet miniature de l'univers. Les quatre humeurs du corps humain étaient donc les suivantes :

*Le sang, que l'on disait produit par le foie et reçu par le cœur. Ce liquide était défini comme chaud et humide, on le faisait donc correspondre avec l'Air

*La pituite, aussi appelée phlegme ou lymphe, qui se rattachait au cerveau, considérée comme froide et humide, et correspondant à l'Eau

*La bile jaune, provenant aussi du foie, sèche et chaude, comme le Feu

*La bile noire, ou atrabile, définie comme sèche et froide et que l'on rattachait à l'élément de la Terre.

Selon cette théorie, les éléments devaient coexister en équilibre pour que l'individu demeure en bonne santé. Le déséquilibre ou l'excès d'une des humeurs faisait naître différents tempéraments :

*Un excès de sang donnait lieu, par exemple, à un caractère de type sanguin, c'est-à-dire jovial et chaleureux

*Un excès de lymphe donnait lieu à un caractère de type flegmatique, c'est-à-dire calme et imperturbable, capable de garder son sang froid

*Un excès de bile jaune entraînait un caractère enclin à la colère et à la violence

*Quant à l'excès de bile noire, il donnait lieu à un caractère mélancolique, c'est-à-dire anxieux, triste , introverti et ressentant du dégoût pour la vie.

Le mélancolique est donc par définition quelqu'un de déséquilibré. La bile noire était vue comme agressive, irritante, rongeante, les trois autres humeurs diluant sa nocivité. Le moindre excès d'atrabile renversait tout l'équilibre du système des humeurs et donnait lieu à des variations d'états de santé rapides et dangereuses. Selon Hippocrate, il résultait diverses maladies de la bile noire, comme la folie furieuse, l'épilepsie ou bien des lésions cutanées, et non pas que la tristesse. L'état que nous appelons aujourd'hui mélancolique n'est qu'une des multiples expressions du pouvoir pathogène de la bile noire. Il existait donc des soins pour tenter de guérir la mélancolie, considérée alors comme réél mal physique. On utilisait, par exemple, l'ellébore, qui était une plante à fort pouvoir purgatif. Le but était de rappeler à l'extérieur une humeur rentrée.

Mais le terme de mélancolie est complexe et désigne aussi bien maladie du corps que maladie de l'âme. Hippocrate dans ses Aphorismes a écrit « Quand dysphémie et crainte persistent, un tel état est mélancolique » (la dysphémie c'est un trouble de l'humeur entraînant un état dépressif) Cette affirmation d'Hippocrate dénote un flou entre le corps et l'âme.

Il peut être est intéressant de rapporter l'anecdote du philosophe Démocrite, contemporain d'Hippocrate, qui était considéré, à son époque, comme un mélancolique atteint de folie car il riait, d'un rire triste et satirique, de tout. Hippocrate, en bon médecin, décida de discuter avec lui avant d'entamer tout traitement. Il en conclut que Démocrite n'était pas du tout fou. Ce qui est intéressant ici, c'est la valorisation de la parole par rapport au traitement médical. Ceci nous prouve que la mélancolie dès son origine se détache du simple mal dû à une cause physique.

Aristote mettra également en lumière la mélancolie comme une pathologie mentale. Aristote est un philosophe grec, né en 384 avant JC et mort en 322. Pour lui, la bile noire est à la fois chaude et froide, elle est inconstante,

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